Juin s’achève. Et personne n’a commémoré Mai 68. Ça aurait
pourtant valu le coup de faire un état des lieux. On aurait pu voir comment on
a changé. Ou pas.
Moi, je jubile. En mai 68, je manifestais contre la guerre
du Viet Nam. US, go home. Bon, ça c’est fait. Je manifestais pas contre
les enfants grillés par le napalm ou l’agent orange. Je savais que la guerre
entraine ce genre de situations. Je voulais simplement que les Ricains cessent
de soutenir des gouvernements dont la pensée politique allait contre mes idées,
idées qui étaient marxistes, n’est ce pas, Dany le Rouge ?
Le monde était composé de deux blocs antagonistes. Choisis
ton camp, camarade. Souvenez vous. Y’avait les Rouges et les « tenants de
la démocratie ». Y’avait aussi les entre-les-deux. De Gaulle, par exemple.
Ou les pays du Tiers-monde, les fils de Bandoung. Mais qui se souvient de
Bandoung ? Les pays du Tiers Monde, ils hésitaient : où était leur
intérêt ? Le vieux Général, il était malicieux : un coup, il
reconnaissait la Chine, un coup il virait l’OTAN de France, un coup il
soutenait les Québécois. Malicieux, mais à sens unique : il adorait emmerder
les Américains. Et ça, ça me convenait.
Et donc, pendant cinquante ans, ça a duré comme ça avec les
Ricains qui semblaient conforter leur hégémonie et devenir les maîtres du
monde. C’est ce que nous disait la presse achetée par le grand capital (je
sais, ça fait ringard comme formule). On a baigné là dedans pendant cinquante
ans. Avec la conviction que le capitalisme avait gagné la bataille.
Et voilà t’y pas qu’au moment de fêter le cinquantenaire, la
même presse annonce que la Chine est devenue la première puissance économique
du monde et même que ce pauvre Trump s’inquiète vu que les Chinois vendent, en
les bradant un peu, les bons du Trésor américain dont ils ont pléthore dans
leurs coffres. Ouais, mais les Chinois sont capitalistes…. Et donc le
capitalisme a quand même gagné. On peut pas se désavouer.
Voilà des années que j’explique que la Chine ne s’est pas
convertie au capitalisme mais poursuit sa voie pour construire le
« socialisme à la chinoise ». Voilà des années que tout le monde rit
et que les éditeurs me renvoient mes manuscrits à la figure. Je m’en fous. Les
faits sont têtus et il faudra bien que les rieurs admettent cette chose
incroyable : Mai 68 a financièrement gagné. Financièrement et
politiquement. Trump s’agite en Corée du nord et s’écrase en mer de Chine.
L’axe Moscou-Pékin est reconstruit et englobe désormais l’Inde et l’Iran. Ce
qui fait que les Iraniens se marrent quand Trump gesticule. Ils sont désormais
à l’abri.
J’aurais bien aimé qu’on commémorât. Sérieusement, je veux
dire. Que tous les pseudo-spécialistes, les géopoliticiens auto-proclamés,
viennent admettre qu’ils se sont plantés, qu’ils n’ont rien vu venir. Pourtant,
Pékin n’a pas été avare de signes. Encore eut-il fallu que nous les percevions.
Mais on ne voit que ce qu’on veut.
J’aurais bien aimé qu’on commémorât. Et qu’on en tire les
leçons en changeant notre système d‘alliances ce qui est inconcevable pour nos
dirigeants. Ils vont préférer s’accrocher aux basques des Ricains qui nous
entraineront dans leur désastre. J’espère seulement que nous ne les suivrons
pas dans leur délire politique qui deviendra militaire. Il vaut mieux finir
pauvre que mort.
J'aurais bien aimé que soit admise la victoire des soixante-huitards.
Je ne suis pas pessimiste, je repense à Lao Pierre qui me
disait parfois : « Le seul truc qu’ils savent faire, c’est renverser
la table pour changer le cours du jeu ». Pierre ne connaissait pas Trump.
Notre seule chance, c’est que le moment choisi pour
renverser la table ne soit pas le bon.
On en reparlera
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