La crise du coronavirus est avant tout une crise
épistémologique mais personne ne le dira. Revenons donc sur quelques thèmes de
ce blog.
1/ la pensée de Raymond Boudon C’est le mec le plus cité
quoique jamais lu. Boudon a inventé le concept d’effet non désiré qu’il a
appelé « effet pervers ». Pas un communiquant, pas un sciencepotard,
pas un essecophile qui ne parle
d’effet pervers. De préférence sans avoir lu Boudon. C’était au début de sa
carrière. Près de la retraite, ayant analysé les systèmes administratifs, il
arrive à une conclusion simple : la prise de décision rationnelle n’existe
pas car elle est impossible. Personne n’en parle jamais. Jai discuté avec
quelques administrateurs ou gestionnaires de haut vol. Ils n’ont jamais lu
Boudon. Normal. On te prépare à prendre des décisions, c’est pas pour
t’expliquer qu’il est plus simple de jouer aux dés. Forcément : une prise
de décision implique de tenir compte de nombreux paramètres ET de leurs
interactions. On court toujours le risque d’oublier quelque chose et que cet
oubli fasse basculer le château de cartes décisionnel (ou décisif). Un
gouvernement doit être certain. Le Président ne peut pas dire qu’il ne sait
pas. Mais il peut dire qu’il ne savait pas. Les communiquants soufflent :
on ne dit pas « j’étais incapable » mais « je n’étais pas en
capacité de… ». Restons softs.
2/ la pensée de Roland Barthes et de quelques linguistes. Il
est inutile d’accumuler les chiffres : un signe pertinent suffit. Encore
faut il juger de la pertinence. Communication encore. Expliquer la pertinence
demande du savoir. Cracher des chiffres ne demande rien que le savoir d’une
boutiquière anglaise faisant sa caisse. Pensée Thatcher. Le chiffre est
pertinent en soi. Ce qui est faux, bien entendu, la pertinence du chiffre est
donnée par le contexte. Quand on le connaît.
3/ toujours avec Barthes : sortir de l’idéologie qui
crée le mythe. Le mythe fait croire que ce qui est artificiel est naturel. Mais
cela suppose du savoir. Il suffit de savoir communiquer et, si c’est trop compliqué
faisons comme à Sciences Po, enlevons ce qui gêne. On parlera de sens de la
synthèse. Même, et surtout, si les éléments enlevés sont pertinents.
Ce dont je suis certain, c’est que l’analyse sera faite par
les condisciples des analysés et qu’ils n’utiliseront que les instruments
qu’ils connaissent. En clair, l’analyse épistémologique ne vaudra pas un clou.
Idem pour l’analyse idéologique. Macron a fait au mieux dans le cadre
idéologique fixé par Bruxelles. Evidemment. Et personne ne changera le paradigme.
Depuis un demi-siècle, le chiffre signifie la science. On le
pulvérise, on le dissémine, on le postillonne pour analyser les faits sociaux.
On l’a vécu avec le virus couronné : 14 morts en Picardie, 640 à Wuhan.
Parfait. Quel est le sens ? Cherchez pas, y’en a pas.. une minute de
micro.
Je pense à Brecht. Galileo Galilei… Il y a du Galilée chez
Raoult… « Celui qui ne connaît pas la vérité, celui-là
n'est qu'un imbécile. Mais celui qui la connaît et la qualifie de mensonge,
celui-là est un criminel ». Ajoutons désormais ceux qui ne connaissent pas
la vérité et la qualifient malgré tout de mensonge : les réseaux sociaux,
abjecte tribune des ignares. Tiens, une info : Brecht adorait le cigare et
son ami Castro le fournissait en cigares cubains. Quel rapport avec le
sujet ? Aucun, c’est de la pensée BFM. Ça meuble. Ajoutons qu’un corona, c’est
un cigare. Une minute de micro en plus.
Va falloir que je vous apprenne à décrypter. Avant qu’on ne
« debriefe » la crise du corona. Crise ? mot-mantra. Krusein, la
crise, c’est un mot grec. Médical. Le mot désigne l’acme d’une maladie, le
moment où on meurt ou on guérit. En langage media : « Ça passe ou ça
casse ». C’est moins joli. Ouais mais moi je suis snob, méprisant,
arrogant et je vous emmerde.
On peut être certain que le debriefing confortera l’action
et que ce sera encore une occasion manquée….Une de plus
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