dimanche 29 novembre 2020

jorion et l'avenir de l'homme

On m’a filé ça à lire en m’affirmant qu’il s’agissait d’une pensée remarquable. Admettons. Et donc, pour savoir où je suis, je regarde la biblio du mec. Ça ne trompe jamais. On commence pat Hermann, puis par MSH, Masson, Gallimard-BSH, Odile Jacob, que du nanan. Je devrais me régaler. Ce qui me chagrine, c’est que je ne trouve pas d’infos sur le cursus universitaire du mec. Formation, enseignement, chaires. Rien. Rien non plus sur son champ de réflexion. Le prière d’insérer m’annonce un anthropologue et sociologue. Il »révolutionne depuis dix ans le regard que nous portons sur la finance et l’économie ». Bon. Un financier caché sous la peau d’un philosophe. Rien de neuf. L’éditeur me dit également qu’il a enfourché la Rossinante de la collapsologie, variante quasi-millénariste de l’écologie. Un coup d’oeil a la biblio. Pas un titre. Ma petite sonnette interne grésille. Pipeau. Lisons quand même. Après tout il s’agit du génie humain. Y’a des trucs à apprendre. D’emblée, il fait fort en traitant du transhumanisme. Il doit être un peu niais pour croire qu’on pense à Silicon Valley. Il manque juste l’essentiel : Boorstin. On en déjà parlé : Daniel Boorstin une sorte de Leroy-Ladurie étatsunien qui affirme que les USA ont une obsession historique : repousser les frontières et donc les limites. C’est le transhumanisme. Avec un détail qui change tout : la frontière à déplacer, elle est biologique. Mais sur le sujet, pas un mot .C’est con parce que cette idée, elle éclaire aussi les rapports Chine-USA. Il faut dire que le Jorion et moi, on a pas les mêmes lectures. Il parle de l’extinction de l’espèce mais s’il avait lu Gould ou Bakker, il saurait que le Vivant ne s’éteint pas : il se transforme. Je choisis exprès des références étatsuniennes parce que Jorion,il a que ça. Sur les cinquante premières pages,, une allusion à Weber, deux ou trois à Kojève. Le corpus référentiel est américain. Jorion est cohérent. Trader, spécialiste d’IA, mollo-libéral (un mollo-libéral est un libéral mou qui garde toujours une échappatoire), il baigne dans la pensée mythologique américaine, fondée sur la quantité. Il ne lui vient pas à l’idée que UN est pertinent.p En bon americano-penseur, il se vautre dans la religion, la plus présentable, celle de St Paul, justifiant ainsi la fin de l’Histoireo Sa pensée devient alors erratique, mélangeant données théologiques, psychanalyse simplifiée et philosophie wikipédiesque. Les chapitres sur la Chine sont à la limite de la caricature. Jorion commence par convoquer Billeter pour nier l’altérité de la Chine !! Ici encore les références sont triées. On ne rencontre ni Chesneaux, ni Gentelle, ni François Martin, ni Viénet et la jolie page sur l’harmonie évite Van Gulik ce qui est un comble. C’est que la Chine adossée à la pensée marxiste et dopée aux biens physiocratiques est aux antipodes de Jorion et du transhumanisme. Aux antipodes également de la collapsologie. J’ai bien rigolé en lisant les dithyrambes adressés aux services de recherche scientifique de l’armée américaine. De la Corée à l’Afghanistan, voilà cinquante ans qu’ils n’ont pas gagné une guerre. Moi qui suis un con, j’en déduis qu’il faut fuir leurs pistes de recherche. Mais Jorion trouve admirable que l’intelligence artificielle ait permis à un computer de bluffer au poker. Comme Patrick Bruel. La science avance. Voilà cinquante ans que les Chinois bluffent et manipulent les Américains. Quand tu as l’intelligence naturelle, l’artificielle est inutile