samedi 25 janvier 2025

LE CARNAVAL DES IMBÉCILES

Il est plaisant de voir les actualités se télescoper. C’est, en général, le moyen de compter les cons.

 

Depuis l’élection de Trump, on glose à l’envi sur la défense européenne. Fort bien. Les généraux cathodiques calculent les coûts et les délais. Encore mieux.

 

Juste une question : ces obusiers, ces chars, ces navires, ces fusils, on va les construire avec quelle sidérurgie ? Arcelor-Mittal annonce l’arrêt de ses usines européennes en même temps que ThyssenKrupp prévoit un plan d’arrêt de  60% de ses capacités industrielles.  Poutine et Trump se marrent. Pas moi.

 

Voilà 40 ans que la conjuration des imbéciles nous prédit qu’au nom de la concurrence, de l’efficacité et du bonheur des Français, il importe de privatiser la sidérurgie. Avec des apatrides style Ghosn pour expliquer que déplacer Renault aux rives du Danube est un bien pour la France. Et d’angéliques connards qui approuvent au nom de la mondialisation heureuse et de l’anti-nationalisme qui en découle. F-haine était le slogan politique le plus stupide qui soit. La haine existait car le monde entier nous hait et quand quelqu’un te hait, t’as intérêt à t’en débarrasser, pour éviter qu’il te fasse la peau le premier.

 

Si tu veux refaire un mur des cons pour afficher le portrait de tous ceux qui ont voulu mettre la France à genoux, t’as intérêt à refaire le Mur de l’Atlantique en n’oubliant pas Giscard, fossoyeur du Concorde, Chirac qui a vendu Arcelor,  et quelques milliers d’autres moins connus (mais pas moins stipendiés) qui, bout à bout, ont désindustrialisé la France et détruit sa capacité à cracher à la gueule du monde. Je propose un Ordre National de la Soumission dont les membres porteraient  à leur poitrine une étoile d’argent. Ho ! tu déconnes ! Non. J’oublie pas que le papa de Marine a financé les études de ses filles en vendant des disques de chants nazis sous la marque SERP. Tu peux pas défendre la France en faisant la propagande des Boches.

 

On n’oubliera pas René Cassin, rédacteur de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, laquelle prévoit dans son article 2 que la dite Déclaration s’applique sans distinction aucune notamment d’origine nationale.

 

Plus tous les journalistes, notamment économiques, qui nous ont vendu la désindustrialisation au nom du PIB. Ceux là, en première ligne devant les chars russes, armés de baguettes de noisetiers puisque la sidérurgie, c’est caca.

 

Voilà longtemps que j’ai un dogme : si c’est français, c’est mieux. J’évolue : si c’est aquitain, c’est encore mieux.


Tout ça, on en a déjà parlé...

 

samedi 23 novembre 2024

LES SOLDATS ET LES GUERRIERS

 il est pas encore President, Donald, mais il est au boulot. Il s’est collé à l’essentiel : achever l’Europe. Avec l’aide d’une équipe de vieux généraux dévalorisés, tous anciens hierarques de l’OTAN. Ne les écoutez pas, réfléchissez. L’OTAN est une partie de leur carrière…..et de leur retraite. Et, par voie de conséquence, ils sur-valorisent l’OTAN (what else ?) et passent leur temps à nous expliquer que sans l’OTAN et les USA, Poutine va nous manger. Vu leurs carrières, je ne leur fais aucune confiance. Aucune. Qui peut croire la voix de son maître ?

 

Je tiens à rappeler quelques évidences pour qu’on puisse réfléchir tranquillement.

 

L’aéronautique française est la meilleure du monde.

Airbus ( créé par la France) est en train d’enterrer Boeing après avoir achevé McDonell Douglas. Encore le traitre VGE a-t-il tué Concorde qui aurait renforcé notre domination.

Peu à peu, le Rafale se révèle l’un des tout premiers chasseurs du monde. Ben oui, il est à un prix concurrentiel, rapide, efficace, facile à entretenir, malléable, avec une excellente informatique et un armement adapté.

Ajoutons les hélicoptères développés par Airbus et motorisés par SNECMA.

Terminons avec Ariane. L’Europe, grâce à la France, a une compétence spatiale, compétence démontrée par Spot-Images, système  de renseignement supérieur au Landsat américain, doublé par Galileo concurrent du GPS américain.

Pour ce qui est de la mer, Naval Group croule sous les demandes de sous-marins. 

 

Les artilleurs du monde entier veulent les canons français César qui semblaient ridicules au début de la guerre en Ukraine. Et je ne parle pas des blindés, où les Allemands semblent disposer d’un atout maître avec leurs Leopards. Or les Allemands sont des Européens, jusqu’à nouvel ordre. Et nos blindés légers complètent bien la gamme.

 Pour analyser la situation géopolitique, il faut garder ces informations en tête, en les complétant éventuellement avec notre dépendance aux munitions de petit calibre, notre impossibilité à remplacer le Famas, ou plus généralement notre dépendance à la sidérurgie depuis la vente en 2002 d’Arcelor au groupe Mittal par Jacques Chirac, par ailleurs destructeur de la conscription. Pour faire la guerre, il faut maîtriser l’acier.

 

Grosso modo, dans le cadre de l’Ukraine, on peut se passer des USA. Mais est-ce notre intérêt ? La réponse est évidemment NON. L’Ukraine est un grand pays agricole, producteur de céréales et de poulets. Aider l’Ukraine et l’intégrer à l’Europe, c’est achever notre agriculture en difficulté. La notre, mais aussi celle de la Pologne ou de l’Espagne. Notre intérêt, c’est de laisser Poutine détruire l’agriculture ukrainienne en semant partout des mines qui pourriront le sol. Mais c’est pas bien ! Exact, mais ce n’est pas le sujet. Tu veux payer pour aider les céréaliers briards ? Non ? Alors, affame les Ukrainiens. Sauf si ton but, c’est d’aller au Paradis.

 

Mais tu es cynique ! Oui, comme Diogène. C’est le fruit de l’expérience. Je suis également égoiste. Comme Trump. Le mot à la mode (et donc vocabulaire de mononeuronal), c’est « transactionnel ». Trump a une vision transactionnelle du monde. Ben oui. Comme Roosevelt et comme tous les gouvernements américains. Roosevelt a aidé Staline en gageant l’aide sur le stock d’or russe. Les Américains font payer au prix fort leur protection. Si c’est trop cher, ils se barrent, comme au Viêt Nam.  Les USA saignent leurs alliés avec une fourberie sans limites. Nous, c’était le Plan Marshall. On t’aide à acheter du matériel américain, manière délicate de vider d’une main, la poche qu’on a garnie de l’autre. C’est pour ça qu’ils ne nous aiment pas : on est des concurrents commerciaux.

 

Et donc Trump il faut le frapper au portefeuille. Par exemple, créer une communauté de défense dont les membres s’interdiront l’achat d’armes américaines. Les USA craignent cette éventualité : ils interdisent la commercialisation d’armes abritant des composants américains. On n’a jamais vu ça. Les composants ont été achetés, payés et on ne peut pas les utiliser. Il s’agit des missiles Scalp vainqueurs d’un appel d’offres britannique contre la firme américaine McDonnell. Je vais me démerder pour éliminer un concurrent supérieur à mes produits. Le Vieux Général n’aurait pas toléré cette atteinte à notre souveraineté qui prouve simplement que les Ricains balisent devant la technologie européenne.

 

L’Europe des armées est infaisable. Les Américains se sont emparés des cerveaux et y ont instillés l’arme fatale : la peur. Avec l’aide des vieux généraux de l’OTAN et de journalistes stipendiés, soutenus par des politicards de seconde zone.

 

Parmi ceux qui m’ont appris la géopolitique qui est une branche de la polémologie, il y a eu un général  de division avec l’expérience de la guerre, la vraie, celle qui tue et ravage qu’il avait connue avec Leclerc et Eisenhower. Beaucoup surnage de ses récits et de ses réflexions mais en premier lieu cette phrase : « Les Américains ont beaucoup de soldats et peu de guerriers ». Tout est dit.

dimanche 17 novembre 2024

POUR L'HONNEUR

 Ben voilà ! TF1 veut mettre la main sur le rugby. C’est lié aux audiences. Chaque match international explose les compteurs. On va avoir droit à des tombereaux d’explications pseudo-socio-psycho-logiques. Explications concoctées par les intellectuels qui ne sont jamais entrés en mêlée. Avec la trouille au ventre.

 Ma première réaction a été d’y voir une victoire de la ruralité d’autant que pour la première du film Pour l’honneur, j’étais à Meymac. Ben oui, l’une des équipes venait de la vallée de la Vézère, l’autre représentait un bourg nommé Tourtour qui est le nom des crèpes au sarrazin de Corrèze. Les journaleux nous ont rebattu les oreilles avec la culture de la France méridionale car ils ignoraient tout des tourtours au ris de veau de chez Françoise. A Meymac. En plein Limousin.

J’ai aimé le film. Pas pour la Corrèze. Pour l’honneur. L’expression a bercé ma jeunesse. Au lycée, nos entraineurs le serinaient : Battez vous pour l’honneur. Ça voulait dire qu’on pouvait être fiers de prendre une branlée. Après la projection, on est allé boire une Salers chez Arlette, siège du rugby-club de Meymac. On était bien dans le Sud, le sud rural et rugbystique, inconnu de l’ENA.

 

C’est un signe. Un signe qui vient doubler la victoire de Trump, la colère paysanne et le retour en force des gilets jaunes.  Les audiences télé signent la fin de la déconstruction. Les ruraux savent que tu peux déconstruire un outil, mais pas trop, sinon la déconstruction devient destruction. TF1 vient de le découvrir.

 

Ce soir, je pense à Maité et à Laurent Mariotte. Maité, elle faisait la cuisine pour des tablées de rugbymen, Laurent Mariotte, pour…..…je sais pas. Enfin, si, je sais, mais je veux pas être considéré comme un –phobe. 

 

Le peuple (français, les autres je sais pas) n’est pas con. Il préfère les salles des fêtes aux maisons de la culture. Tout simplement parce qu’il sent que la culture qu’on lui offre est une culture au rabais : je me souviens d’un programmateur officiel auquel je reprochais d’avoir produit un Opéra de quat’sous sans le texte de Brecht et qui me répliquat : Tout. le monde connait la musique, mais le texte est chiant.

 

Doublons le signe. Philippe Guillard a fait plusieurs films Pour l’honneur est le dernier, j’ai trouvé facilement les critiques, une seule est très négative : Télérama. Ça m’étonne pas : j’ai aimé beaucoup de films que Télérama n’aimait pas.

 

Ma première réaction était la bonne.

samedi 9 novembre 2024

LE PEUPLE DERRIERE SON CHEF

 L’élection de Trump nous éclaire. Non pas sur les Américains, mais sur les commentateurs, journalistes et politiques et sur leurs séides

 

Election après élection, on nous informe que les sondeurs se sont trompés. Au point que ce n’est plus une information, mais une banalité. Les sondeurs ne peuvent que se tromper : ils analysent des quantités pour prévoir des qualités. Je me demande où est l’intérêt des journalistes à payer pour de l’information fausse et/ou faussée et à m’imposer les mêmes vieillards incompétents scrutin après scrutin.

 

Pas besoin de chiffres pour prévoir la défaite de Kamala, semblable à celle de Ségolène il n’y a pas si longtemps :  quand on a besoin d’un chef, on ne vote pas pour une femme. La guerre est affaire d’hommes, d’hommes violents et mal élevés, capables d’appuyer sur le bouton et de sacrifier quelques milliers ou millions d’êtres humains au désir de victoire. Les officiers supérieurs sont ainsi en étant également présentables parce qu’ils sont froids et connaissent le prix de la vie : les hommes formés coûtent cher et les régiments ne sont pas égaux entre eux.

 

Trump est vulgaire. Etymologiquement, ça veut dire qu’il est proche du peuple (vulgus) ce qui devrait plaire aux commentateurs. Sauf qu’ils ne savent rien du peuple qu’ils imaginent à travers les enquêtes des sondeurs et ils sont incapables de subtilité discursive. Quand Trump dit que Kamala a un QI faible, le peuple traduit : c’est une conne. Le peuple a besoin d’un vocabulaire simple, ça le change de la discursivité pseudo-universitaire dont on l’accable. Un pays n’est pas « doté », il a la bombe. Trump n’est pas un « mâle alpha », il a des couilles et peut utiliser la bombe. Pour les commentateurs (et trices), Trump est imprévisible Le peuple traduit : il peut en coller une à Poutine. Doit-on détruire le peuple ? Ou lui parler ? Avec ses mots bien entendu.

 

Ce que révèlent ces élections, c’est le fossé entre le peuple et la presse. Le peuple ne comprend plus les journalistes qui ne savent plus lui parler. La presse parle baise-main, le peuple parle main au panier. La guerre renforce ce fossé car les armées fonctionnent avec l’esprit de chambrée qui exprime un rite de passage réunissant les jeunes hommes d’une même classe d’âge. Or, réunissez cinquante jeunes en passe d’être adultes, de quoi parleront-ils ? De copulation, avec le sexe complémentaire généralement. L’esprit de chambrée sent la petite culotte. C’est vulgaire, pas distingué…. Comme Choron. A l’heure où on se veut être Charlie pour être fréquentable, je rappelle que Choron a créé Charlie ; Ancien militaire, il connaissait l’esprit de chambrée et il connaissait le peuple. Comme Trump. Et il a créé un mythe. Ce que ne feront jamais les minets aux mocassins à pompons qui n’osent pas dire qu’ils aiment mettre la main  au cul des femelles.

 

On tourne toujours autour du même pot. Le peuple veut être protégé, c’est ce qu’il attend d’un chef  et ça passe par la force et la violence, pas par la tendresse et la compassion. Mais ça conduit à la dictature !! Pas nécessairement, mais ça peut y ressembler. Henri IV a protégé son peuple  sans être un dictateur, en utilisant son pénis plutôt que son épée. Car le peuple aime les baiseurs, il se reconnait en eux. Ou s’identifie.


On n'apprend pas le peuple rue Saint-Guillaume ou on ne trouve ni pastis, ni gas-oil, ni jurons populaires. Quand les rédactions parleront comme les ronds points, l'information reviendra.

 

Face à cet électorat, je ne comprends pas qu’aucune chaîne n’ait programmé Deliverance

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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mercredi 16 octobre 2024

LA LAÏCITÉ

 J’en ai plein le cul de ces discussions sur la laïcité. Ça fait 120 ans que la laïcité est une des bases de la République et que je pense aussi souvent à mon oncle Adrien, républicain de gauche et maire de son village pendant 40 ans. Quarante ans pendant lesquels, il n’a pas mis une fois les pieds dans l’église. Il savait l’importance de certaines cérémonies, surtout les enterrements, pour la cohésion du groupe. Il exigeait que la porte de l’église soit ouverte et assistait à la célébration de l’extérieur, même sous une pluie battante. Il était avec ses concitoyens, mais pas avec Dieu.

 

Pour Tonton Adrien, la laïcité, c’était pas un jeu. Il s’était battu pour ça. Avant 1905, il participait aux actions d’un groupe qui s’attaquait aux bâtiments de la Calotte, essentiellement les maisons de bonnes sœurs où se fabriquaient les hosties dominicales. « Attaquer », c’est pas de la littérature parce que les Calotins se défendaient et les expéditions laïques laissaient plaies et bosses aux combattants. Tonton Adrien savait qu’un croyant est un danger. Physique. Il me l’a raconté, avant que les mahométans ne remplacent les calotins. Tonton Adrien, fallait pas lui insinuer que ne pas croire est une croyance. Pour lui et ses amis, le problème était Dieu, ce Dieu auquel l’Homme abandonnait son libre-arbitre. Un croyant est un esclave, on ne peut pas laisser un esclave diriger la République.

 

Bon, le Président De Gaulle était croyant mais lui, était un être à part et surtout pas un esclave.

 

je l’ai dit, Tonton Adrien était maire. De ce fait, il entretenait l’église mais aussi les calvaires : ils sont à tous et je suis le maire de tous. J’avais 10-12 ans et j’apprenais l’inexistence de Dieu, la tolérance et la République des champs. Pour être tout à fait franc, Tonton Adrien  avait un chef d’Etat-Major, l’instituteur du village, par ailleurs secrétaire de mairie, quasi-caricature de Pagnol père, hussard noir de la République quasi-parfait. Ce duo était complété par le médecin du village lequel visitait régulièrement les fermes isolées. Tonton Adrien savait tout de son village, jour après jour. Comme tous les maires de la région.

 

Et donc, au nom de la laïcité, rien n’était imposé ni même favorisé. Tonton Adrien connaissait les calotins du village qu’il ne traitait pas comme des ennemis. Lui avait gagné, excluant Dieu du village comme il l’avait exclu de sa vie. Inutile de rejouer ce combat au quotidien. Sauf le mercredi soir. C’était l’heure de la partie de manille coinchée entre l’équipe du maire assisté de son secrétaire de mairie contre le curé et son bedeau, le village rejouait 1905. L’équipe perdante payait les consos (le stade était le bar du village).

 

La laïcité avait entraîné la disparition de Dieu, du Dieu qui dominait la France depuis vingt siècles. Les soutanes et les cornettes disparaissaient du paysage et plus personne ne croassait au passage des grenouilles de bénitier. A sa mort, Tonton Adrien avait gagné le combat de sa vie. Personne ne lui avait dit que le ventre était toujours fécond.

jeudi 10 octobre 2024

LA MORT DES LIBRAIRES

 Nous y sommes ! Il aura fallu quarante ans mais la  première étape se termine. La grande presse découvre que la librairie se meurt sans pour autant nommer l’assassin : Jack Lang et la loi de 1981 nommée en son honneur. Je l’avais dit et redit depuis 40 ans, la moindre des injures reçues était « élitiste » : je m’opposais à une démocratisation offerte par Lang à un peuple avide de culture.

 

Première étape : la confusion des genres

 

C’est la force de la réification. Le livre est un bien culturel. Mais comment mesure t’on la culture ? Il n’existe aucun étalon-culture avec une échelle comme celle de Scoffield qui mesure la force des piments. il suffit de décréter que le livre est un « bien culturel » et de faire entrer tous les livres dans la case statistique ad hoc. Case statistique qui devient mesurable par sa valeur i.e.. son prix. Bon, c’est pas très culturel mais ça permet de coller André Soubiran avec André Gide ou Annie Ernaux avec Christine de Pisan. Sans stigmatiser les acheteurs. Les pauvres achetaient des Harlequin, les moins pauvres des Pléïade, mais les deux valorisaient la Culture que Jack Lang démocratisait en parfait socialiste. Enfin presque : le Président Mitterrand venait à la librairie Javelle acheter une originale de Molière qui valait plusieurs SMIC du temps. A chaque socialiste sa démocratisation.

Lang fit du prix l’alpha et l’oméga de la Culture, aux applaudissements d’une presse stipendiée et de libraires emplissant leurs braies de leur peur de disparaître. Personne ne dit qu’on ne pouvait pas comparer la valeur d’une originale grand papier avec un livre de poche. Il s’agissait de protéger les libraires contre la FNAC qui axait son développement sur ses remises : personne ne dit que les propriétaires de la FNAC avaient participé au financement du candidat Mitterrand ce qui laissait suspecter un ministre du dit Mitterrand de félonie.

A traiter le livre comme le cassoulet en boite on s’exposait à voir les marchands de cassoulet devenir libraires. Ça ne tardât pas.

J’avais suggéré que les biens culturels ne soient pas considérés comme biens de consommation, qu’on sépare les livres et les boites de cassoulet. Elitiste !

 

Seconde étape : la destruction sémantique

 

C’était la plus simple : remplacer les librairies par les « points de vente du livre ». Ça allait dans le droit fil de la pensée économique du socialisme triomphant. On pouvait admettre qu’une librairie était le lieu où on vendait des livres alors que tout libraire sait qu’une librairie est d’abord le lieu où un individu achète des livres. Pour les revendre. Mais pas à n’importe qui.

En ce temps-là on distinguait avec soin « librairies » et « maisons de la presse ». Les deux commerces vendaient des livres. Pas les mêmes livres, mais ne chipotons pas. Les maisons de la presse favorisaient les livres de journalistes, signatures connues, les librairies préféraient les livres d’universitaires. Manque de chance, les points de vente du livre étaient représentés par Monsieur Daelman, maison de la presse à Compiègne qui ne vit aucun obstacle à lever la barrière. Et c’est ainsi que le petit Leclerc, de marchand de laitues devint « acteur culturel ». Ceci permet à Lang, au fil des ans, d’affirmer qu’il a maintenu le réseau des libraires français, tout simplement parce qu’il y a toujours (statistiquement) autant de lieux où on vend des livres. Mais ce ne sont ni les mêmes lieux, ni les mêmes livres. Parce que ce ne sont pas les mêmes libraires.

 

Troisième étape : la destruction économique

 

Au tournant des années 1990, on vit, logiquement, poindre le début de la destruction économique des librairies, conséquence obligée du remplacement de la qualité par la quantité. D’autres commerces furent frappés de même, mais on doit admettre que l’informatisation a accéléré le mouvement.

En 1981, libraire spécialisé, je gérais environ 400 comptes fournisseurs dont plus d’un tiers à l’étranger et en devises variées. Aujourd’hui, on peut créer une librairie avec moins de 20 fournisseurs représentant 80% de l’édition française. HEC a pris le pouvoir.

Avec la loi Lang, des avantages spécifiques ont disparu comme le tarif postal des imprimés (livres, cartes géographiques et partitions de musique) qui permettait de payer moins cher l’envoi d’un livre en France, et beaucoup moins cher à l’étranger. Mécaniquement, le coût d’accès au livre a augmenté chez les libraires, compensation acceptée du prix unique : mon prix de vente est protégé, je peux payer le port. Sauf que la mesure avantage les gros distributeurs, les gros colis bénéficiant d’un tarif au kilo plus avantageux. Logiquement, les petits éditeurs ont cherché des solutions de distribution moins onéreuses et les regroupements ont fleuri. C’était pain bénit pour les libraires qui avaient moins de comptes à gérer. C’était aussi pain bénit pour les grosses structures qui se mettaient en place à l’instar d’Amazon : en toute hypothèse, leur accès au livre coûtait moins cher qu’aux petits indépendants.

Les petites structures éditoriales se sont multipliées aidées par la simplification de la distribution. C’est la grande époque de la croissance de l’office. L’office est le coup de grâce : le distributeur s’engage à livrer les nouveautés au libraire en fonction d’une grille (romans français, essais politiques, poésie moldovalaque…) laquelle autorise le libraire à retourner les invendus pour être crédités. Le libraire se trouve dépossédé du choix de son assortiment mais a droit à l’erreur, oubliant que l’office est encadré par des dates strictes : on doit retourner entre tel et tel jour. Ceci le conduit à être avant tout un magasinier qui passe ses journées à retourner des livres qu’il a receptionnés et mis en vente pour le plaisir de leur faire prendre l’air. Ajoutons que l’office est facturé à la date du jour d’expédition par le diffuseur et crédité à la date de réception du retour : clairement, les libraires assurent la trésorerie du diffuseur.

 

Les petites librairies ont mis, seules, leur tête sur le billot. Elles ont oublié, par facilité, les règles essentielles du commerce :

1/ un bon commerçant a des clients meilleurs que lui. J’ai vendu des livres à Maurice Herzog sans jamais lui donner un conseil, mais en notant avec soin ce qu’il cherchait ce qui m’a permis de découvrir des auteurs, des éditeurs, des lieux. Le vrai client ne demande pas un conseil, il demande un titre.

2/ un bon commerçant ne regarde jamais ses statistiques de vente. Il a choisi ses produits et il sait pourquoi. Le jour où un client trouve ce produit et l’achète, il a gagné plus que sa marge : il a gagné la fidélité d’un client.

3/ un bon commerçant ne dit jamais « Ça n’existe pas ». Parce qu’il n’en sait rien. Dire « Je ne connais pas » ne flatte pas l’ego mais n’injurie pas l’avenir.

vendredi 4 octobre 2024

POINT GEOPOLITIQUE

 Parlons un peu de géopolitique. Parlons du Kim de Corée du nord, l’homme qui a détruit mon ressenti de Kim qui, jusqu’à lui, se limitait à Kim Novak. Kim-Jong-Truc, c’est une vedette. Les télés du monde entier nous le montrent jusqu’à la nausée, plus (hélas) que Kim Novak.

Rappelons quelques évidences jamais énoncées. La Corée du nord n’est pas membre de l’OCS. Elle n’est donc alliée ni à la Chine, ni à la Russie, ni à l’Iran. Pays isolé qui manque d’atouts dans sa main. Il fera ce que voudra Xi Jiping, point barre, question de survie. Remettez nous Kim Novak.

Lisez Kipling. Pas Mowgli et autres disniaiseries. Les textes sur le Grand Jeu. L’avenir du monde se joue en Asie centrale. Autour de l’Iran. Le Grand Jeu se jouait entre l’Empire russe et la puissance anglo-saxonne dominante. Comme aujourd’hui, avec l’appui (ou pas) de pays plus modestes (L’Homme qui voulut être roi), pays désormais fédérés dans l’OCS. Il s’agissait de contrôler la Chine, c’est-à-dire le Pacifique occidental. L’OCS a rendu ce but caduque. Un ersatz de stratégie consistait à contrôler l’Océan indien oriental. Avec l’entrée de l’Inde, du Pakistan et de l’Iran dans l’OCS, la Stratégie globale s’est effondrée, la domination anglo-saxonne sur les océans est partie en fumée. La Chine, grâce aux Nouvelles Routes de la Soie, a un coup d’avance.


La partie n’est pas finie. Aujourd’hui, l’arbitre est absent pour causes d’élections ce qui tempère les Chinois qui ne savent pas jouer seuls. J’ai le sentiment qu’Israël va dérouiller et pas seulement à cause de l’alliance Chine-Iran. Dans une stratégie globale, Israël n’a aucun intérêt, ce pays ne contrôle rien, ni axe de communications, ni ports, ni matières premières. Raisons pour lesquelles l’Europe l’a créé. Ses alliés sont rares surtout dans ce qu’on appelle le Sud global. Armée et économie sont sous perfusion américaine ce qui fait que les USA ont intérêt à sa survie et les USA sont des alliés peu fiables.


J’attends avec intérêt le retour de la francophonie que les Chinois vont soutenir car c’est une arme d’affaiblissement des USA. J’attends aussi une prochaine attaque écolo contre le pétrole de schiste, attaque qui viendra de Chine et d’Iran. J’ai passé l’Ukraine par pertes et profits comme l’Allemagne.Les Chinois sont rancuniers et connaissent l’Histoire : ils savent que le « péril jaune » est une invention prussienne et ils n’ont pas oublié le soutien allemand aux Tibétains. J’en ai déjà parlé, Hitler aimait le Dalaï-Lama, comme Robert Ménard. Pendant qu’Hitler envoyait ses alpinistes dans l’Himalaya, Malraux soutenait la révolution chinoise provoquée par le PCC fondé dans la concession française de Shanghaï.


En géopolitique, Israël n’a aucun intérêt, sauf pour la diaspora juive qu’il ne faut pas surestimer.