mardi 24 décembre 2019

LE VIEILLARD QUI MEURT

On disait ça au siècle dernier : un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle. Et tout le monde chouinait sur tout ce savoir qui disparaissait. Surtout dans les pays émergents. Forcément.

Dans le même temps, des tas de professionnels sciencepotards s’acharnaient à détruire des savoirs pour une seule raison : le salarié qui sait pèse plus lourd sur le bilan que l’ignorant. Le savoir détruit les bénéfices.

Comme la présence. Et donc la nouvelle doxa, c’est la mobilité. Un bon salarié est un salarié qui bouge. En ce moment, on n’entend que ça : l’horreur du salarié qui ne change pas de boite. Ce n’est pas  verbalisé ainsi. On nous explique que la carrière linéaire, c’est fini. La norme, c’est de changer de boite, voire de profession. Que le salarié ait créé des relations de confiance, voire d’amitié, avec clients et fournisseurs, est dangereux. Plus il sait, plus son départ est handicapant. On ne va pas virer un mec qui peut passer à la concurrence avec son réseau. Sauf a contrôler le réseau. Ce qui est possible dans un fonctionnement de classe. Remplacer un HEC par un autre HEC. Les petites mains circulent, perdent les avantages liés à l’ancienneté, sont enfermées dans des procédures qui dévalorisent leur savoir et leur expérience. Tout va pour le mieux dans un monde sans histoire.

La dévalorisation du travailleur atteint son apogée. On en a déjà parlé avec les garçons de café. Ce n’était qu’un début. Diplômes professionnels au rabais type « force de vente », non prise en compte des acquits de l’expérience, on fait semblant mais ça ne compte pas où ça compte : sur la fiche de paie ou sur le récapitulatif de carrière. Valoriser le travailleur pour valoriser les gains de l’actionnaire.

Voilà quelques décennies que la machine est en route. Quelques années que l’actionnaire n’est pas défini pour ce qu’il est : un rentier parasite détruisant la société qui l’héberge.

Reste la seule question qui vaille dans le parasitisme : est ce une symbiose ?

Le parasite vit bien. Mais il court toujours le risque de tuer son hôte ce qui entraine sa disparition.

Nous n’en sommes pas loin. Le capitalisme financier risque de s’apercevoir que ce qu’il prend pour un coût est indispensable à sa survie. C’est une vraie question que pose la réforme des retraites. L’idéal serait de jeter les retraités à la benne pour se débarrasser du coût humain. C’est le but final. On commence à s’en apercevoir.

Un pommier sans gui peut vivre. Le gui ne peut pas vivre sans pommier.


NOEL SUR LE GLOBE

C’est Noel. Je viens de commander le cadeau d’un petit garçon. Sur Internet. Un globe terrestre que je n’ai pas trouvé dans le commerce local. Raison pour laquelle je souhaite que tous ces commerçants crèvent !

Je voulais un globe terrestre. En verre. Ha non ! Trop fragile. Trop cher. Surtout trop cher. J’ai parlé avec les pseudo-vendeurs et les simili-commerçants. Pas un n’a validé mes arguments. C’est trop cher. Prenez en un en plastique. Salopards ! J’ai vendu des globes terrestres pendant plus de vingt ans. Ma plus belle vente ? Un globe américain en verre, sur support, pour VGE qui voulait dans son bureau le meme globe qu’à la Maison Blanche.

J’explique. Un globe en plastique est imprimé lors de sa création, quand on le forme. La technologie utilisée limite la finesse de la lettre car, dans le même temps, le plastique est chauffé, moulé et imprimé. Pour gérer la lettre, on ne peut descendre dans les corps inférieurs, en gros sous le corps 8 car on ne peut gérer les déformations. La cartographie devient grossière voire imprécise. Pour Paris, ça passe. Pour Aurillac, ça passe moins.

Là, on est dans le bas de gamme. Pas cher. Pas beau. Pas précis.

On n’imprime pas le verre. On imprime des fuseaux de papier qui sont ensuite contrecollés à la main sur la boule de verre. En imprimant du papier, on revient à l’imprimerie et on peut descendre dans les corps 5 ou 6 que le papier supporte. La cartographie revient à la précision et à l’esthétique. A la qualité.

Bien entendu, ça suppose des ouvrières compétentes et expérimentées : les fuseaux (plats) sont travaillés au doigt pour s’adapter à la boule (sphérique). Le premier fuseau, c’est simple. Le douzième, c’est une autre histoire.

D’où la différence de prix. D’où la différence de produit. Car si l’étiquette « globe terrestre » est la même, ce n’est pas le même produit. C’est une évidence.

Inutile d’indiquer qu’aucun des commerçants avec lesquels j’ai parlé ne savait ce que je viens d’expliquer. Aucun. Tout en se prétendant compétents, voire spécialistes. Un gros paquet de jean-foutres. Amazon les bouffe tout simplement parce qu’ils n’offrent rien de plus qu’Amazon.

Je suis donc allé sur le site du fabricant allemand pour commander mon globe.Oui. Il n’y a plus de fabricants français depuis la disparition de Périna qui faisait suite aux disparitions de Girard et Barrère et Taride. Sous la pression notamment de la concurrence italienne des globes en plastique Rico. Non, ce n’est pas mon expérience qui m’informe. Je n’étais pas encore libraire quand ceux là ont été portés en terre. Mais je vendais des globes. Donc, j’allais chez les antiquaires spécialisés, je comparais, je regardais. Je bossais. Et c’était un plaisir. Combien de ces pseudo-spécialistes font la même chose ?

Raison pour laquelle je ne participerai jamais à la moindre campagne contre Bolloré. Quelles que soient ces forfaitures, Bolloré reste le dernier fabricant français de papier bible, le papier des Pléïades. A ce titre, il a droit à mon respect. Vincent Bolloré est inscrit dans l’histoire du beau livre en France. Comme l’Imprimerie Nationale. Comme Didot. Comme Oberthur. Etre libraire, c’est le savoir.


Et ne pas acheter des globes en plastique chinois chez Cultura..Ou ailleurs….

dimanche 22 décembre 2019

LE ROI DES CONS

Ha Brassens ! C’est pas tous les jours qu’on….. Mais oui, Georges. Tout simplement parce que les candidats au titre sont nombreux.

Ce matin, j’en ai découvert un : Jérôme Dubus, porte parole de la REM.

Bien. Voilà une assertion qui vaut pénalisation. Mon conseil favori s’en occupera.

Dimanche matin, fin de tempête. Je zappe de chaine en chaine. Et je tombe sur le dit Dubus. Vu son étiquette, on peut l’appeler Dubus-Macron, ça fera sourire. Et que dit le Dubus sus nommé ?

« Il faut respecter un principe de droit qui est la continuité du service public »

Moi, je viens de zapper et j’en avais marre des reportages identiques sur les équipes d’EDF qui réparent des lignes effondrées par la tempête. Un dimanche matin. Aujourd’hui, en France, des milliers de fonctionnaires bossent pour que des citoyens aient de l’électricité afin de pouvoir écouter le Dubus-Macron éructer des sottises sur leurs carrières et leurs régimes spéciaux. Ces milliers de mecs, ils bossent pour assurer la continuité du service public. Le suricate télévisuel s’abrite derrière un principe pour faire de la com’ quand des mecs bossent pour garantir ce principe qu’il utilise pour leur cracher à la gueule.

C’est pas tous les jours qu’on……

Je sais. C’est seulement un plateau télé. Le lieu habituel de la connerie assertive que favorise le journaliste qui mène le débat. Sérieusement, comme moi, le pseudo-journaliste sait qu’en ce dimanche matin de décembre, le service public est assuré : les gendarmes sécurisent les routes, les hôpitaux soignent les blessés que les pompiers amènent, les mecs d’EDF réparent les lignes, les équipes des directions départementales ont sorti les bulldozers pour dégager les chaussées. Que le responsable du débat n’ait pas interrompu sévèrement le Dubus en dit long sur la complicité entre les médias et le pouvoir.

Dubus est une synthèse. Comme ses supérieurs le savent incapable de réfléchir, ils lui fournissent des éléments de langage. Sauf que ce matin la réalité  dresse devant les éléments de langage le mur glacé du réel. Le service public fonctionne et les conditions du fonctionnement justifient d’un régime spécial pour des ouvriers obligés de travailler un dimanche d’hiver.

Tout ceci, les Français le savent. Tous ceux qui ne sont pas Franciliens et pour lesquels la RATP n’est pas essentielle. Ce que n’est pas Dubus. Sciencepotard (ça, c’est pour le cadre de pensée) élu du 17ème arrondissement, girouette folle passant de Fillon à Macron, il ne sait rien de la France, ce pays qu’il veut gouverner en ignorant les Français.

On n’en reparlera pas….






jeudi 12 décembre 2019

LE BOTTIER ET LES ESCROCS

J’avais un copain…. Bottier, il était, à l’ombre de la Cathédrale.

J’avais des chaussures que j’aimais bien. Mais un peu fendillées.

En toute logique, j’apporte les chaussures au bottier. Qui jette un coup d’œil rapide et énonce son diagnostic. « Foutues. Irréparables. C’est du poulain. »

Wow….Je monte dans les tours….Je râle, j’éructe, je vocifère. Le bottier me sert un café. C’est un bottier qui sait vivre.

« Tu t’es pas fait baiser. Tu as acheté des chaussures en cuir. En cuir de poulain. Et tu fais pas la différence. T’étais chez un chausseur de merde. Il aurait pu te dire que le poulain…. » Trois cafés plus tard, j’y étais encore, à prendre un cours sur le cochon dont le cuir…., les ovins qui….., le boeuf bof…..

« T’en trouveras que chez les Chinois ; mais le chien, c’est bien ». Ça je savais, à cause des pelotes. Parce que la godasse, faut pas croire, c’est idéologique et même religieux. Pas de hallouf dans les usines maghrébines. Bon, y’a des trucs que je connaissais grâce aux reliures….le vélin bien lisse, bien présentable, le maroquin qui supporte la teinture. Mais, preuve de ma stupidité, je n’avais pas fait le lien avec les chaussures.

Conclusion : cuir c’est con. Faut connaître la bête. On y a bien passé une heure. Sans travaux pratiques.

Mais le bottier, sans le dire, il m’a donné à penser. S’il faut savoir tout ça pour acheter des écrase-merdes, que ne faut il apprendre pour un manteau ou un chapeau ? voire un appareil culinaire ? Jusqu’à un temps pas si lointain, le commerçant informait, mettait en garde, expliquait. Puis est venu le temps des « études commerciales », ce fourre-tout où on t’explique que l’essentiel  n’est pas le produit mais la façon de le vendre et que tu peux passer du café au foie gras, vu que c’est pareil. Aujourd’hui, on dit « force de vente », et c’est encore pareil. J’y pensais en regardant des offres d’emploi pour vendeurs où on ne dit pas quel est le produit. On demande du sourire, de l’empathie, de la disponibilité…. On n’a pas fini de se chausser avec du poulain, tu peux me croire.

Mais le pire n’est pas là. La théorie du ruissellement fonctionne aussi avec le manque de savoir. On appelle ça la formation professionnelle.. Tu prends un paquet de cancres impliqués dans une profession dont ils ignorent tout…Ou un paquet de cancres désireux de faire carrière dans une profession pour des raisons irraisonnées… Tu les colles dans un institut privé, largement financé par des crédits gouvernementaux. Tu leur expliques qu’en trois semaines ils vont rattraper trois ans de non-travail. Et tout le monde y croit. J’ai eu à participer à des jurys pour de telles formations afin de valider l’effort exceptionnel des formateurs. Candidats pathétiques, enseignants paniqués. « Vos questions sont à un niveau trop élevé. Revenez au réel. » Trop élevé ? Tu parles…. Je demande à un candidat BTS Tourisme de me donner les dates de la mousson en Asie du sud. Ne pas envoyer des pax sous la mousson, c’est bien le minimum….. Mais non, c’est trop élevé…

Mais pour ce niveau, l’Etat paye….De plus en plus…. J’ai entendu un ministricule débile s’en féliciter…. Alors que la formation professionnelle des adultes n’est rien d’autre que l’aveu que la formation des gosses a été un échec. Alors, on te sort une bouillie psycho-machin pour t’expliquer que c’était pas le moment, que le gonze ou la gonzesse a évolué, qu’il a trouvé sa voie et blabli et blablo. Mais dix ans après sa calamiteuse scolarité, ses neurones n’ont pas poussé sous la douche, son QI est le même et sa paresse naturelle n’a pas disparu.

La formation professionnelle est une gigantesque escroquerie. J’ai connu quelques boites exceptionnelles, émargeant aux budgets sociaux qui faisaient vivre des enseignants incapables d’enseigner confrontés à des élèves incapables d’apprendre.


On en reparlera….

mardi 10 décembre 2019

RIEN NE CHANGE

Réaction à mon dernier billet. La voiture de demain sera chinoise. Impossible me dit-on. Elle sera autonome et les USA ont une énorme avance.

Hé, les copains, apprenez à jouer au go !!

Premier point ; rien ne filtre des labos chinois. On ne sait pas s’ils sont en avance ou en retard. Ce qui n’a d’ailleurs aucune importance. La voiture autonome existera avec la 5G. Or, précisément, sur la 5G, ils sont en avance. Sur le site du nouvel aéroport de Pékin, 6 millions de mètres carrés ont équipés en 5G. On se calme…. Ça fait soixante hectares ; autant dire rien. Un labo grandeur nature. Les derniers téléphones Huawei sont compatibles 5G. Autour de Pékin et Shanghai, plus de 10 000 pylones relais ont été installés. On peut parier que la 5G chinoise sera opérationnelle en 2020.

Corollaire. La voiture autonome étatsunienne devra communiquer avec la 5G chinoise dont elle adoptera les standards…tu parles d’autonomie ! Les financiers américains cherchent fébrilement les start-ups qui boufferont le marché sans voir qu’à ce niveau d’investissement, il n’y en a pas. Les Américains croient aux miracles.

Effet pervers.. Il en ira de même pour les GPS. Les Chinois viennent de compléter leur système de positionnement en lançant les satellites 50 et 51. Et si la 5G chinoise ne permettait que la communication avec ces satellites ? GPS et Galileo morts…. L’autonomie prendrait un vieux coup. Un autre.

Reagan avait lancé la guerre des Etoiles. Titre hollywoodien et réalité discutable. Pékin ne parle pas de guerre et commence la construction de sa station spatiale. Les Chinois ne veulent pas utiliser l’ISS, trop américaine et trop publique. Là haut, ils veulent inviter qui ils veulent. Ils font de même avec les satellites météo. Et ils augmentent leur flotte d’avions de télédétection…. Tout ça est public, mais personne n’en parle. C’est des objets géographiques et technologiques. Chiants à double dose. Tu veux pas que BFM t’emmerde, non ? Et puis, c’est pas neuf. Nous, on a déjà fait. Exact. Et on s’est arrêtés. Quand Spot a doublé la résolution de ses images, je n’ai pas vu un article dans les medias mainstream. Trop technique.

Je vais vous dire.

On n’a pas fini d’en reparler



VENDEZ !!!!

C’est le Parisien, journal sérieux, qui lance l’information : en 2030, un million de voitures à hydrogène rouleront en Chine.

Propagande, disent les gens sérieux. Les gens sérieux ne savent pas analyser les mots. Le haut fonctionnaire qui lance l’information est responsable des changements technologiques et il annonce que tous les crédits de développement de la voiture électrique à batterie sont annulés.

Autant pour moi !! Je savais bien que la Chine ne possédant pas de pétrole avait fait de la suppression de cette dépendance une priorité. J’en avais déduit que le pays s’appuierait sur la technologie classique et sur ses terres rares pour écraser les constructeurs européens. Je fais gaffe, mais j’avais un coup de retard. Les terres rares sont rares. Et elles sont plus utiles dans les industries de défense ou pour développer la 5G.

L’annonce est pour 2030 : dix ans. Pour un début de développement industriel, pas pour des prototypes. Cela signifie que la plupart des problèmes sont réglés et que les usines ne vont pas tarder à sortir de terre. D’ailleurs, les constructeurs sont choisis, notamment ceux des transports en commun dont l’objectif est de mettre en service 20 000 bus en 2020. L’an prochain. Preuve que l’industrialisation est en route.

Le sens est clair ; le pétrole est mort. Alors vendez !!! Si vous avez des actions liées au pétrole, vendez !!! Si vous pensez que la civilisation américaine a de l’avenir, ne vendez pas et ajoutez vos titres dans le tiroir des emprunts russes.

C’est logique ; Hulot, le visionnaire avait prévu un demi milliard d’euros d’investissement « hydrogène » sur cinq ans…. Dans le même temps, la Chine a investi…..dix milliards.

Mais ce n’est pas qu’une question d’argent. Le premier Maglev entre en service ce mois-ci à  Hanzhou. Ça ne vous dit rien ? Le train à lévitation magnétique, l’aérotrain de l’ingénieur Bertin. Conçu en France, développé en France, abandonné en France. Par Giscard, celui qui a également abandonné le Concorde et recueilli Khomeini. L’homme qui a lancé notre pays sur la pente du déclin. Billotte me l’avait dit ; « Giscard, c’est Vichy qui revient », signifiant le même abandon aux intérêts étrangers, la génuflexion devant Washington. Il faudra bien un jour analyser la lâcheté de crâne d’œuf et le lancement de la braderie de la France, braderie dont Macron est le dernier jour. Braderie mise en place par l’ENA, fille dévoyée de la Résistance qui a mis en place les passerelles conduisant du public au privé en affirmant qu’une Nation se gérait comme une épicerie.

C’est vrai pour la com’ et les Chinois ne sont pas avares d’effets d’annonces. Ils annoncent quand ils sont prêts ; nous annonçons quand nous commençons. Le temps de l’annonce n’est pas le même.

Airbus a une co-entreprise en Chine avec le gouvernement chinois. Airbus vient d’annoncer que TOUS les éléments en matériaux composites pour TOUS les Airbus fabriqués dans le monde seraient fabriqués dans l’usine de Harbin, en Chine. En clair, la maîtrise technologique des Chinois est telle qu’elle justifie qu’on fabrique en Chine les pièces assemblées en Europe. Harbin est connue pour son festival annuel de sculpture sur glace… Je suis prêt à parier que la presse parlera plus, cette année encore, de la glace que des composites.

Composites essentiels pour les voitures de demain. Comme la pile à hydrogène. La voiture de demain sera chinoise, n’en doutons pas. Tout le monde aura oublié les rodomontades de Ghosn et on gardera quelques Zoes pour les musées automobiles où elles gésiront près de la Jamais contente.

Quant à l’Allemagne, elle se démerdera mal avec les quelques milliers de migrants accueillis pour produire encore plus de DAS Auto. On peut douter de tout, même de sa Volkswagen.

On en reparlera.


jeudi 5 décembre 2019

RICARD ET CHAMPAGNE

 Voici un an, en pleine « crise des Gilets jaunes », s’est produit le fait le plus important de la dite crise : un groupe de manifestants (picto-charentais si ma mémoire est bonne) a décapité un mannequin représentant Macron.

On ne saurait trouver expression plus forte pour exprimer le « Macron, dégage » des autres manifestants. Il y avait, clairement, meurtre rituel et symbolique. Minoré par tous les commentateurs, ce meurtre est tombé dans les poubelles de l’Histoire. Comme disent les amateurs de banalités : tout ce qui est excessif est insignifiant, alors même que l’excès est porteur de sens, a fortiori s’il a une dimension symbolique.

Les manifestants cephaloresecteurs voulaient dire que « le Président de tous les Français » n’était pas leur Président car il n’agissait pas dans le sens qu’ils désiraient, leur protection et leur défense. Symboliquement, le Président est le père de la Nation. Quand une partie de la famille n’est pas protégée, la famille explose. Et le père n’a plus à être respecté, ni même conservé.

Du moins était ce diffus. Avec la réforme des retraites, nous sommes en plein dedans. Les jeunes sciencepotards ont oublié que le programme du CNR était un programme d’union nationale afin de protéger avant tout les plus faibles. Phrase après phrase, Macron a  exprimé son mépris des faibles quand tout indiquait que le pays attendait le contraire. Si tu ne fais pas ton boulot, le peuple aura ta peau. L’union nationale n’est pas un vain mot. Elle est symbolisée par la Sécu, les retraites, les nationalisations. Tout ce qui empêche les premiers de cordée du banquier Macron d’augmenter leurs profits. Cela, le peuple le sent confusément. En mettant ses actes en concordance avec le ressenti de son peuple, le jeune Emmanuel prend un risque majeur.

Il veut de plus en plus coller à son image. Laquelle est aussi l’image de ses conseillers et de ses ministres. Conseillers et ministres que le peuple ignore tant la distance est grande. De Gaulle avait le bon goût de mélanger les avis et Pasqua comptait autant que Taittinger. De Gaulle savait qu'o ne vend pas le Ricard comme le champagne.

En ce 5 décembre, les ministres semblent tranquilles. Ceux qui tremblent sont les candidats macronistes aux prochaines municipales. Ils voient vaciller le trône. Il est temps de les rassurer.

Manu doit poser un acte fort. Par exemple remettre en question sa légitimité. Un referendum avec une question simple : désirez vous une réforme des retraites ?

Dans tous les cas, son risque est nul. Ou diminué : il vaut mieux être démissionné que décapité. Ne pensez pas que j’exagère… nous sommes en 1788.


On en reparlera….

vendredi 22 novembre 2019

BECASSINE AU PAYS BASQUE

Je sais pas si elle est venue chez nous, mais Julie Andrieu me fait penser au fameux album de Pichon. Où qu’elle aille, elle bade, elle admire, elle ne sait rien mais fait montre d’une belle volonté d’apprendre et de transmettre. Bien entendu, elle n’apprend rien et ne transmet pas grand chose, sauf des images et des discours dignes de Pierre Loti. Elle a remplacé Connaissance du Monde par Connaissance des Marmites. Marmites où on touille les stéréotypes admirables des provinciaux tant authentiques.

Je dis ça parce que je suis furieux d’avoir aimé, comme ça, spontanément, une page Facebook intitulée Gastronomie du Pays basque et initiée par un mec certainement charmant, mais « d’Athis Mons », ce qui peut donner des compétences culinaires, mais une légitimité basque inexistante. Oui, je m’en suis expliqué ailleurs, je n’aime pas trop les allochtones (http://rchabaud.blogspot.fr/2011/07/bayonne-bruxelles-lhasa.html)

Il existe une cuisine basque, celle illustrée par le remarquable livre de Hasier Etxeberria et David de Jorge. C’est la cuisine qu’on mangeait à la maison quand Fernande Arostéguy était aux fourneaux. Pour être franc, Fernande mélangeait ces recettes avec des recettes venues de Françoise Bernard ou de Tante Marie (la cuisine de Tante Marie, Taride éditeur, plus de cinquante éditions en un siècle, ça c’est du bouquin de cuisine).

Il existe une cuisine basque qu’on mange avec bonheur à Ossès ou Azpeitia. Mais je refuse qu’il existe une gastronomie basque. On n’en a pas besoin. Ce mot « gastronomie » suinte le snobisme, les petits maîtres au cul serré de Biarritz, l’appropriation d’un territoire par ceux qui vont le détruire.

Je pèse mes mots. Sur cette page, on trouve des recettes qui pourraient être faites à peu près n’importe où en France. La cuisine basque est une cuisine qui n’utilise que des produits locaux, des légumes qui poussent sur place, des poissons du Golfe, des  viandes de nos campagnes. Des produits locaux, des producteurs locaux, des transformateurs locaux. C’est une cuisine ostraciste qui peut, si nécessaire, chercher ailleurs, mais seulement si nécessaire. Bouffer de l’exogène, c’est pas notre truc et ça ne l’a jamais été, sauf nécessité. La côte de bœuf, par exemple. Le Pays basque ne produit pas trop de bœufs, alors faut importer. De Chalosse, par exemple. Bazas, c'est déjà loin.

C’est une règle assez courante qu’on ne trouve que des produits locaux et à la bonne saison. Tous les grands chefs, d’Etchemaïté à  Parra et de Tellechea à Arambide l’ont respectée. Je les ai tous beaucoup fréquentés mais, par exemple, je n’ai aucun souvenir de les avoir vus travailler l’huître. Il n’y a pas d’huitres au Pays basque et seuls les blaireaux d’ailleurs peuvent penser que mer = huîtres. Bouffer des huitres à Biarritz, c’est aussi con que de manger des harengs à Palerme. Mais Biarritz est l’exception, la ville où on essaye de parquer tous les cons qui croient que Lagerfeld est un grand couturier parce qu’ils l’ont croisé aux Halles.

A coup de communication, d’à-peu-près, de sottises, je vois se dessiner une image pseudo-moderne du Pays basque, je subodore un vol de mon histoire, de mes racines, de ma terre comme l’autre Gargamelle qui m’explique ce qu’est la piperade, à moi qui, pendant des années ait regardé faire Fernande Arostéguy, d’Ossès, qui sait quand même, en tant que cuisinière basquaise ce qu’est une piperade. Il faut dire que Gargamelle sait parler à propos du salmis de palombes « d’escoton de maïs traditionnel », alors que précisément le maïs n’est pas une plante de la cuisine basque. Seuls les pigniers mangent du pain de maïs, les Basques et les Béarnais réservent la chose aux cochons et aux canards.Le grand roux changera peut être les choses...Mais pas en six mois.

Il faut dire qu’Internet permet à tout un chacun d’écrire, de s’exprimer, d’exprimer n’importe quoi avec n’importe quels mots. Le gamin allochtone qui fait la promotion de la cuisine basque parce qu’à Athis-Mons, y’a rien à promouvoir, il m’écrit que « cuisine » et « gastronomie », c’est la même chose. Il ne lui vient pas à l’idée que deux mots différents n’existent que parce que leur contenu sémantique est différent.  Il faut dire que la confusion n’est pas que linguistique ; le héraut d’Euskal Herria habite au nord de l’Adour. Là encore, à-peu-près, glissements, confusions. Mais comment pourrait il savoir que la communication demande plus de précision que la cuisson ?

Tout ceci pour dire que je glisse de plus en plus dans l’identitaire. C’est assez normal, je trouve. Tous ces mecs qui m’envahissent, c’est déjà peu supportable. Je n’ai pas envie de partager mon territoire, je n’ai pas envie que tout un chacun vienne s’installer chez moi. Je n’ai surtout pas envie que mon histoire, ma culture, soient partagées n’importe comment, c’est à dire simplifiées, schématisées, ridiculisées. Qu’on puisse parler du piment d’Espelette sans parler du palmier d’Espelette. Quel rapport ? Comment, tu sais pas ? Tant pis pour toi.


En fait, j’ai pas envie de partager du tout. Je suis né à la bonne époque dans un pays sublime où ma famille vit depuis quelques siècles. J’ai du bol, je l’admets. Toi, t’es né dans une banlieue merdique sous un climat pourri. T’as pas de bol. Et donc, tu veux qu’on partage. Comprends que j’en ai pas envie. Admets que je puisse être égoïste. C’est un droit sacré.

On en reparlera..

mardi 12 novembre 2019

DIEU EN POLITIQUE : DEHORS !

Bien…le  débat sur l’islamophobie a du moins un mérite : c’est de mettre au jour la nullité intellectuelle de nos hommes et femmes politiques qui, à l’habitude, prennent la parole sur un sujet dont ils ignorent tout. Et qui vont chercher leurs arguments  chez des journalistes aussi ignorants qu’eux. Rappelons donc :

1 : que l’islam n’est pas une religion de l’intercession. Chacun s’adresse directement à Dieu qui répond directement.. De ce fait toutes les interprétations se valent. D’ailleurs, le mot « hérétique » n’existe pas en arabe. Quand deux musulmans ne sont pas d’accord sur une interprétation, ils se mettent une peignée, mais toute argumentation théologique est nulle et non avenue. La parole d’un croyant vaut la parole de tout autre croyant.
Grâce à quoi, la création d’un Conseil du Culte Musulman, est une vaste stupidité puisque sa voix ne représente rien. Tout croyant a le droit de s’y opposer. Cette création montre les limites intellectuelles du créateur ; Nicolas Sarkozy n’a rien compris et ferait mieux de la boucler. Idem quand Macron veut confier quelque mission que ce soit à cet inutile organisme.
Ajoutons qu’il en va de même pour le judaïsme et le protestantisme. Seule la religion catholique est structurée pyramidalement avec un chef suprême, le pape dont la parole s’impose à tous.

2 : à cet égard, rappelons que la religion catholique a fait allégeance aux lois de la République qui s’imposent à tous les croyants (Lavigerie, Toast d’Alger, 1890)

3 : pour ce qui concerne la laïcité, rappelons que l’état laïc est simplement l‘état de non clerc et ce depuis, au moins le XIIIème siècle.. La laïcité est un statut social et non religieux. La loi sur la laïcité n’organise pas la conscience, elle organise la société. Son titre est clair ; elle sépare la religion de l’Etat. Vouloir remettre la religion dans le débat au nom de je ne sais quelle volonté culturelle est une aberration.

4 : l’islamophobie n’est pas un racisme mais le rejet d’une religion particulière qui comprend des croyants de toutes les races, comme toutes les religions. Ne pas rouvrir le débat sur la race ; il est désormais bien clos.

5 : l’islam est une religion politique. La plupart des prescriptions de la charia sont des prescriptions d’organisation sociale et non religieuse. Le statut de la femme n’a pas valeur théologique. Pas plus que la viande de cochon

Ces points ont du moins le mérite de simplifier le débat que tout le monde complique pour des raisons idéologiques. Quand tu veux croire que ton opinions est unique, tu es prêt à tout oubliant que les opinions sont comme les trous du cul : chacun en a un. Bon, si on veut les discuter, on est pas arrivés. Pas d’intercesseur, me dit un copain. Et les marabouts ? alors je lui parle de Dermenghem qu’il ne connaît pas. Discuter de Dermenghem sur un plateau télé, même pas en rêve.

Tout ça a déjà été dit. Ici même

Piqûre de rappel


jeudi 31 octobre 2019

CAROLINE ET LES PÈRES

Il y a des marqueurs linguistiques, des gens qui bataillent sur les réseaux sociaux pour imposer leur vision du monde par le vocabulaire. Je rappelle que la langue est une création artificielle (pas naturelle) et que l’art rhétorique consiste essentiellement à faire croire à ce caractère naturel qui n’existe pas.

Caroline Mecary est une de mes préférées. Elle n’a peur de rien. Elle est pourtant avocate et son rôle est d’aider les juges à dire le droit, sauf qu’elle préfère que l’on dise son droit car le droit conventionnel pourrait affaiblir son fonds de commerce qui n’est autre que la PMA. La GPA, on verra plus tard, nous sommes entre femmes. Si je puis dire.

La PMA, c’est vachement bien : une série de techniques destinées à aider les femmes stériles, techniques développées depuis plus de vingt ans. Enlevons l’acronyme pour rappeler que le sens est Procréation Médicalement Assistée. Le « médicalement » est là pour rappeler qu’il s’agit de combattre une pathologie. Tout le combat de Caroline est là. Elle a pourtant le même éditeur que Canguilhem qui passa tant de temps à analyser le couple Normal/Pathologique. Mais Caroline a décidé que le pathologique n’avait aucun intérêt et que le normal pouvait s’y substituer. En d’autres termes et clairement, la médecine est là pour assister les bien-portants. Knock est revenu les amis et Caroline aide Louis Jouvet.

Comme elle sait bien que sa position est indéfendable, elle a bâti un rempart idéologique avec pour moellons de belles pierres empruntées à la psychologie médiatique, comme le « désir d’enfant » lequel provoque de réelles et vérifiables souffrances. Ben oui, la frustration est parfois lourde à porter, même si elle fait partie de la vie : le désir d’enfant est aux femmes adultes ce que le Kinder Bueno refusé est aux petites filles. Tous les psys sérieux vous le diront ; la frustration est généralement un problème social qui a pour contrepartie la résilience.

Elle le sait bien, Caroline, elle est loin d’être idiote. Elle a commencé par labourer son terrain et par expliquer que toute femme avait droit à la grossesse au nom de l’égalité constitutionnelle. Personne n’a fait remarquer que toute femme pouvait exercer ce droit et qu’un homme pouvait (éventuellement) y aider. C’est qu’en fait le normal et le pathologique devaient sortir du jeu linguistique : il suffit de remplacer l’homme par la femme. Parce que, franchement, tout illettré sait que sans taureau la vache ne porte pas de veaux. Parole de paysan, la vache n’a pas de désir de veau.

Si l’on évacue les gamètes, restent les mots. Le couple peut être désigné comme tel mais quid des membres ? Pour la pondeuse, c’est facile : mère bio. Reste l’autre, la mère-père si l’on ose dire. Elle devient la mère sociale, celle dont le statut de parent dépend de la société. Caroline n’utilise que ces deux mots : son but est de faire accepter la mère sociale comme parent à part entière. Alors que stricto sensu, ce n’est pas le cas en droit français qui distingue soigneusement la filiation biologique classique dans le cadre du mariage ou de l’adoption et l’enfant adultérin. En fait, les juristes antiques, ces sots n’avaient pas imaginé qu’un enfant pouvait avoir deux mères. Grâce à Dieu et à Caroline, cette erreur épistémologique va être réparée. La mère sociale est une simple étape car elle suppose que c’est la société qui la gratifie. Encore  un glissement sémantique pour dévaloriser la mère bio et nous y serons.

J’espère qu’elle va y arriver, Caroline. J’ai été emmerdé toute ma vie par une mère inutile et toxique qui proclamait orgueilleusement « Je suis ta mère » au motif qu’elle n’avait pondu. Ce qui était indéniable. Je suis environné de mecs en lutte contre des bonnes femmes qui utilisent les gnards comme une assurance-vie, un moyen de piquer à leur bonhomme le peu qu’elles leur ont laissé. Cassons le lien qui colle le social et le bio sur une seule tête. Mais pas au nom d’arguments de midinettes, de bonheur de l’enfant ou de psychologie à deux balles. Admettons une fois pour toutes que la femelle dolente et protectrice est un danger pour les gosses qu’elle pense faire grandir en les coupant de la frustation.


On risque de voir bouger les lignes….

mercredi 30 octobre 2019

LES TROIS ORDRES

Jadis, aux temps de la géographie classique, la production d’un pays était divisée en trois : le secteur primaire qui regroupait la production de la nourriture (agriculture et activités connexes), le secteur secondaire (en gros l’industrie), le secteur tertiaire (les services, i.e. les domestiques). C’était pas mal, ça renvoyait aux trois ordres médiévaux, aux trois ordres de l’époque classique et même aux trois fonctions de Dumézil. Pour tout dire, un schéma épistémologique d’une quarantaine de siècles qui rendait assez bien compte de l ‘ordre du monde et des sociétés humaines.

Arrivent les années 60 et l’irruption des gestionnaires (les managers pour faire moderne). Aidés par leurs communicants grassement payés, les managers arrivent à faire croire qu’ils sont les plus intelligents alors que, dans les faits, ils sont d’une insondable sottise. Comme ils sont incapables d’analyser une production divisée en trois catégories, ils décident et nous font croire qu’il s’agit d’une seule et même catégorie : produire des lapins c’est comme produire de l’acier. C’est vrai qu’in fine ce sont des chiffres, quantités produites, CA généré. Et donc, il est loisible de considérer les champs des agriculteurs beaucerons comme l’usine Renault de Flins. Puis comme les champs des agriculteurs de Basse-Navarre. De glissement en glissement, d’approximation en approximation, de fausse équivalence en fausse équivalence, on finit par gommer les limites du réel, on finit même par oublier le réel. Les chiffres deviennent le réel.

J’ai un souvenir précis. Il est sérieux, grave même.
«  Ça ne va pas. Vos chiffres sont épouvantables. Vous avez trop de stock. Le double du ratio de la profession. Vous devez solder, déstocker. »
Non. J’ai le stock qu’il faut. Le stock qui me permet de répondre à mes clients. De les satisfaire vu que le commerce, c’est satisfaire ses clients. Quand je manque de Guide du Routard, Hachette me livre en trois jours et donc j’ai trois jours de stock. Quand le manque de cartes de Colombie, l’Institut Géographique Agustin Coddazi me livre en trois mois. Et donc j’ai trois mois de stock. C’est pareil.
Il essuie ses lunettes. C’est mon comptable, mais le meuble importe peu. Tous les ans, on a la même discussion. Il me fait chier.
« Non ce n’est pas pareil ? Moi, j’ai un plan comptable à suivre. »
Ben moi,  j’ai des clients à satisfaire. Ne serait ce que pour payer vos honoraires. Faites comme tous les ans. Démerdez vous. Provisionnez. Je crois qu’il va pleurer.
« Mais je suis au maximum légal. »
J’emmerde le CGI. Mes clients d’abord. Et puis, c’est quoi le ratio de la profession ? La moyenne entre moi et la Maison de la Presse de Salies de Béarn ? Et pourquoi faut il un ratio ? Pour comparer. Mais, je suis incomparable. Comme tous les libraires. Comme mon copain Jean-Marie, au bout de la rue, l’un des libraires favoris de Mitterrand. Il est dans le ratio ? A force de nous vouloir tous pareils, on a fini par disparaître. Amazonés. Comme les épiciers. Y’a que les boulangers qui survivent grâce à la surgélation.
Soyons sérieux. Je parle d’un temps sans informatique. Un temps où tous les commerçants connaissaient leurs clients, où on notait les commandes sur un vieux bout de papier. Un temps où le facteur apportait les colis de livres dans de vieux sacs de toile rapiécée appelés « Colis spécial de librairie » ce qui permettait d’envoyer des bouquins au Pérou moins cher que dans le Var. Cherchez pas, ça n’existe plus. Je vous parle d’un temps ancien mais où les services publics fonctionnaient. Les gestionnaires ont tellement progressé que ce n’est plus possible.
Mais tout va mieux….Car tout a été simplifié. Les brillants gestionnaires ne peuvent briller que si c’est simple. Tiens, la retraite… Il faut simplifier. On a géré pendant quelques décennies 50 systèmes de retraite, sans informatique et sans bases de données. Moi, je pensais naïvement que, grâce aux nouveaux outils, on allait pouvoir affiner les régimes de retraite, avoir deux ou trois régimes SNCF, par exemple. Je pensais naïvement que nos brillants gestionnaires allaient se diriger vers l’idéal : un système de retraite par Français. Tu parles !
L’ENA, à force de simplifier, a pourri ce pays. Les trois ordres ont fini par céder :les salades valent comme les TGV. Il n’y a plus qu’un ordre : l’ordre marchand et nous avons élu le prince du libre-échange. Il va finir par nous achever.

Quand je pense que cet ordre s’appuie sur la pensée d’un de mes compatriotes. Ben oui, Frédéric Bastiat était de Bayonne. Le mec, il a théorisé le libre échange parce qu’il en avait marre de devoir payer l’octroi sur les légumes de son jardin de Saint-Martin-de-Seignanx. Ouais. Un vrai énarque avant l’heure. Tu commences par réfléchir sur les patates, tu finis par ouvrir le rail à la concurrence. Elle est pas belle, la vie ?

samedi 26 octobre 2019

LA DÉPRIME

« Vous avez pu parler ? »

Elle semble inquiète, la psy.

Ben oui. On a parlé. On a échangé des mots Enfin, pas vraiment. Déjà,on n’a pas le même vocabulaire. Et on n’a pas la même utilisation de ce vocabulaire. Pour parler, ça aide pas. Il ne comprend pas mes citations latines. C’est juste un exemple.

La psy lève les yeux au ciel. « Il faut libérer la parole entre vous. »

Libérer la parole !!! La plus belle connerie actuelle. Elle n’a jamais été aussi entravée, la parole. Jamais été aussi corsetée. Moi, la phrase que j’entends sans cesse, c’est : « Ça, tu ne peux pas dire. » Il est clair que la parole libérée n’est pas la mienne.

Je déteste les déprimés. Ils m’imposent leur mal vivre alors que j’ai bien de raisons personnelles d’être mal. Ne pas trop charger la mule. Donc j’élimine les déprimés de mon cercle. Je n’ai aucune raison de me charger de leurs problèmes. Il y a des psys pour ça. Des psys qui me prennent pour un con.

Le gamin, je l’aime bien. Peintre de talent, impliqué dans son art, une vraie recherche, structurée, à l’opposé des milliers de barbouilleurs qui emplissent les galeries. Lundi, on a une vraie soirée de travail d’où sort une feuille de route avec les tâches à faire et leur planning. Nous convenons d’une soirée de travail pour le mardi.

Et là, patatras. ! Rien n’a été fait. Il a passé la journée au lit ; « Je suis déprimé » me dit-il avec une élocution empâtée. J’ai apporté une bouteille de rosé pour la soirée. En mois de vingt minutes, elle est sèche, engloutie à force lampées. Un alcoolisme vulgaire et excessif. Vulgaire, surtout. Le peintre est devenu un ivrogne sans talent. Un minable.

J’en parle à son psy. Lequel affirme que je suis hystérique. En termes clairs, il change la donne en me collant une pathologie qui dévalorise ma parole. Laquelle peut se libérer désormais, elle ne compte plus. Etre pris pour un con.

L’alcoolisme est nié du même mouvement. Il est « dipsophobe ». On revient aux classiques mais clairement dévoyés.. Le grand voyage de Pantagruel dans le Quart Livre commence par la visite de l’île des Dipsodes. Le gamin n’est pas dipsophobe, il est dipsode, il aime picoler. Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. Dipsophobe, c’est exactement le contraire de ce que j’ai vu. Il ne supporte pas de boire : à cette cadence, personne ne supporte, ce n’est pas une pathologie, c’est une norme.

Moi, ce que j’ai vu (mais je suis hystérique, donc ça ne compte pas), c’est un gamin gâté et fainéant, jouant à la déprime pour excuser sa fainéantise. Non, me dit le psy. Son expo approche, il a la trouille. Encore une fois, on délire. Le môme, il a choisi d’être peintre. Il a fait les beaux-arts pour ça. Il peint depuis trente ans. Alors, sa trouille, il a eu trente ans pour la tenir en laisse. Parce qu’exposer, c’est son métier et qu’il a voulu le faire. Personne ne lui a imposé. Il n’empêche qu’il a la trouille. Peut être. Comme un soldat partant en opération, comme un sportif pénétrant dans un stade, comme des milliers de gens ayant à gérer un passage difficile. Sa trouille est une norme, pas une pathologie.

Moi, ce que je constate d’abord, c’est que le psy n’a pas réussi à endiguer et contrôler cette trouille dont la déprime est une conséquence. Ce qui est normal vu que ce n’est pas une maladie. Jadis, on n’avait pas de ces gracieusetés. La règle c’était : Je me fous de ta trouille. T’y vas. J’admets, y’avait des dommages collatéraux. Pour moi, ce fut une fracture du pied, pour un saut qui dépassait mes capacités. Ma fracture s’est réduite. Mon ego aussi. J’ai déplacé mes priorités.

Ces derniers mois, ma fréquentation des psys a largement augmentée. J’ai d’abord constaté que le métier s’était abondamment féminisé. Et que, par voie de conséquence, la parole des femmes y est devenue majoritaire. Partant, leurs obsessions sociales également. Ainsi, de cette sottise majuscule : il exprime une souffrance. L’expression de la souffrance relève de la parole, c’est à dire de l’art du comédien. Tout parlant est un menteur en puissance. Faire confiance à la parole est une erreur épistémologique. Exprimer une souffrance rend importante l’expression, pas la souffrance.

Le déprimé joue sur l’expression. J’en connais plusieurs que je fuis comme la peste. Ceux qui répondent « Mal » quand tu leur demandes comment ça va. Ils t’ont choisi comme réceptacle et leur pseudo déprime va couler dans tes oreilles jusqu’à ce que tu aies réussi à te barrer.  

Moi, hystérique, j’ai une pensée simple. Si tu as du mal à vivre, le fleuve est là pour t’aider à mourir. On peut le dire. Comme on est dans le théâtre, personne ne se foutra à la baille. Personne. Parce que le déprimé, le seul truc qui l’intéresse, c’est ta sollicitude. Il ne veut pas mourir, il veut vivre pour t’emmerder.  Te laisse pas faire. La Sécu paye le psy pour ça. Ce qui te coûte du fric.

Voilà. J’ai libéré ma parole C’est totalement incorrect.  Aux yeux de qui ? Par rapport à quoi ? Toujours pareil. La doxa. L’opinion publique qui guide les psys et les journalistes de Bolloré. Penser comme ça, ce n’est pas penser. Encore faut il être capable de changer., et d’abord en éliminant le conditionnel  de ta réflexion. Et si le déprimé ne jouait pas ? S’il allait vraiment se foutre dans le fleuve ? Mais, mon lapin tu n’y es pour rien. Il a simplement suivi sa pente naturelle Il s’est comporté en individu responsable, pour une fois. Toi, tu lui as rendu sa dignité d’homme responsable. Tu l’as sorti de l’infantilisme. De toutes façons ; il va mourir. Plus tôt, plus tard. ; qu’est ce que ça change ?


Restons de glace.

vendredi 25 octobre 2019

VASELINE EN STOCK

Quand Macron a créé ce qu’on a appelé assez vite « les bus Macron » je me suis précipité : 25 € le voyage  Bayonne-Paris, c’était tentant ? Flixbus (des Boches) tenaient la corde mais il s’agissait d’aller à Paris pas à Bergen-Belsen. Ma copine Colette, elle macronisait à tout crins assurant qu’il y avait un avant et un après Macron. Hé bé  on y est. Ce soir, le billet de bus est à 88 €, plus cher que le TGV.

Avant d’aller plus loin, je précise qu’en vertu de la loi punissant l’injure au chef de l’Etat, chaque fois que je viendrai à injurier le citoyen Macron ce sera ès-qualité de ministre ou de conseiller politique du précédent Président. Pas le Président actuel, dont chacun sait qu’il n‘a rien d’un escroc, que sa parole est juste et qu’il ne pense qu’aux intérêts de la Nation.

La méthode mise en place par cet enfoiré de Ministre était donc simple. Suivez bien.

1/ au nom de la concurrence, on autorise de concurrencer la SNCF. On ne tient pas compte de ce que la SNCF voit ses tarifs plombés par des investissements dont ses concurrents sont déchargés.

2/ une fois la concurrence installée, on supprime la desserte ferroviaire de nuit,
 ce qui laisse le champ libre au non-ferroviaire

3/ et donc, pour aller de nuit de Bayonne à Paris, il n‘y a plus de concurrence vu que tu as mis en situation de monopole le concurrent installé pour détruire le monopole. Astucieux, non ?

En fait, tu n’as installé aucune concurrence, tu as simplement changé le monopole.

Le tout emballé dans un discours qui justifie d’avoir transféré le service public au privé. Le même discours qui peut servir pour tout service public, de l’électricité aux mutuelles.

L’homme politique puissant, par exemple un enfoiré de Ministre des Finances, tient en laisse les deux chiens. Il peut créer la concurrence du service public qu’il contrôle et qu’il affaiblira ensuite à sa guise.

L’homme politique puissant a le moyen d’expliquer que la destruction du public qu’il a pour vocation de protéger est une bénédiction pour la puissance publique. Et ça passe… Avec l’aide des médias qui justifient chaque jour cette destruction. Tant que les journalistes prendront la défense du pouvoir, ils lui seront assimilés.

On appelle ça la politique de la vaseline

On en reparlera…..


lundi 14 octobre 2019

MONTESQUIEU ET LES GILETS JAUNES

Tous les débiles qui font profession de faire semblant de penser affirment haut et fort que le monde change.

A tous ceux là, j’offre une citation de Montesquieu (De l’Esprit des Lois, XIII-1)

Il ne  faut point prendre au peuple sur ses besoins réels pour les besoins de l’Etat imaginaires.
Les besoins imaginaires sont ceux que demandent les passions et les faiblesses de ceux qui gouvernent, le charme d’un projet extraordinaire, l’envie malade d’une vaine gloire et une certaine impuissance d’esprit contre les fantaisies.

Souvent, ceux qui étaient sous le prince à la tête des affaires ont pensé que les besoins de l’Etat étaient les besoins de leurs petites âmes.

Nous sommes en 1748 ! Qui osera dire encore que le monde a changé. Presque trois siècles et on continue de prendre au peuple sur ses besoins réels et ceux qui sont, au plus haut niveau, à la tête des affaires, continuent de penser que les besoins de l’Etat sont ceux de leur petite âme !

Montesquieu décrit et analyse la crise des Gilets jaunes auxquels on prend sur leurs besoins réels pour les besoins de l’Etat imaginaires. Inutile de demander aux commentateurs patentés qui vont noyer le poisson de l’analyse dans un bouillon statistique. Je n’ai entendu personne citer Montesquieu ce qui était nécessaire et suffisant.

J’ai trouvé la citation de Montesquieu en relisant le patron de La Brède trente ans après notre premier contact, mais je suis bien sur qu’en me plongeant dans Montaigne, j’aurais également trouvé.

Je voudrais que nous fassions de La Bruyère un guide ; « Depuis trois mille ans qu’il y a des hommes et qui pensent tout a été dit ». Phrase assassine…

Mais non ! Moi, ma pensée est originale, nouvelle, adaptée au monde actuel..Tu parles ; »Si haut que soit le trône, on n’y est jamais assis que sur son cul ».

Il faut relire Machiavel. On y trouve toutes les recettes que partagent aujourd’hui Matignon et l’Elysée. Nihil novem sub sole.

J’admets. C’est déprimant. Considérer ses pensées magnifiques, scintillantes d’originalité, étincelantes de nouveauté pour s’apercevoir au détour d’une phrase que ça n’a rien de neuf. Oui. Rien que Platon. La caverne, c’est déjà Debord.

Mai le monde change. Non. Le décor change où évoluent des hommes identiques qui pensent que les besoins de l’Etat sont ceux de leur petite âme. En langage de notre siècle, des hommes qui pensent que les caisses de l’Etat sont leur portefeuille.

Seule la forme change. La novlangue, c’est Montesquieu parsemé de vocabulaire anglosaxon. La langue vivante, c’est Céline, Coluche ou Cavanna. L’opposé du Romantisme qui voulait sur de nouveaux pensers faire des vers antiques.

Encore la vieille opposition entre le fond et la forme

On en reparlera….


mercredi 2 octobre 2019

RESPONSABLE

Etymologiquement, c’est celui qui répond, celui qui est garant.

Ceci peut éclairer les interrogations des Rouennais, mais aussi des Français. En ce moment, celui qui répond, c’est le Premier Ministre.

Ceci le rend il responsable ? Peut être. Aux marges. Il se met en avant parce qu’il sait que sa responsabilité est limitée. Il gagne du temps et en fait gagner aux principaux responsables. Car la bouillie médiatique oublie un acteur essentiel : le directeur de l’usine, responsable du site.. Lui, pas un mot, pas une interview. Il se cache, signe cardinal de son angoisse. Mieux encore ; on apprend qu’il a demandé une enquête au motif que l’incendie aurait pu démarrer hors du site. Signe évident de responsabilité… C’est créer une enquête dans l’enquête qui n’a pas commencé.. Brouiller les pistes, ce que font spontanément tous les coupables.

Présumons… Présumons de rien.

1/ voilà des années qu’on nous serine que les cadres sont mieux payés, à raison de leurs responsabilités. Le mec n’étant pas payé au SMIC, son salaire est la preuve évidente de sa responsabilité. Car, vu son poste, la sécurité du site était de son ressort

2/  certes, il y a des contrôles d’Etat. Contrôles supposant une intervention du directeur chargé de les appliquer. L’Etat a la responsabilité de dicter les instructions. Le directeur a la responsabilité de les appliquer. Il est responsable des erreurs et des manques.

3/ on va chercher des lampistes. C’est confortable mais c’est oublier que les lampistes obéissent aux instructions du directeur, aux process qu’il met en place et vérifie. Car le directeur est responsable de TOUT… Via son directeur des RH, il engage même le cariste qui se trompe et engage sa responsabilité. Son équipe dépend de lui, il l’a engagée, il la contrôle dans l’organisation pyramidale que suppose toute entreprise. D’ailleurs (voir point n° 1)il est payé pour ça

4/ sur place, le directeur représente un conseil d’administration à qui il rend compte.
Problème : Lubrizol est une société américaine et poursuivre le conseil d’administration n’est pas possible. Le vrai patron, le financier Warren Buffet, est inaccessible à la justice française. Pas grave : sa responsabilité sera financière.

Bien entendu, il est hors de question que l’Etat paye. Il a fait son boulot de contrôle. L’Etat n’a rien à se reprocher. L’usine existe depuis plus de 60 ans. L’accident arrive à un moment T. Peu importe ce qui s’est passé avant. Le moment du sinistre dépend du directeur actuel. Et il doit en supporter le coût.

La machine à brouiller les cartes est en route…Elle atteindra son point culminant avec l’intervention des avocats qui défendront le directeur ; avec le directeur lui même qui a pris (volé) le salaire de la responsabilité mais refusera de l’endosser. Le Code des Assurances est fait pour aider les cadres, pas les caristes.


Après, on se demande pourquoi il y a des gilets jaunes. On leur refuse le salaire mais on leur laisse la responsabilité.

mardi 1 octobre 2019

CHAMEAUX, PALOMBES, DINOSAURES ET GRETA

Tous les gens un peu cultivés connaissent feu Stephen Jay Gould. Délicieux penseur, grand maître de l’évolution darwinienne, écrivain prodigue qui savait mettre à la portée de tous des idées complexes. Personne ne connaît son copain Nils Elredge.

Gould et Elredge sont les créateurs d’un des concepts les plus intelligents de l’épistémologie contemporaine : l’évolutionnisme ponctué. Kesaco ?

Depuis deux siècles, les paléontologues se battaient comme des chiffonniers sur la manière dont l’évolution fonctionnait. Y’avait deux écoles : les évolutionnistes et les saltationnistes. Ils pouvaient pas se piffer tant leurs idées étaient différentes.

Les évolutionnistes affirmaient que l’évolution allait lentement. Que siècle après siècle, les espèces accumulaient les changements mineurs qui, avec le temps, devenaient changements majeurs. Ils s’appuyaient sur des séries comme celle des nautiles fossiles et quand tu les regardes, les nautiles, tu leur donnes raison.

Les saltationnistes, eux, croyaient dur comme fer que l’évolution procédait par saut. Que les changements arrivaient d’un coup et, plouf ! une nouvelle espèce apparaissait. Leurs exemples venaient plutôt du monde des vertébrés et, quand tu regardais, tu leur donnais raison.

L’évolutionnisme ponctué donne raison à tout le monde. Raison ou tort, selon que t’es optimiste ou pessimiste. Pour Gould et Elredge, l’évolution fonctionne généralement lentement mais il est des époques où ça va très vite. L’évolutionnisme est ponctué de saltationnisme. Quelques millénaires où il ne se passe quasiment rien et, soudain, irruption dans le monde d’une tétrachiée de nouvelles espèces. Bien entendu, ça ne doit rien au hasard. Ces périodes de saltationnisme, ces ponctuations dans l’évolution viennent de changements brutaux (enfin, brutaux, c’est à l’échelle géologique, on cause en siècles quand même) dans l’environnement. Si ton environnement change, t’as intérêt à t’adapter fissa sinon tu disparais.

Là où c’est génial, c’est que ça remet l’environnement au centre de la problématique. Jusqu’à Gould et Elredge, on l’ignorait, on analysait l’évolution comme un en-soi détaché des contingences. Bien sûr, on savait que les continents dérivaient, que dans une région donnée le climat changeait, mais tout ça va pas très vite. Ça faisait les affaires des évolutionnistes.

Sauf que c’est pas vrai. Ça dérive lentement mais il y a un moment où ça touche. Et là, les faunes se mélangent. Les animaux (mais aussi les plantes) passent d’un continent à l ‘autre. Les proies ont de nouveaux prédateurs, les virus et les maladies s’échangent. Y’en a qui renforcent leur immunité, d’autres pas. L’environnement explose. En quelques siècles (c’est pas beaucoup), tout change. Faut s’adapter ou disparaître. Pendant quelques siècles, l’évolutionnisme plan-plan est remplacé par le saltationnisme. C’est l’évolutionnisme ponctué.

C’est génial parce que ça met tout le monde d’accord. On arrête de dépenser son énergie à des querelles sans intérêt. On se concentre sur l’essentiel.

C’est génial parce que ça remet la géographie au premier plan. Ce sont les changements de terrain qui font bouger la vie. Elle bouge pas toute seule dans un environnement indifférent. C’est comme les anciens ports de Crète que les archéologues retrouvent à 50 m d’altitude. Un bon tremblement de terre avec un léger basculement et ton bistro sur le port devient refuge pour randonneurs. Des fois, c’est moins brutal. Tu prends ton eau dans un fleuve qui alluvionne et dont le cours s’éloigne lentement. Année après année, tu vas corriger, allonger tes canaux, modifier tes écluses, mais la pente est de moins en moins favorable. Un jour, t’auras plus accès à l’eau. Gentelle a étudié le phénomène dans Traces d’Eau.

C’est juste la vieille idée du point de rupture. De la dernière paille qui casse le dos du chameau. De la crise. Kruzein, en grec, c’est un moment, le moment culminant d’une maladie. T’en meurs ou t’en sors guéri. Et la critique, normalement, c’est ce qui provoque la crise. Il n’est pas nécessaire qu’il y ait accélération d’un mouvement. Mais il y a un moment où ça pète, où le fil casse. Même en dérivant très très lentement, il y a nécessairement un moment où les continents se touchent. Sauf que moment, c’est pas le bon mot. A l’échelle géologique, un moment ça peut durer des siècles. Et un moment historique comme la Révolution française, ça dure dix ans. Faut faire gaffe aux mots.

L’essentiel, c’est cette idée que les changements du terrain font bouger la vie. Cette idée, elle est diaboliquement absente de nos débats parce que les changements ne sont que peu perceptibles. Les changements climatiques, par exemple. Ça va pas vite à l’échelle humaine. Tu prends un ou deux centimètres de montée des océans par décennie. T’avales un degré moyen tous les demi-siècles. Pour les néo-évolutionnistes, c’est peanuts. Ils croient dur comme fer que ça va lentement et, corrélativement, que ce sera réversible. Par voie de conséquence, ils ne peuvent pas prendre en compte le discours des catastrophistes. Les catastrophistes, les mecs du GIEC par exemple, sont généralement des scientifiques. Ils sont habitués à d’autres échelles temporelles que le grand public ou les politiques. Prends les climatologues. Ils s’appuient sur les travaux de Lorius qui te parle du climat il y a 300 000 ans. Comment tu veux qu’un politique dont l’horizon est limité à l’élection de 2022 comprenne ? Mais les scientifiques, ils savent qu’une paille suffit à briser le dos du chameau. La dernière. Minuscule. Celle qui te fait passer de la lente évolution à la brutale rupture.

Face aux changements du terrain, les clivages deviennent flous.  Les tenants du Progrès (droite et gauche confondues) sont fermement convaincus que la technologie réglera les problèmes. Quand y’aura plus de pétrole, on aura des autos électriques. Les anxieux sont totalement persuadés qu’on n’y arrivera pas. Pourra t-on construire des autos sans du tout de pétrole, c’est à dire sans plastiques ? On a des exemples : pour produire des biocarburants, il faut beaucoup de pétrole ce qui rend l’opération moins rentable qu’on ne l’affirme. On peut se jeter des arguments à la tête pendant des années.

Et puis, les dinosaures n’ont pas disparu. Y’a que les baltringues pour y croire… Les dinosaures ont évolué…. En oiseaux par exemple.. Ben oui, les palombes de Darroze sont des dinosaures qui ont évolué. En général, les extinctions de masse sont suivies de créations de masse… Avec des chameaux qui résistent à la dernière paille.


Faut le dire à Greta