vendredi 29 septembre 2017

L'ESCROC DU JOUR : L'INAO

C'est presque trop beau pour être vrai. Voilà un moment que je voulais vous parler de cette aberration intellectuelle : l'IGP sur les canards gras du Sud-Ouest.

Regardons de près la fiche technique, en commençant par la définition. « Les produits  du canard à foie gras du Sud-ouest sont issus d’un canard de Barbarie mâle. »

He bé ! ça commence bien. Le canard de Barbarie, malgré son nom, est un canard américain portant le nom scientifique de Cairina moschata. Au passage, le figuier de Barbarie est aussi américain puisqu’il désigne l’oponce. Les Européens ont su très tôt que les Américains étaient barbares.

Le canard de Barbarie, par définition, on n’a pu l’avoir qu’après la découverte de l’Amérique. Ça relativise la tradition. Tradition qui s’appuie, selon l’INAO, et dès le Moyen Age, sur la taille des exploitations trop petites pour produire autre chose que de la volaille. Y’avait aussi du cochon mais doit on en tenir compte ? Et les bouseux du Sud-Ouest ne connaissaient que le confit pour préserver la viande. Il me semblait que le Sud-Ouest avait une assez belle tradition saunière et que nos ancêtre fumaient avec quelque succès. D’ailleurs, les jambons (salés) relèvent aussi de l’INAO. Sûrement pas du même département.

Le descabello arrive avec Parmentier qui aurait affirmé que le succès du canard venait du maïs (le blé d’Inde provenant du Mexique). La tradition est donc issue du couplage entre deux produits introduits tardivement. Ça,  c’est la vision de l’INAO. Avec la question qui tue : est ce parce qu’on l’a qu’on l’utilise ? Un élément de réponse : prenez une presse à canard ancienne, du type de celles qu’on utilise pour le canard au sang. Là, on est au XIXème siècle. Essayez de faire entrer un canard américain dedans, c’est impossible. Le cairina, il est obèse comme un adolescent gonflé au MacDonald. Comme j’imagine que les fabricants d’ustensiles de cuisine étaient pas idiots, j’en déduis qu’aux temps bénis d’Escoffier et d’Alexandre Dumas, la canard de Barbarie n’était pas utilisé en cuisine. La tradition se dégonfle. Mais alors, Parmentier ? Le maïs était là. Très tôt. La prise de Mexico, c’est 1519 et dès 1523, le blé d’Inde pose un problème évoqué dans les archives de Bayonne. On peut donc supposer qu’il servait à  engraisser d’autres espèces de canards. Mais sur quelle aire géographique ?

Alors, là, c’est rigolo. D’abord parce que ça commence par des régions qui ne sont pas dans l’intitulé de l‘IGP : Aquitaine, Midi-Pyrénées, Limousin. Et c’est vrai que le Sud-Ouest sans l’Aquitaine, ça fait désordre !! Pour faire bonne mesure on ajoute la Corrèze et plutôt deux fois qu’une, un coup tout le département avec le Limousin, un coup une poignée de cantons avec le Périgord. C’est un mélange à mourir de rire : il y a des départements (le Gers ou les Landes), des régions historiques (Quercy), un grand ensemble (la Gascogne), un peu comme si on ne savait pas où on était. Parce que la Chalosse, c’est en Gascogne, mais aussi dans les Landes. C’est ceinture et bretelles, leur truc. On a le sentiment d’un ensemble bricolé à la demande, style "j'ai quelques clients, là, ajoute moi le canton."

Je résume : le canard gras du Sud-Ouest, c’est un canard américain gavé sur un bon quart de la France.

Dans quel but ? Je livre une phrase d’anthologie tirée du dossier : « L’objectif qualitatif est d’avoir un foie autour de 550 g. » Plus clairement, l’objectif qualitatif est d’atteindre une quantité.

C’est que la tradition bouge. Entre la première IGP et aujourd’hui : « La durée de gavage est diminuée de 12 à 10 jours minimum. Les diverses améliorations scientifiques et techniques en sélection, élevage et gavage le permettent sans remettre en cause le poids du foie. » Priez, braves gens ! On enlève 20% de gavage sans rien changer. Même pas le régime alimentaire ?

Parce que le régime alimentaire, il vaut le coup. Au départ et selon Parmentier, c’est le maïs qui fait le canard. Pas dans le cahier des charges : « L’alimentation des canards en élevage est composée d’au moins 50% de graines de céréales et de graines de légumineuses ». Et ce jusqu’à 42 jours. Ensuite on passe à 70% de graines de céréales avec un minium de 15% de maïs et un maximum de 40% de blé. 15%, c’est pas trop, faut dire. Parmentier, il a pas du tout suivre parce qu’à 15%, l’impact du maïs sur le foie du palmipède, il est pas évident. Pourtant, il grossit. Les magrets atteignent 300g chacun (au minimum) Avec les 550 g du foie,voilà un bestiau qui va flirter avec les 4 kilos, voire plus. Belle bête…

Affinons le résumé : un canard gras du Sud-Ouest, c’est un canard américain qui a laissé le maïs en cours de route.

Avec seulement le choix de l’espèce, cette IGP était une escroquerie. Faire remonter au Moyen Age une tradition et l’appuyer sur une volaille qui ne pouvait pas être connue avant le 16ème siècle, faut avoir peur de rien. Mais allons plus loin. L’insistance mise sur la maïs pose question d’autant que les plus puissants acteurs de la filière sont des producteurs de maïs : Lur Berri possède Labeyrie et Maïsadour Delpeyrat et Comtesse du Barry. Bel exemple d’intégration. Bel exemple surtout de valeur ajoutée : quand il a transité dans le canard, le maïs il a pris de la marge. Ceci étant, point trop n’en faut et d’autres céréales ou légumineuses peuvent aussi apporter de la marge.

Le Cairina, on en a déjà parlé. Il a deux qualités : il grossit vite et plus que le canard européen et il est assez costaud pour supporter le gavage mécanique. Ce qui permet d’avoir des exploitations industrielles avec des bandes de 2 à 3000 canards. Et donc d’avoir un autre avantage: quand un virus se colle sur un saturnin, les copains ne tardent pas à l’héberger aussi. Bon l’IGP limite et encadre les traitements ce qui conduit immanquablement à une canardière shoah. En fait, sont trop nombreux pour être soignés, les volatiles. C’est Sud-Ouest qui le dit en annonçant les millions de morts. C’est là que tu prends conscience de l’escroquerie.. La « filière », c’est des millions de volatiles. La qualité, elle se mesure en centaines de tonnes.

Et donc, l’INAO est un groupement d’escrocs. Parce que l’intitulé exact, c‘est Institut National de l’Origine et de la Qualité. Or la qualité a un antonyme qui est la quantité. Personne ne peut produire beaucoup et bien, sauf à « approximer » comme disent les producteurs. Pour faire beaucoup, il faut faire à peu près. Ce à quoi s’échinent les escrocs de l’INAO dont le job est de fournir en arguments et procédures les industriels de diverses filières. On en a déjà parlé à propos du Jambon de Bayonne. Mais on aurait pu aussi bien regarder le piment d’Espelette dont les jocrisses de l’INAO affirment qu’il est arrivé en Labourd au XVIème siècle. En Labourd !!! Alors que dès le XIIIème siècle, les barons d’Espelette sont ricombres…de Navarre et siègent au Conseil du Roi…de Navarre. Mais, on vous l’a dit, l’INAO est le domicile de l’à peu près et de l’approximation.

Moi, je rêve d’un institut d’ayatollahs chargés de protéger les consommateurs des dérives des industriels. Par exemple, en rendant obligatoire le gavage manuel. Ho ! c’est pas possible. Ben si, traditionnellement, c’est ça, la production de canards gras. Et c’est possible. C’est comme ça que ça marchait quand j’étais petit. Quand le kilo de foie gras coûtait 20% du SMIC. Avant Lur Berri et Maïsadour.

Qui ont tiré les prix vers le bas en même temps que la qualité. Mais, ça ne se vendrait plus !!! Si. Ça se vendrait moins en quantité mais plus cher. Comme le caviar. Et la marge, elle resterait dans les exploitations.  A mon idée, le boulot de l’INAO, ça devrait être un truc comme ça. Facile : si une demande arrive d’un des poids lourds de la filière, refusé. Refusé d’autant plus que les produits se trouvent dans les rayons de la Grande Distribution.

Bon, en attendant, j’ai trouvé un second producteur de kriaxera, à Arraute-Charitte. Minaberrigray, il s’appelle. Ferme Hameka. Génial ! Il a un site ? Non, il est normal. Mais alors ? Pour acheter ? He bé, à Bidache, tu prends la route de Saint-Palais, tu trouveras. Les produits d’exception, ça se mérite.

On en reparlera…




mardi 26 septembre 2017

ACCRO

Sérieusement, les addictologues, je les connais bien vu que je les fréquente depuis très (très très) longtemps. J’ai eu et j’ai encore du mal avec eux. D’abord à cause du nom : un addictologue, c’est quelqu’un qui soigne les addictions considérées comme des maladies. Dans la panoplie, y’a guère que les cancérologues qui sont traitées comme ça, avec l’étiquette de la maladie plutôt que la mention de l’organe. Ça les isole, je trouve.

Après faut supporter leur discours. Les addictologues sont les derniers curés à l’ancienne.

« Il va vous falloir du courage..beaucoup de volonté…de la persévérance »

Ho, docteur, vous oubliez la foi, l’espérance et la charité….entre autres. Je viens pas rejouer au boy-scout. Je viens voir un médecin pro pour avoir une solution, plutôt médicamenteuse….Parce que si j’avais tout ça, la volonté, le courage et le cul de la crémière, je serais pas en face de vous. Si je suis chez un addictologue, c’est que je n’ai aucune qualité morale. La seule désintox que je connaisse, c’est Mezz Mezzrow dans son autobiographie. Il en chie pendant trente pages au moins, et j’ai pas envie d’en chier. La souffrance, comme rédemption, mon cul ! La volonté comme mode thérapeutique, mon cul again !

Si je suis chez un addictologue, c’est que depuis des années je cherche le plaisir dans ce qu’il a de meilleur : l’excès. Je suis accro à l’excès. J’ai eu plein d’addictions, à l’exception de le drogue, douce ou dure : le tabac, l’alcool, le sexe, le travail, la bouffe. Avec toujours, le même fonctionnement. C’est bon, j’en veux encore. Et encore plus. Pas la peine de me faire la liste des ennuis qui m’attendent. Je les connais. Mais je connais aussi le plaisir que j’en tire.

Crois moi, cher addictologue, je n’ai jamais été accro au déplaisir, même si je peux le comprendre. Je n’ai surtout jamais été accro à la fadeur : l’eau, c’est pas mon truc. Dans la définition, il y a « sans saveur ». Sans saveur, c’est sans moi. Sérieusement, faut être décérébré pour aimer un truc « sans saveur ». Alors, mon médecin me dit : « Oui, mais tu vas le payer ». Le payer !!! C’est un truc de curé. Tu vas payer ton plaisir.

Et donc, je finis par me demander si nous ne sommes pas dans une morale triomphaliste et hypocrite. Le reproche, c’est d’aimer ce qui est bon car, en creux, on veut suggérer que ce qui est bon est dangereux et excessivement dangereux dans l’excès. L’accro (je ne trouve pas de meilleure traduction pour « addict ») aime ce qui lui fait du bien et, non content de se lover dans une boule de plaisir égoïste, il veut y passer plus de temps. Monsieur le curé, il a rien contre une branlette occasionnelle, c’est dix Pater et dix Ave. Mais la régularité détruit le barème.Et puis, la recherche du plaisir, ne serait-ce pas du temps volé au travail, aux devoirs, aux obligatoires occupations qui construisent le bon citoyen, bon père, bon époux, bon salarié, bon voisin. Bon con, pour résumer.

L’addictologue, souvent il est psy (enfin 100% de ceux que je connais, le sont). A priori, son boulot, c’est de soigner la tête pour que son patient soit bien. Il ne lui vient pas à  l’idée que son patient peut être bien avec son addiction. C’est mon cas. Sauf que la pression sociale devient trop forte. L’espace public se rétrécit : j’ai la nostalgie des compartiments fumeurs des TGV qui étaient si sympas et des bistros du coin où il y avait toujours une jolie fumeuse à brancher. Le prix du paquet m’a ramené à mes amours adolescentes de contrebandier. Mes enfants m’assènent des slogans improbables et méchants certainement serinés par leurs sèches institutrices. Les nanas me veulent une haleine d’épicea caressé par un printanier zéphyr. Voilà, c’est naze, je suis chez l’addictologue. Et là, je prends conscience. Ce n’est pas mon désir, c’est le désir de la doxa.

Au début, il ruse. La doxa ne peut pas être tout à fait mauvaise. Si. Totalement. Relire Mythologies. La doxa n’est pas seulement une idéologie, c’est la pire : l’idéologie petite bourgeoise. Il tempère. Je l’imagine bien : « Alors, Monsieur Rimbaud, toujours avec votre obsession d’Ethiopie ? Mais vous savez il y a de beaux voyages plus près : les boucles de la Semois, par exemple » Ou bien « Mais Monsieur Picasso, il y a d’autres moyens de s’exprimer que de démolir le visage de vos contemporains. » C’est juste des exemples. Parlants. Pas des comparaisons.

En fait, il veut me ramener dans le jardin communautaire. Et c’est moi qui l’ai sollicité. Après tant d’années, la doxa m’a rattrapé. La doxa et la trouille. Mais au fond de moi, j’attendais un encouragement à vivre comme j’aime. Pas un encouragement à rejoindre le troupeau.

Ça me donne une leçon. Le problème de l’addiction, finalement, c’est que c’est un mauvais exemple donné aux autres. Tout le reste est habillage….


On en reparlera…..

lundi 25 septembre 2017

FORCE DE VENTE

Jadis, le prêt à porter n’existait pas. Ha bon ? Comment on s’habillait ?

Ben, déjà, on planifiait. L’achat d’impulsion, t’oublies. Tu voulais pas un pantalon, t’avais besoin d’un pantalon. C’est pas pareil. T’allais chez ton tailleur ou ton couturier, celui qui avait une fiche à ton nom avec toutes tes mensurations. Toutes.

Avant t’étais passé chez André Charpentier, tissus et tapis , pour choisir le tissu. Y’avait pas vingt modèles. Tu choisissais et basta ! Le père Charpentier, à intervalles réguliers il soumettait ses vendeuses à la question. Sur une grande table de drapier recouverte d’un drap, il mettait des échantillons de tissu (sous le drap, ça va de soi). Les vendeuses, elles allaient tâter l’échantillon à l’aveugle et elles annonçaient : « Ça, c’est un taffetas, ça c’est un tweed…. » et le père Charpentier complétait : « Oui, c’est un tweed, mais touche le bien. C’est un tweed de l’île d’Harris. Là bas, les moutons, ils ont la laine plus épaisse, ça se sent ». Monsieur Charpentier ne cotisait à aucun organisme de formation. Il formait et ça rigolait pas. Yvette, la vendeuse-chef, toujours première de la classe y veillait.

Alors, aujourd’hui, quand je rentre dans un magasin et que je demande des précisions sur le tissu, si la gisquette, elle va lire l’étiquette, elle prend son paquet. Parce que moi aussi je peux lire une étiquette. Mais je ne peux pas admettre que ce qui était possible, il y a quarante ans, soit devenu impossible. D’une vendeuse de fringues, je suis en droit d’attendre qu’elle ait quelques notions sur les tissus.

He bé, non ! Les commises (c’est comme ça qu’on disait) sont devenues vendeuses, puis conseilleres spécialisées et à chaque progression sémantique s’est surajouté une régression professionnelle. C’est qu’elles ont fait « force de vente ». Force de vente est une honte et tous ceux qui se sont impliqués dans cette filière devraient être virés de l’Education nationale. Force de vente suppose que toutes les ventes sont équivalentes et que vendre des chaussettes, c’est comme vendre des assurances ou des capotes anglaises. Chez Force de vente, on apprend la vente. De quoi ? De tout. Et donc, par définition, on fait l’impasse sur le produit.

Personne n’imagine que savoir tout vendre, c’et ne savoir rien vendre. Ce sera au chef des ventes de développer (ou pas) cet aspect des choses. C’est bien, ça fait des vendeurs dociles. Comme le jeune coq à qui je demandais des infos sur une voiture (je veux dire, le moteur, son couple, ces choses là) et qui m’a causé bluetooth et GPS. J’ai été obligé de le recadrer, surtout à propos du GPS, quand il a été incapable de me parler des satellites concernés (normal, y’en a pas). J’ai fini par le traiter de quelques noms d’oiseaux. Vu que c’est pas innocent. Ce que les vendeurs d’autos appellent des GPS ne sont pas branchés sur le système de positionnement par satellite, mais sur les relais de téléphones. En Europe, ça marche. Mais quand t’es dans le désert….ça marche plus.

Plus on forme, moins ils sont formés. J’en ai déjà parlé à propos des infographistes et même des garçons de café. La  perte des savoirs est incommensurable et le nivellement affolant. Le tout est facilité par les dérives langagières et l’effréné désir de raboter les masses salariales. Le rêve étrange et pénétrant d’une masse inculte appliquant des procédures fondées sur les statistiques pour vendre à tous le même produit dont le désir nait d’une réclame bien foutue est en bonne voie de réalisation. On n’est pas chez Orwell mais pas très loin de l’antichambre.

Ceci dit, on est tous coupables. Tous nous avons accepté la déliquescence du savoir des autres qui allégeait nos factures et la diminution de notre propre savoir qui nous assurait de disposer de temps. On marchait détail par détail… on élaguait, on allégeait..chaque détail n’était pas si grave…. He ben, y’a un moment où on peut plus alléger…y’a plus rien. Les centres de formation nous livrent des journalistes tout terrain qui passent de la politique au foot, les vendeurs vont des casseroles aux sex-toys et Jaguar construit des véhicules utilitaires. (Ferrari n’installe pas encore de boule à caravane sur ses voitures, mais ça ne saurait tarder). Le grand nivellement est pour demain.. Seuls y échapperont les joueurs de foot. On continuera à l’habiller du mot stupide de « mondialisation » en trouvant admirable qu’on mange à  Pékin comme à Abidjan alors que c’est seulement idiot.

Ceux qui voudront s’opposer seront marginalisés avant d’être éliminés (on agrandira les asiles, c’est facile) On en gardera quelques uns pour montrer à la jeune génération quelques vieux cons qui pensaient que la diversité des réflexions pouvait âtre une aide à la pensée. Vieux parce que ça coute moins cher à  nourrir.


On en reparlera.

mercredi 20 septembre 2017

L’ESCROC DU JOUR : CELIO

Je vais acheter un jeans. Banal. Certes. Je me rends dans une galerie commerciale, dans un magasin Celio et là, stupéfaction !!!

Attention : je vais faire un truc que j’ai jamais fait. Une dénonciation aux pouvoirs publics. Plus exactement à la DGCRF. Merci de faire suivre si vous connaissez des inspecteurs de cette honorable maison.

Stupéfaction. On me prend pour un red neck du Dakota. Chez Celio, si tu ne parles pas anglais, tu ne peux pas acheter.

Je ne parle pas de la coupe. Ce ne sont que slim fit, regular fit. Je fais pas la différence mais je m’assume regular. On me donne le choix entre waist et length. Taille et longueur de jambes eussent bien fait l’affaire… Je suis obligé de m’adresser à une vendeuse qui va me donner la correspondance entre la taille française et les tailles inscrites sur les bénards qui sont exclusivement américaines. De même la longueur des jambes est exprimées en pouces dont il faut rappeler que l’Assemblée Nationale a banni l’usage en 1792 !

Depuis on a fait la loi Toubon (1994) qui défend d’utiliser d’autre langue que la nôtre dans les pratiques commerciales. Loi que Célio bafoue alègrement. Dans le magasin où j’étais, il y avait bien 3000 références étiquetées en anglais. A 135 € l’infraction, voilà 400 000 euro plus faciles à ramasser qu’avec un radar automatique (il est prévu une contravention de quatrième classe par infraction). Célio se vante d’avoir plus de 300 magasins en France,soit un total de 120 millions d’euro.

C’est d’autant plus immonde que Célio est une société de droit français, même si pour des raisons que j’imagine fiscales, la famille Grossman, propriétaire de la marque l’a mise sous la coupe d’une société-mère belge. Célio pourra dire qu’il faut préserver des emplois, mais les jeans que j’ai achetés sont fabriqués au Bangla Desh. Si Célio est planté, les chômeurs ne seront pas des électeurs. Rien ne s’oppose à ce que Célio étiquette en français.

Rien, sauf le désir de s’agenouiller devant les USA comme une pipeuse du Sentier. Rien sauf la croyance que l’anglais fait vendre et peut être en sous main un désir de vassalisation inexplicable. En tous cas, moi, ça me gonfle. Oui, je parle anglais. Mais pas dans une galerie commerciale de province. Je parle anglais dans les territoires où je n’ai pas le choix. Quand j’ai le choix, je parle français et j’emmerde les non-francophones.

Et quand je vois des slogans ou des infos commerciales en anglais, je vois venir l’escroquerie, le mec qui veut que son client ne comprenne pas pour mieux l’estamper. Idem quand l’enseigne pue l’americanophile bêta. Il y a une loi. Pourquoi n’est elle pas respectée, à la virgule près.


Je crois, tout simplement que les mecs de la DGCRF pensent que ce n’est pas grave et que, finalement, fast food, c’est quasiment latin comme origine…

dimanche 17 septembre 2017

L'ETAT ET LE PATRONAT

L’avantage avec les livres, c’est que si on les loupe quand ils sortent, on en vient toujours à les retrouver. De celui consacré à la décadence de l’Empire romain que je suis en train de lire, 40 ans après sa parution, j’extrais cette phrase admirable :

La puissance des seigneurs fait que, même si leur intérêt collectif reste d’assurer la puissance de l’Etat, ils ne peuvent que le nier individuellement.

On ne saurait mieux dire et décrire notre monde. L’auteur se nomme Pierre Dockès et le livre est publié dans la remarquable Nouvelle Bibliothèque Scientifique, dirigée par Braudel chez Flammarion.

A la suite de Marc Bloch, l’auteur voit dans le féodalisme le passage de l’esclavage à l’état servile. Et à la suite de Marx, il voit dans l’esclavage l’origine du salariat. Pas très politiquement correct, ça !!!!!

Mais que se passe t’il donc ? Simple. Les latifundistes romains ont besoin de l’Etat, des armées de l’Etat, des fonctionnaires de l’Etat. Mais pas toujours, pas tous les jours. En revanche, pèse sur eux le poids de la fiscalité.  Faut bien payer les soldats. Et ce discours là, on l’utilise tous les jours. Pour se plaindre. Pour refuser une augmentation. Pour retarder un investissement. Récurrent, il prend naturellement la première place. Il devient dominant, il se transforme en doxa. Et de ce fait, il conduit à l’affaiblissement de l’Etat. Le discours tenu par chaque propriétaire devient partie d’un discours dominant qui va à l’encontre de ses intérêts.

Nous le vivons. Le patronat, par la bouche de l’ineffable Gattaz, ne cesse de fulminer contre l’Etat. L’Etat qui assure plus ou moins bien la paix sociale, la protection des citoyens et qui garantit la croissance en injectant des sommes colossales dans la protection des plus faibles. Car ne nous leurrons pas, le RSA, il file direct dans un chariot de supermarché et une pompe à essence. C’est un cadeau déguisé à la grande distribution. Laquelle aimerait bien prendre le cadeau et ne rien donner en échange et surtout pas des charges sociales.

Pendant ce temps, les Barbares infiltrent l’Empire et s’étonnent de son peu de résistance. Deuxième citation :

L’affaiblissement de l’Etat lié  à l’affaiblissement de sa base sociale rend nécessaire à la classe dominante la recherche d’une autre organisation de son pouvoir.

Et on commence donc à intégrer les Barbares (ici, les Germains) au processus de changement. Ce qui revient à renforcer ceux qui ont intérêt à l’affaiblissement. On peut y voir le manque de mémoire du patronat. Tout au long de la construction de sa puissance, l’Etat a envoyé ses soldats calmer les ardeurs populaires. Relire Germinal. Mais ce besoin d’Etat s’est estompé. Les grévistes n’ont plus besoin d’émasculer les petits commerçants et les CRS sont loin d’avoir la virulence des lignards du siècle dernier. Le besoin d’Etat est plus diffus, plus subtil mais la subtilité ne semble pas la qualité première des représentants du patronat.

Dans la mesure où, de surcroit, l’Etat a été dilué dans l’ensemble européen qui le rejette expressément et ne prend pas le chemin de le remplacer, la destruction de l’Empire est en marche. Le problème, c’est que ce sont des processus longs. L’agonie du capitalisme va durer et les soubresauts risquent fort d’être intéressants. Que vont ils pouvoir inventer ? Pour nous grignoter, avant de se cannibaliser.

Les années à venir vont être amusantes, moi, je vous le dis.


On en reparlera…

jeudi 14 septembre 2017

L’ESCROC DU JOUR : INTERMARCHÉ

Nouvelle rubrique pour mettre en avant les arnaques diverses. Aujourd’hui, c’est un paquet de chips sur un beau présentoir chez Intermarché-Bayonne.. Elles ont une tête que je connais, elles ressemblent furieusement aux provençales chips d’Allauch. Mais non ! sur le paquet en grosses lettres noires, c’est bien marqué « Origine Pays basque ».

Donc, je regarde. Soigneusement. Je connais bien mon pays, je ne vois pas qui peut produire ça. Je trouve. Au dos du paquet, en petites lettres. C’est fabriqué à Aubagne, Z.I. de la Palud. Et donc, pas loin d’Allauch. Mais ça étend pas mal le Pays basque.

Intermarché sait bien ce qu’il commande. Il sait d’où arrivent les cartons et il sait ce qu’il y a dedans. Nous sommes donc face à une escroquerie patente qui vise à faire croire à l’acheteur qu’il achète un produit local.


J’avais plutôt confiance en Intermarché. C’est fini.

mercredi 13 septembre 2017

IRMA LA DOUCE


Il paraît que Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, aurait déclaré que, pour accélerer la reconstruction aux Antilles, il fallait alléger la réglementation.

C’est l’idée la plus conne de la semaine.

Aux Antilles, il y a deux dangers récurrents : les cyclones et les séismes. Ils ont du bol, les Antillais, les deux ne sont jamais survenus ensemble. Parce que c’est possible. Peut être pas au jour près, mais un beau tremblement de terre, trois jours après un cyclone, ça ferait mal. Et comme d’habitude on aura des journalistes et des politiques affirmer que c’est pas de bol.

Des cyclones, y’en a tous les ans, grosso modo entre aout et janvier. Grosso modo, parce qu’il y a quelques années Emmanuel (et donc le cinquième de l’année) a frappé en juin. Le cyclone n’est pas une science exacte. Et pourtant, c’est foutrement prévisible.

Donc, le petit frère d’Irma la douce, il se pointera dans un an, avec des vents à 250 m/h, et il foutra par terre tout ce qui n’aura pas été construit dans les normes. Et il y aura des trous du cul pour accuser la fatalité, ou la Nature ou le réchauffement climatique.

On est dans un vrai délire. Le seul bâtiment touché est la préfecure, bâtiment appartenant à l’Etat lequel se doit de montre l’exemple. A ce toit envolé, il y a forcément un coupable. L’architecte et son organisme de contrôle ? Les services techniques qui ont validé et choisi l’entreprise ? L’entreprise elle-même qui aurait (sait-on jamais ?) utilisé ce grand classique du grugeage, le sous-dosage du béton ? Si in fine, tout le monde a respecté les consignes, il reste le mec qui, à l’AFNOR a déterminé les normes. Lui, on est sûrs qu’il s’est planté. Il dira qu’il pouvait pas savoir alors qu’il est payé (grassement) pour savoir et qu’il a oublié ce vieux principe de constructeur « Trop fort n’a jamais manqué ». On peut imaginer qu’il a déterminé les normes pour aider à la rentabilité des entreprises du BTP avec lesquelles il a travaillé ou qui emploient ses copains de promo. Ça s’appelle le réseautage et c’est une des plaies de notre société.
Mais l’un dans l’autre, on est certains qu’il y a un coupable, qu’on peut l’identifier et le punir. Mise en danger de la vie d’autrui, c’est du pénal.

On ne règlera rien en baissant la barre Au contraire. Baisser les normes, c’est ouvrir la porte à d’autres catastrophes, à d’autres dégâts, à d’autres morts. Je vais donner une idée au Président Macron qui semble en manquer. Il devait de toute urgence créer un corps de contrôleurs sismiques qui iraient vérifier que les bâtiments antillais sont aux normes, surtout les plus récents. Vérifier avec compétence et sans céder un pouce. Et punir avec sévérité. En zone sismique avérée (ce qu’est l’arc antillais) ne pas respecter ces normes, c’est de l’assassinat pur et simple et la punition doit être à la hauteur du crime. Même si le coupable est.... Même. Surtout. Plus on pointe haut dans la hiérarchie, plus on est coupable car on a les moyens de savoir.

Et puis, c’est pas difficile de prévoir. Je me demande si on va pas se payer une nouvelle tempête historique en décembre. 1999, 2009, 2019 n’est pas loin. Ce sera une tempête tropicale en Gironde et en Vendée. Le système est simple. Une tempête comme Irma, elle se calme sur terre., l’océan ne lui sert plus de combustible. Après, elle dérive. Le plus souvent vers l’Est vu la rotation d la Terre et la force de Coriolis. Elle revient sur l’Océan où elle va pouvoir se recharger. Pas trop, l’eau est plus froide. Mais suffisamment pour venir taper Soulac-sur-Mer ou les Sables-d’Olonne. On n’a pas fini de voir des chouineurs sur les écrans.

Mais si ça arrive, faudra pas dire que c’est la faute à personne. Si moi, je peux vous expliquer comment ça se passe, c’est clair que le gouvernement bardé d’experts doit être au courant. Y’a même un ministre qui s’en occupe Il a fait quoi, lui, devant Irma ? Il a rangé sa planche à voile et interdit le diesel.On est vachement protégés.

Sans compter que si l’info est juste, Hulot, je m’attendais à ce qu’il prenne la parole et dise à l’autre « Arrête de dire des conneries » vu qu’a priori, il est le ministre de la protection à long terme et que les tempêtes, c’est dans sa valise.

Je regarde nos Présidents. De Gaulle, il était militaire et avait donc quelques connaissances géographiques. Pompidou, normalien, devait avoir quelques copains susceptibles de l’aider. Giscard avait pris avec lui Alice Saunier-Séité, jolie géographe (et ce n’est pas un oxymore), Mitterrand jouait finement de la rivalité entre Tazieff et Allègre.. Après, plus rien. La géographie disparaît du paysage intellectuel.


Et donc, on n’a pas fini d’en reparler……

vendredi 1 septembre 2017

CREATIFS ET PLAGIAIRES

« Ce que vous appelez un créatif, Madame, est un salopard qui se brosse l’ego sur les débris de mon histoire. » Elle est interloquée, la femme du pâtissier. J’étais entré pour acheter un saint-honoré. Chez un pâtissier, c’est la moindre des choses. Et la patronne me propose des machins style charlotte à la mangue. Moi, dans les gâteaux, ce que j’aime c’est la crème et les choux. Choux du jour, ça va sans dire. J’aime la pâtisserie qui appelle l’armagnac. La mousse exotique, ils peuvent se la mettre au cul. Quand je rentre dans une pâtisserie, ça doit me rappeler Madame Fernandez et ses belles doudounes à la sortie de la Cathédrale. Que ça sensualise de partout. Et donc la pâtissi§re maigre me regarde comme si j’étais une crotte de chien de manchon en laissant tomber de ses lèvres trop minces pour être honnêtes : « Vous n’aimez pas les créatifs ». S’attirant la réponse ci-dessus.

La femme du génie de la mousse exotique, elle s’imagine qu’en parlant comme une journaliste féminine, elle introduit la littérature dans l’antre du mauvais goût qu’elle dirige. Bien sûr que j’aime les créatifs, sauf les autoproclamés. Tiens, on va parler d’un créatif, un vrai, un petit pâtissier d’une petite ville pyrénéenne : Artigarède d’Oloron Ste Marie. Quand j’étais petit (entre Vincent Auriol et René Coty), comme on ne pouvait pas aller à Oloron tous les dimanches, on allait chez Arosteguy à Biarritz qui tenait en dépôt le gâteau-phare d’Artigarède, le Russe. Aujourd’hui, on en trouve partout. Tous les pâtissiers de la Côte ont copié le Russe d’Artigarède.

C’est la définition du créatif : le mec qui invente un plat (ou un gâteau) que tous vont s’approprier car il correspond à une certaine perfection.. Le MOF  (dans ce cas Mari de l’Odieuse Femelle)qui ne sait pas faire de saint-honoré, j’attends qu’il crée un classique, mais je ne suis pas sûr qu’il en soit capable. Faire joujou pour amuser le gogo, oui. Inventer un gâteau qui défiera les années, c’est autre chose. Parce que les gâteaux, c’est comme les livres, y’a plein de prédécesseurs et ceux qui savent comparent. Et ils voient bien qu’il y a les plagiés (les créatifs) et les plagiaires.

Puisqu’on est sur la Côte basque, restons y pour parler d’un autre créatif : en 1660, le pâtissier Adam offre un biscuit de sa création à Louis XIV, pour son mariage. J’étais chez Adam la semaine dernière et la brunette qi me servait me disait qu’il faudrait écrire l’histoire du macaron. Inutile. Elle tient en deux lignes : en 1660, Adam invente le macaron. Ensuite, il est plagié. Et pas qu’un peu. On a même, à Paris, le roi du plagiat : il s’appelle Hermé. Le mec, il reprend une recette qui s’approche de ses quatre siècles. Il remplace l’amande par des saveurs moins subtiles, il y colle des colorants modernes, et la piétaille des gueux s’extasie. Au point que le plagiaire, le geai paré des plumes des cons, est parfois appelé le roi du macaron. !!On rêve…..

On va me dire ce que j’ai déjà entendu, à savoir que je n’aime pas la nouveauté. C’est faux mais elle ne doit pas faire disparaître la tradition. Qu’un chef crée un nouveau plat me va, même en cuisine moléculaire. Ce qui ne me va pas, c’est que les vieux classiques disparaissent. Qu’on ne retrouve plus sur les cartes de poulardes en vessie à la Albufera ne serait ce que parce que j’aime bien Suchet. Et pour moi, les meilleurs, les MOF, ne sont jamais qu’une passerelle entre les meilleurs de tous les temps. Le concurrent de Ducasse, c’est pas Alleno, c’est Carême. Si vous ne pouvez pas comprendre ça….

Quand j’étais môme, le geai de La Fontaine, m’explosait de rire. Un piaf persuadé qu’il pouvait enfiler les plumes d’un autre….Ben voilà, on y est. Et tout le monde applaudit le piaf déguisé.

C’est pathétique de sottise et d’inculture…


On en reparlera…