lundi 18 septembre 2023

Dujardin et la France.


 

Erreur de casting. L’idée de Jean Dujardin était bonne et juste, et parfaitement mal réussie. Sciences Po a voulu s’emparer des gilets jaunes. Et, comme toujours, a tout mélangé. Evidemment que le rugby, c’est la France. La France du  sud, la France des Plantagenet, la France  des  exclus. Mais c’est la France qui braille la Marseillaise comme si Saint Denis était Valmy. Elle braille la Marseillaise pour soutenir les joueurs des Fidji, n’y voyez aucune incohérence c’est logique mais la logique vous échappe, la logique du peuple n’a rien à voir avec la logique. C’est la France des villages, sans malice, mais avec des valeurs, la France sans vocabulaire mais avec des monuments aux morts. La France populiste, celle qui est allé des tumulus du chalcolithique à l’ossuaire de Douaumont.

 

Quand j’avais une vie de con, j’avais pris l’habitude de répondre à côté à la question la plus con qui soit : « Une coupette ? » qui me faisait dire : »Heu…vous n’auriez pas un jaune ? Un pastis ? un Ricard ? » Je ne pouvais pas ajouter : « Une boisson d’hommes » c’était le début de mes autocensures, il faut du temps pour mépriser ses semblables Le Ricard mettait une distance suffisante entre l’avenue de Wagram et Doucine. Doucine, c’était le lounge du village. Une grande salle avec le bowling au bout. Je dis bowling pour vous aider à comprendre, en fait c’était le lieu où on jouait aux quilles, sans machine à ramasser les grosses quilles rustiques taillées à l‘herminette par Albert, le menuisier. Le quillard complétait l’installation ouverte sur la rue par la boutique du coiffeur….car Doucine était coiffeur, mais avec des horaires différents et l’auberge ne servait pas de coupettes, même pas pour le mousseux. J’ai souvent pensé à Doucine comme à bien d’autres, pour mesurer l’immensité de la distance entre les mots et les sens qu’ils trimbalent. En fait, chez Doucine le mousseux avait à peu près le même sens que « des bulles » chez le pseudo connaisseur en champagne proche de l’Arc de Triomphe. Les mots portaient moins de sens que les mocassins. A cette aune, autant regarder les grolles qu’écouter les paroles. Certains mots signent le con, par exemple « authenticité ». Le con aime ce qui est authentique, peut être parce qu’il est authentiquement con. « authentique » est très utilisé en gastronomie et, année après année, le nombre de cuisiniers « authentiques » est en augmentation, au rythme de la disparition des produits et des savoirs.

 

On aura compris, j’aime la France la vraie, celle des ploucs, mes semblables, mes frères, la France qui ne ment pas, la France qui nourrit les Français, la France de Verdun et Valmy, pas celle du Quartier Latin. « C‘est vulgaire » me dit-on. Fièrement. Etymologiquement, vulgar désigne celui qui parle la même langue. Et c’est là que Dujardin a dérapé. Il a cru pouvoir incarner ce vulgaire quand ce n’est pas la place d’un beau gosse. Dujardin s’est rêvé San Antonio alors que l’incarnation de la France est Bérurier. Reprends la cérémonie, vire le bellâtre et mets le seul Bérurier possible : Depardieu, avec un tonnelet de gamay, une casserole de gras-doubles et la main au cul de la secrétaire. D’un seul coup, tout bascule et le rugby redevient un sport d’équipe quand on déconne dans le bus où le président montre son cul. C’est pas bien ? La France n’aime plus son histoire qu’elle trouve peu présentable, vu que c’est une histoire de baise et de picole. Le génie de la France s’incarne dans sa gastronomie avec des produits de récupération dont elle a fait un miracle. Paysan, le Français a exploité les abats. Dans un animal, on bouffe tout. Seuls les Chinois ont fait mieux. On bouffe tout mais pas n’importe comment. Service, art de la table, flambées, tout ce savoir mis au service des « bas-morceaux » mérite notre admiration….et notre rage face à la perte de savoir. Cette année 2023 a vu la disparition de l’épouvantable pisse-froid qu’était le professeur Got qui aurait détesté le docteur Demaison dont tous les villages de mon enfance ont connu la vieille jeep qu’il embarquait sur des pistes infréquentables avec des taux d’alcoolémie olympiques. Par tous les temps, il faisait son boulot : sauver les citoyens. Même bourré ? Oui. Seul compte le résultat, pas la manière. Sauf pour les journalistes, surtout XX.

 

Les Français sont devenus des trous du cul. Ils sont contents de l’image qu’ils donnent en oubliant comment s’est créé cette image.Macron a remplacé Herriot qui aimait tant l’andouillette authentique.