Didier Raoult vient de marquer son époque… tous ceux qui le
suivent n‘ont rien remarqué..quelques couillons sentent le biais mais ça ne va
pas loin.
Didier Raoult nous débarrasse de la statistique en sciences
biologiques et c’est une victoire de la pensée.
Rappelons donc quelques faits incontestables. Pasteur a
inventé le vaccin antirabique avec un seul patient. Broca a découvert l’aire du
langage avec un seul patient. Les deux Geoffroy Saint Hilaire ont inventé l’embryologie
avec une collection de tératologie, des êtres uniques et monstrueux ;
quant à Richard Goldschmidt, on l’a un peu oublié même si sa théorie de
« monstres prometteurs » était porteuse de promesses. Pour satisfaire
les humanistes, appelons à la barre Stephen Jay Gould et La Malmesure de
l’homme
Ce sont juste des exemples tirés en vrac de ma mémoire car
ils nous disent tous la même chose : le vivant ne se plie pas aux réalités
statistiques et le scientifique n’en a pas besoin. On peut compter des pots de
confiture ou des billets d’avion, pas des phénomènes vivants. Il suffit qu’UN
virus mute UNE fois pour que la pandémie démarre. C’est chiant, ça oblige à
penser. Je sais, j’ai publié en son temps un texte d’André Langaney sur les
probabilités en génétique. Il s’agissait de probabilités pas de statistiques,
d’hypothèses pas de pseudo-résultats. Ce soir, encore, j’ai écouté Salomon. Un
désastre intellectuel, une bouillie informe, une litanie vaticanesque où les
lits valsent avec les morts qui sont morts dans d’autres lits. Ceci permet
simplement à chacun de s’emparer du débat, d’argumenter sur les morts dans le
public ou le privé, dans les EHPAD ou les maternités, de tracer des courbes, sujets
sans intérêt mais qui meublent la conversation.
Personne n’a relevé ma remarque ; Raoult est un héros
brechtien. Il est sans cesse attaqué sur le terrain qui n’est pas le sien car
c’est le terrain où il est désarmé. Il doit sans cesse subir les attaques du
pouvoir en place, du pape élyséen et des cardinaux à sa botte, relayés par les curés
de campagne médiatiques. La meute hurle et il est seul.
Les motivations, on s’en fout. Peut être qu’il est l’ennemi intime
de Monsieur Buzyn ou que, comme l’affirme Combaz, le Président porte le poids
du rapport à son père, médecin. Mais c’est secondaire. Comme tout héros
brechtien, il synthétise un rapport politique, celui du solitaire face au
pouvoir. Combaz a un mot étonnant que j’enrage de ne pas avoir trouvé. La queue
devant l’institut de Raoult, c’est un plébiscite. Rien n’est plus juste et la politique
reprend ses droits. En réalité, tout le monde se fout qu’il ait raison. Et il
ne s’agit pas d’un fait nouveau. Raoult a adopté (spontanément ?) la
posture de De Gaulle au matin du 18 juin, renvoyant ainsi Macron au fauteuil de
Pétain. Pas vraiment confortable. D’ailleurs les communicants macroniens ont
(spontanément ?) recueilli l’héritage : unité nationale, retour à la
terre, Vichy revient. Ils n’ont pas réfléchi car Raoult a renversé le
paradigme : on fait avant de parler.
On résume le 18 juin à un appel, oubliant que c’est un appel à
l’action : on continue la guerre, rejoignez moi.
Sur les réseaux sociaux, j’ai regardé avec soin adversaires
et admirateurs de Raoult ; en gros, ce sont les mêmes que les gilets
jaunes ce qui signe un regroupement intellectuel. Les mots peuvent changer, le
sens est le même. Poujade disait : le poisson pourrit par la tête tandis
qu’Audiard affirmait qu’un imbécile marchant allait plus loin qu’un
intellectuel assis. Traduisons en langage politique non conformiste : le
peuple aime qu’on se sorte les doigts du cul.
Alors, Raoult, populiste ? Evidement non. C’est un
personnage brechtien amélioré par Bertolucci : il n’est pas conformiste
alors que le conformisme est une dimension essentielle du populisme. Notons
simplement que la solitude va mal avec le populisme : le peuple lynche
volontiers les solitaires. Et donc rien n’est simple si l’on oublie
Rabelais : les moutons de Panurge ont besoin d’un bélier à suivre. En son
temps, le peuple ne suivait pas Galilée mais attendait que le bourreau s’en
charge.
Il reste peu de certitudes sauf celle du départ ; le
vivant n’est pas réductible aux statistiques et corrélation n’est pas
causalité. Il reste des penseurs dans les sciences du vivant. Je viens de lire
un texte du professeur Sicard qui s’étonne du peu d’intérêt suscité par le
passage du virus de l’animal à l’homme. Comme c’est une de mes interrogations,
je l’ai trouvé vachement bien. Forcément. Sicard explique assez bien le manque
de recherches ; on n’a ni les chercheurs, ni le temps pour vérifier toutes
les pistes. Il omet un élément : personne n’a envie de dire que les
animaux sont un vecteur. On devrait confiner les chats de gouttière et les
yorkshires à petit nœud. Ou les piquer. Et si le besoin des vieux d’avoir des
animaux chez eux était une cause de leur surmortalité ? Piste omise mais
intéressante.
Le temps répondra aux questions. Il sera toujours temps de
piquer les bichons maltais. Ou les sharpeis et les pékinois qui sont aussi
asiatiques que les pangolins
On en reparlera.
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