mardi 11 février 2020

AVANIE ET FRAMBOISE

Avec cette histoire d’infanticide féminin (on peut dire féminicide prépubère, en novlangue, c’est pas mal), je pense à Bobby Lapointe. Avanie et Framboise, sont les mamelles du destin.

J’accepte que le rapprochement puisse choquer. En même temps, comme dit le Président, je pense à Simone. A soixante ans, pas une gamine, mais assassinée et découpée, sans beaucoup de soin, par un schizo qui squattait dans son village. BFM TV n’a jamais parlé de Simone. Ni de quelques autres. C’est imprévisible le schizo. Y’en a qui démembrent avec soin. On sait jamais, avec eux. Mais, l’un dans l’autre, quand ils refusent les soins, statistiquement ils « passent à l’acte » comme disent les spécialistes. Ha bon ? ils peuvent refuser les soins ? Ben oui. Ils sont responsables, on peut pas leur imposer. Ils ne deviennent irresponsables qu’après le passage à l’acte.

T’as compris ? Heu, pas très bien. Cette responsabilité fluctuante, j’ai du maL. BFM TV aussi. Ils choisissent les intervenants. La Buzin a échappé aux radars tout comme la Belloubet. En échange, on a eu droit à un psychanalyste qui n’a rien expliqué. Et donc, je suis allé demander à des psychiatres, des médecins, pas des onanistes du vocabulaire.

Voilà plus de trente ans que les pouvoirs publics ferment des hôpitaux, y compris des hôpitaux psychiatriques… avec l’aval des masturbateurs de vocabulaire. Vocabulaire administratif. Le rôle d’un hôpital psychiatrique n’est pas de soigner… Soigner un fou, un fada, ou comme ils le disent « une personne avec des antécédents psychiatriques » est quasiment impossible. Il y faut beaucoup de temps pour un résultat aléatoire…. Mais ce n’est pas le rôle d’un hôpital psychiatrique qui est là, avant tout, pour préserver les autres des fous. Si, en plus, on les soigne, c’est mieux. Quand ils sont entre les murs, l’Etat joue son rôle : protéger les citoyens, Vanille ou Simone. Ou tous ceux qu’on ne connaît pas.

Les journalistes, ça leur va pas. Le fou poignardeur, c’est une partie de leur fonds de commerce, ça fait de l’audience. Et récidiviste encore mieux. Facile à percevoir : compter les minutes, les tables rondes et les écrans de pub. Ouais, mais les erreurs judiciaires, les mecs enfermés par les familles pour toucher l’héritage et autres joyeusetés ? Oui, ça arrive, mais c’est pas la majorité. D’Emile Zola à Gilles Perrault, le combat contre l’erreur judiciaire a mobilisé quelques talents, finalement pas si nombreux.

La sémantique est toujours un piège : dans hôpital psychiatrique, l’épithète est essentielle. C’est un hôpital, un endroit qui abrite des malades, mais ce ne sont pas des malades comme les autres. Pathologies mal nommées, complexes, le diagnostic à lui seul prend plus de temps que les soins dans d’autres maladies…pharmacopée mal maitrisée et surtout, surtout, l’ombre de Foucauld et sa haine maladive de l’enfermement. Une partie du corps médical a suivi Foucauld en prônant l’abandon de l’asile.. On a donc fermé des lits, puis des établissements au motif que le « passage à l’acte » est statistiquement rare. Un seul cas suffit : la petite fille est morte et la fille de Simone est dévastée.. Parce qu’un fou qui passe à l’acte détruit plusieurs vies.

L’Etat n’a pas fait son travail. L’aliénation excuse tout. Même l’incapacité de l’Etat.

Ce genre de situation est un cas d’école. Chaque expert a fait son travail, les dépenses de l’Etat ont été diminuées, les fous en liberté sont heureux pense t’on, les poignardés n’ont pas eu de chance. Il reste aux survivants à se démerder avec les réponses à leurs questions. A poil devant un Etat qui a décidé de ne pas les protéger.

Un article de L’information Psychiatrique de 2006 (vol. 82 ; 645-652) fait le point sur la violence  des malades psychiatriques. Les auteurs admettent que « L’abus de substances est fortement associé à la violence mais, même sans abus d’alcool ou de drogue, les personnes ayant un trouble mental grave ont trois à quatre fois plus de risques de commettre un acte violent". Trois à quatre fois plus de risques ! C’est des chiffres à vous casser l’angélisme. Surtout quand ils proviennent de pays différents majoritairement occidentaux. On va pas se briser les neurones avec des statistiques, mais quand on lit que « le double diagnostic de schizophrénie et d’abus de drogue ou d’alcool multiplie par 17 le risque de commettre un homicide par rapport à la population générale », on commence à s’inquiéter. Belloubet, elle doit avoir ces chiffres quelque part. Puis vient la conclusion : »Plus on psychiatrise, moins on criminalise » avec le corollaire « Moins on psychiatrise, plus on désinstitutionnalise, plus on criminalise ». En clair, plus on ferme d’hôpitaux psychiatriques, plus on produit d’assassins.

J’aime pas la compassion. C’est une sorte de ver solitaire qui s’installe dans tes neurones et qui te fait mettre à tes sentiments les godasses de ta raison. Tu en oublies les vérités premières et d’abord celle-ci : tu peux tout expliquer, puis tout excuser, le mort qui est le premier intéressé n’en a rien à faire. C’est trop tard.

Foucauld a bien marqué l’opposition évidente entre l’Etat et l’individu et il a barbouillé l’individu de compassion angélique et gaucho-compatible. Comme il était malin, il a éjecté du jeu le troisième larron, souvent inconnu, souvent invisible : la victime. Il a omis de mettre en évidence une autre vérité première : l’Etat doit agir pour protéger. Ça suppose une anticipation : l’aliéné n’a rien fait quand on l’enferme et on flirte avec les limites du droit. Ça suppose un budget. Ça suppose surtout des politiques bien conseillés par des experts insensibles aux sirènes de la communication endoxale.

Bref, ça suppose qu’on n’est plus capable de faire ce que Pinel, Charcot et leurs copains ont fait quand Mac Mahon gouvernait la France.


Aujourd’hui, c’est plutôt Mac Macron……

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