vendredi 23 mars 2012

QUELQUES IDEES LOGIQUES

Méfiez vous : la logique, au jour d’aujourd’hui, est le meilleur moyen de se faire détester, même par vos meilleurs amis. Essayez par exemple d’avoir quelques idées logiques sur ce qu’on appelle « la tuerie de Toulouse ».

Idée n° 1 : si les gosses avaient été dans une école communale laïque et républicaine au lieu d’être dans une école confessionnelle, ils seraient vivants aujourd’hui.

Tu peux la tourner dans tous les sens, elle est imparable. Les gamins, ils sont pas morts d’être juifs, ils sont morts d’avoir été dans une école juive. D’avoir été désignés comme des cibles potentielles. Par leurs parents vu que eux, les gosses, ils ont rien demandé.

Mais, bêlent mes copains, c’est un acte antisémite. Bien entendu. Le ventre est encore fécond….disait Brecht. L’antisémitisme existe depuis des siècles et on a toujours été incapables de l’éradiquer. J’ai pensé à Roby, le vieux copain de mon papa. Roby, quand il est revenu des camps, il a dit « Fini les conneries ». Il a converti toute sa famille au protestantisme et il a refusé de faire circoncire ses garçons. Il avait du montrer sa zigounette aux autorités françaises et ça lui avait valu un aller simple pour la Pologne. Il voulait pas de ça pour ses enfants. Ses ancêtres avaient été virés par Isabelle, les ancêtres de sa femme avaient fui les pogroms de Russie, lui s’était retrouvé dans une succursale d’Auschwitz. Ça commençait à bien faire. Qui peut lui jeter la pierre ? On le persécutait pour une étiquette, alors il a enlevé l’étiquette.

J’ai écouté le témoignage d’un môme. « Myriam, elle est décédée. Alors, on a allumé une bougie pour qu’elle revive ». Pauvre môme ! Sa copine, elle revivra jamais, elle se fera pas des tartines de Nutella et elle rigolera jamais avec ses copines en parlant du beau brun qui la fait frissonner quand il la regarde. C’est fini. Tu peux allumer des bougies tant que tu veux. Pourquoi on lui dit pas ça au môme ? Que la mort, c’est définitif. Ils veulent que ça continue, encore et encore ?

Idée n° 2 : le tueur, s’il avait été jugé pour haute trahison, il croupirait dans un cul de basse-fosse et rien n’aurait existé.

Parce que faut pas déconner. Le mec, Français, il va en Afghanistan et au Pakistan se battre avec les talibans contre l’armée française. Ça s’appelle désertion et haute trahison. Là aussi, tu peux tourner le truc dans tous les sens. Quand un citoyen d’un pays va aider l’armée ennemie, comment tu veux dire ? Ben, chez nous, c’est pas comme ça. Quand il revient de son engagement chez l’ennemi, on le fiche, on le surveille de loin. C’est tout. Je sais pas ce qu’on pense. Qu’il faut bien que jeunesse passe ? Que c’est bien d’avoir des valeurs à 20 ans ? Que c’était que du tourisme ?

C’est pas d’hier. Je me souviens d’un vieux commissaire de police de Bayonne qui se targuait de pouvoir décapiter l’ETA en quelques jours. « Il suffit de coffrer tous ceux qui ont fait un voyage en Libye ». A l’époque, Khadafi avait organisé des camps d’entraînement où passaient tous ceux qui voulaient apprendre le maniement d’explosifs. Y’avait pas que des Basques. Des Irlandais aussi, des Allemands de la RAF. Sauf que faire du tourisme en Libye, c’était pas un délit. Faut être con, tout de même….

Et puis le criminologue Alain Bauer affirme ce matin sur I-Télé qu’il y a en France environ 800 anciens combattants talibans et qu’on les connaît. 800 ennemis qui ont tiré sur des soldats français. Dreyfus, on l’a envoyé au bagne pour moins que ça… Alors, Sarko s’énerve. Il dit qu’on va faire des lois. Hé ! M’sieur Carla, les lois, elles existent. Suffit de réactiver les conseils de guerre.

Remarque Kouchner, il l’avait déjà dit que l’Afghanistan, c’était pas une guerre. On a des soldats qui flinguent et se font flinguer, mais c’est pas une guerre. On a des Français qui flinguent des soldats français, mais c’est pas des traitres. La vraie guerre, c’est à la sémantique qu’il faut la faire. Faut arrêter de jouer aux cons avec le politiquement correct. C’est ça qui fait couler le sang.

La dégradation sémantique est assez simple. Tous les stratèges, de Sun Tzu à Clausewitz recommandent de connaître l’adversaire. C’est assez logique. Après, tu glisses. Tu dis que pour connaître, faut comprendre. Et, plouf ! t’es mort. Parce que si tu comprends, tu risques d’approuver, de te dire que finalement, le mec, il a pas complètement tort. L’avocat de Merah, il te dit que c’était plutôt un gentil mec, rigolo et pas violent. T’as qu’à croire : quinze condamnations dont une pour vol avec violences, ça caractérise le bon copain rigolard qui frime avec une BMW qu’il conduit sans permis ! On peut vraiment dire n’importe quoi….. Y’a un mot pour ça : hors-la-loi. Un mot qu’on n’utilise jamais. Un mec qui conduit sans permis, c’est un hors-la-loi. Un immigré clandestin, c’est un hors-la-loi. Vu qu’un hors-la-loi, c’est un mec qui respecte pas la loi. Quelle que soit la loi. Faut le comprendre, l'avocat : à force de défendre des hors-la-loi, il trouve que la marginalité, c'est normal.

Seulement voilà : on joue avec les connotations. Pour tout le monde, un hors-la-loi, c’est un gros criminel, Mesrine ou Jessie James. Pas le mec qui conduit sans permis. Comme s’il y avait des petites lois et des grosses lois, des lois qu’on peut transgresser et des lois qu’on peut pas. Les deux vitesses de la loi.

C’est la vision du comptoir de bistro. Tous les mecs qui comprennent ou pas, qui décident et qui jugent les juges. Qui disent que c’est pas si grave. Faut se réveiller. On a des juges pour appliquer la loi et en décider. Le citoyen de base, c’est pas à lui d’en parler. Pas à lui de dire « si c’était moi… ». Ben justement, c’est pas toi. Ferme ta gueule. Si tu veux juger, deviens magistrat, ce sera ton boulot. Si t’es pas content, change de député, y’a que lui qui peut changer la loi. Pas toi. Commenter la justice, c’est simplement faire du bruit avec la bouche avant de dire au patron « Allez, Jojo, remets une tournée ».

Alors, on comprend. Le seul truc qu’on comprend pas, qu’on veut pas comprendre, c’est qu’un hors-la-loi se met de lui même hors la société qui est régie par ces lois. Le mec, faut le comprendre, il a été élevé par une maman seule, il a pas bien suivi à l’école, tous ces trucs. Ben oui, mais ça change pas la loi. Ou alors faut dire que la loi, tu t’en tamponnes. Et puis, la loi, elle lui a aussi permis d’avoir des aides sociales. Tu peux pas trier, les bonnes lois et les mauvaises. Faut tout prendre. Sauf à vouloir le beurre et l’argent du beurre. Mais ça, c’est pas possible…

On en reparlera….

samedi 17 mars 2012

LE DROIT DU SOL

Ça chauffe à l’OMC. Quelques pays, dont les USA, viennent de déposer plainte contre la Chine qui vient de mettre des restrictions à l’exportation des terres rares. Pour faire simple, les terres rares, c’est une bouillie de minéraux rares qu’on trouve dans certains grands plateaux alluviaux. C’est des noms imbitables, le lutécium, le dysprosium ou l’ytrium. Ils sont étroitement mêlés à la terre et les extraire est assez compliqué et plutôt coûteux.

On en a besoin pour quantité de choses liées à l’électricité. Produire des LED, améliorer les lasers, fabriquer des piles et batteries. Y’en a partout, en quantités infimes, dans les portables, dans les jouets, dans les satellites et les missiles, dans les télés. Sans les terres rares, l’industrie électronique se crashe comme un autobus belge. Et donc, les terres rares sont considérées comme des « minerais stratégiques ».

Quand l’économie chinoise s’est ouverte au monde, quelques sociétés privées se sont spécialisées dans leur exploitation. L’une d’entre elles était Fosun, fondée et dirigée par Guo Guangchang, Fosun par ailleurs actionnaire du Club Med. Fosun a gagné beaucoup d’argent avec les terres rares. Apple aussi. L’Occident était ravi. La Chine possède plus de 50% des réserves mondiales et les exploite à bon prix. Comme les usines étaient en Chine, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes capitaliste.

Et puis, en 2010, Pékin a créé un Office de protection des terres rares et en a réservé l’exploitation aux sociétés minières nationalisées. Fosun et ses copains ont gentiment rendu les concessions au gouvernement. Déjà, ça en dit long sur le fonctionnement des sociétés privées chinoises. Le gouvernement fronce les sourcils, elles obtempèrent. Privées peut-être, mais pas privées d’obéissance.

Pékin savait que les sociétés occidentales commençaient à réfléchir sur la relocalisation de certaines industries. Et donc, le gouvernement chinois a annoncé un nouveau quota sur l’exportation des terres rares. C’est juste un message envoyé à Apple et à ses copains : fabrique ailleurs si tu veux, mais t’auras pas la matière première.

L’Occident a trouvé la mesure saumâtre. C’est vrai, ça. Ils étaient en Chine pour la main d’œuvre. Ils se disaient qu’ils pourraient aller encore ailleurs, en Inde ou au Bangladesh. Et ils découvraient que la main d’œuvre sans matière première, ça servait à rien. D’où leur plainte à l’OMC. La situation est baroque. Les Chinois disent « c’est chez nous, c’est à nous et on fait ce qu’on veut ». C’est vrai ça. Des terres rares, il y en a ailleurs. Moins qu’en Chine, mais il y en a. Avec un bémol : partout ailleurs, ça coûte un bras à produire. Pour une raison essentielle, c’est que la Chine offrant une solution rentable, personne ne s’en est jamais occupé. Et donc, y’a tout à faire et c’est pas demain la veille qu’on va remplacer la production chinoise. Et voilà comment on laisse se constituer un monopole parce qu’on cherche la rentabilité à court terme et qu’on ne veut pas investir. Et puis, ils ont pas tort : c’est chez moi, c’est à moi. C’est un principe général. Si j’ai pas envie de te vendre les tomates de mon jardin, tu vas les acheter ailleurs. Le refus de vente, ça existe, surtout pour des trucs qualifiés de stratégiques. On fait ça tous les jours avec nos centrales nucléaires, par exemple.

L’Occident hurle : « Vous êtes obligés de nous vendre ». Les Chinois rigolent. Ils sont pas plus obligés de vendre le lutécium que les Ricains ne sont obligés de vendre la Maison Blanche. Il leur suffit de baisser la production et d’augmenter les prix. Ils tiennent le marché pour quelques années encore. Et ils ont de la marge de manœuvre. Ils vont laisser les prix juste en dessous du prix de revient en Occident. Un poil de cul de grenouille en moins. Du coup, les Occidentaux, ils vont hésiter, attendre, s’enferrer encore plus. C’est pas demain la veille qu’ils vont prendre des décisions pour se sortir du piège. Parce que ce seraient des solutions coûteuses, rentables sur le long terme seulement. Pas question d’abimer les bilans et d’effrayer l’actionnaire.

C’est assez jouissif à observer. D’autant que l’électronique, c’est pas que des IPhone. C’est aussi des ordinateurs de bord pour les avions de chasse, des missiles sophistiqués, des satellites d’observation et de télécommunications. Si on fait un bras de fer, on risque fort de plus avoir d’armée. Remarque, si on s’écrase, on est pas sûrs d’en conserver une. Là aussi, on est piégés. Sun Tzu a encore gagné : l’art de la guerre, c’est soumettre un ennemi sans combattre.

Les Chinois savent une chose : nous ne savons rien du terrain. A force d’encenser le monde virtuel, nous en sommes arrivés à nous moquer de la réalité géographique. Et la réalité nous revient en boomerang. On va faire quoi ?

La mère Joly, elle nous les brise avec les emplois de la « croissance verte ». La croissance verte, c’est de la haute technologie. Sans terres rares, pas de piles photovoltaïques, pas de croissance verte. Surtout que le dernier marché pour un gigantesque parc éolien au Chili, c’est les Chinois qui l’ont gagné, ils sont devenus leaders dans la construction d’éoliennes géantes.

Le père Ghosn, il nous fait le coût de la bagnole électrique. Sans lithium, pas de piles. La moitié du lithium exploitable à un bon prix, c’est en Chine qu’on le trouve. On fera des bagnoles électriques si Hu Jin Tao le juge bon. Bon pour lui, je veux dire.

On fait quoi ? Ben, mon petit père, on fait ce qu’on peut. On cause, on fait des promesses, on baratine. Va falloir qu’on s’habitue à mettre la main au portefeuille. Pour payer les terres rares, pour payer la main d’œuvre qui va augmenter (ça commence), pour payer le transport qui va suivre les coûts du pétrole.. Papa, c’est loin la Chine ?

Défaitiste ? Un peu, sans doute. Défaitiste parce que nos gouvernants (j’ai failli écrire « nos élites », mais c’eut été faux.) ont de la merde dans les yeux et les neurones à l’arrêt. Tous, sans exception. Ils cherchent des issues dans les systèmes et les idées qui nous ont mis dans cette situation. Forcément, ils trouvent pas. Leur seul critère, c’est le pognon. Et donc, ils baissent les bras. La mère Duflot, elle nous dit que le nucléaire dépend de nos importations d’uranium. Faux. Y’a de l’uranium en France. Sauf qu’il coûte cinq fois plus cher à extraire que l’uranium nigérien. Alors, on a fermé les mines, c’est plus sympa d’exploiter le Touareg de base. Et on s’est mis entre les mains d’Aqmi.

Qui va nous dire qu’on est sacrément dans la merde ? Qu’on est à un tournant de civilisation et qu’il va falloir faire machine arrière ?

Et apprendre à nouveau la géographie….

On en reparlera….

dimanche 11 mars 2012

DELIRE : UNE IDEE LAIQUE, EUROPEENNE, LOGIQUE

Restez assis. On va délirer un bon coup. Ça fait du bien aux neurones.

Prémisse n° 1 : L’Europe a été construite pour faire jouer à plein la concurrence. Selon les standards européens tout doit être bâti pour permettre une concurrence pleine et entière.

Prémisse n° 2 : Sur le territoire français, il y a quelques milliers de concessions qui ont été accordées sans appel d’offres, au nom d’une logique historique et culturelle dont on peut se demander si elle a toujours droit de cité. Ce sont les bâtiments cultuels nationalisés par la loi de 1905. L’Etat en a pris la propriété et les a dévolus aux religions qui les occupaient.

Prémisse n° 3 : La République étant laïque n’a aucune raison de privilégier telle ou telle religion pour l’octroi de ces concessions.

Relisez ces prémisses. Tout y est juste. La conclusion s’impose d’elle-même.

Pour que la concurrence joue à plein, l’Etat devrait organiser des appels d’offres européens, ouverts au marché international pour les concessions de ces bâtiments.

Bien entendu, des milliers d’entre eux ne susciteraient aucun intérêt. Par contre, certains, emblématiques, pourraient rapporter des millions.

Notre-Dame-de Paris, par exemple. Disney pourrait être intéressé. C’est que ça attire du monde. Ils feraient une entrée couplée Eurodisney-Notre Dame. Et ils sauraient organiser un vrai merchandising avec des poupées Esmeralda ou des Pokémons Quasimodo.

Y’a mieux. Le Qatar. Ils sont gavés de pognon. Quand tu vois ce qu’ils sont capables de payer pour un joueur de foot, ça te donne une idée de ce qu’ils mettraient pour utiliser Notre-Dame. Comme une mosquée, par exemple. T’es choqué ? Ben, c’est que t’es pas vraiment laïque. Moi, un dieu ou l’autre, je m’en tamponne. Faudrait prévoir la conservation des statues et des peintures, mais à part ça… Bon, les cathos, si ça les défrise, rien ne les empêche de faire appel au peuple. Ils sont capables de donner 3 millions d’euro par an pour financer un projet de télé catholique (KTO) sans grand intérêt, alors pour Notre-Dame ou Vézelay, t’imagines. Une vraie compétition financière. Et l’Etat se remplit les poches.

On peut imaginer des tentatives de monopole. Une société spécialement créée pour acheter les concessions de Reims, Chartes, Beauvais, Strasbourg et en faire une sorte de parc de loisirs éclaté avec abonnements et vente de cierges en gros.

Forcément, dans les villages, y’aurait moins d’intérêt. Mais on peut penser que les laïques d’Arancou (tu sais pas où c’est ? Pas grave) se cotisent pour avoir la concession de l’église et la transformer en salle de jeux. En temple de la laïcité.

Joue avec cette idée, tu verras, elle est sans fin. Les concessionnaires potentiels sont légion. La Scientologie. Ou les Témoins de Jéhovah. Les intégristes. Même les bouddhistes, ils feraient la quête. Y’a plein de mecs qui peuvent mettre la main à la poche pour avoir une église à eux. Et prendre aux croyants, c’est assez jouissif.

On pourrait voir des trucs marrants. Les antisémites achetant la concession des synagogues pour emmerder le monde. Les bouddhistes achetant les sanctuaires de Saint-Michel pour éliminer la violence. On verrait alors le vrai visage de la République laïque parce qu’on verrait surgir à nouveau les guerres de religion. On s’apercevrait qu’à force de tout tolérer, de tout excuser, de tout banaliser, des processions du Sacré-Cœur à l’abattage rituel, le pays est toujours religieux. Mais, au moins, ce serait dit, et même proclamé. Là, tu verrais la Marine qui se veut tant laïque s’enchaîner aux piliers de Notre-Dame. Ceux qui en appellent si facilement à Jaurès défendraient avec vigueur la Calotte. Les masques tomberaient enfin.

Mais on me dira que tout n’est pas susceptible d’être concédé selon une seule logique financière. Sauf que ça, on le savait. Le fonctionnement européen, il est à géométrie variable. Le fonctionnement laïque aussi. A la porte de l'école de mon fils, on affiche les dates des vacances scolaires. On y a apprend que Monsieur le Recteur, pour déterminer les dates de vacances, prend l'avis de l'archevêché de Paris. Qui a dit laïque ?

Le seul résultat probant, c’est que nous, les laïques, on se marrerait comme des bossus à regarder les croyants s’injurier, s’étriper, se victimiser mutuellement. Dans le seul but de réduire le déficit de la France. On rentabiliserait enfin la laïcité.

On en reparlera…..

mercredi 7 mars 2012

LES EMIGRES FISCAUX

Bon. La Gauche a le vent en poupe. Le peuple attend des changements, pense t-on. Légère erreur de perspective. Le peuple attend un bouleversement. Sans trop y croire, cependant. Mais il n’a pas le choix. C’est le bouleversement ou la mort, à peu de choses près. On va être surpris par le score des « extrêmes ». On est à deux mois du premier tour et les sondages donnent déjà entre 30 et 40% aux extrêmes. C’est une situation assez inédite.

Les politologues s’étonnent que les centres ne décollent pas. Les politologues confits dans leurs certitudes comprennent mal que les arguments raisonnables font long feu en ce moment. Nous sommes à ces moments-charnières où tout peut exploser. Personne n’a envie de se retrouver dans la situation de la Grèce. Et le discours des extrêmes s’est vachement normalisé quoiqu’on en pense. Si tu compares Marine en son papa, on n’est plus dans le même registre. Papa Jean-Marie, il tribunisait, il se gavait de rhétorique. La fille, elle te sort des graphiques et des tableaux Excel, elle jongle avec les chiffres. Mélenchon, pareil. Et que je te prends trois milliards ici et que je te les repasse là et regarde un peu si mon budget, il est pas en équilibre. J’ai été ministre, moi, je sais gouverner. Hé, se dit le peuple, on est plus dans le pipeau, là.

Et donc la Gauche a le vent en poupe. La Gauche et les extrêmes, on va pas coller Marine et Dupont-Aignan avec la Gauche. Mais dans tous les cas, le résultat est le même. Ça va bousculer.

Et donc, l’émigration fiscale revient au premier plan. Normal. Les riches vont pas se laisser saigner. On te parle de Bruxelles ou Genève. On te parle pas de plein d’autres endroits comme le Maroc ou la Thaïlande, des endroits mieux que Bruxelles. T’as pas d’impôts et t’as le soleil en plus et la bonniche à vil prix. Les mecs qui choisissent Bruxelles, c’est parce qu’ils gardent des affaires ou des biens en France, faut pas être trop loin.

Faut pas s’affoler, on a déjà connu ça. Pas en 1981, c’était peanuts. Non. En 1792. Les riches, ils filaient à Coblence, pas trop loin, de l’autre côté du Rhin pour pouvoir revenir. De préférence dans les bagages d’une armée allemande qui leur permettrait de récupérer à la fois leur thune et le pouvoir. Vu que les riches, ils savent parfaitement que le pognon fait son nid dans les allées du pouvoir.

Alors, la Constituante a réagi. Normalement et justement. Tu veux pas participer à l’effort national ? C’est ton droit. Mais comme tu peux pas avoir le beurre et l’argent du beurre et comme si t’es parti, c’est que tu t’en fous, alors je nationalise tes biens. Les biens nationaux, ça a été un drôle de truc. Une vraie redistribution. Certes, un peu orientée. Le plouc de base, endetté jusqu’au cou, il a pas pu s’offrir le château du seigneur. Mais le marchand de grains assis sur son tas d’or, il en a profité. Les économies de la bourgeoisie, elles sont sorties des lessiveuses. Forcément, les émigrés, ils ont hurlé à la spoliation. Mais quand t’es loin, les hurlements s’atténuent.

On commence à y penser. Pas aussi clairement. Les énarques, ils ont le sens de la mondialisation et ils respectent le droit établi. Même s’ils sont à gauche. Les énarques, ils oublient qu’on peut toujours faire une loi pour changer la loi. Ils oublient qu’un pays est souverain sur son territoire. Ils oublient qu’on peut toujours envoyer sur les roses Bruxelles, Londres ou Washington. Ils vont pas nous faire la guerre, ils sont trop péteux pour ça. Tu vois le vieux Van Rompuy décréter la mobilisation générale, toi ?

On commence à y penser : on parle de récupérer les usines que les financiers voudraient fermer. T’en veux pas, je la prends, ça te manquera pas. Sur un coup comme ça, les extrêmes sont les plus crédibles. Le peuple approuve. Il sait bien que récupérer l’usine, c’est pérenniser son salaire.

Mais le peuple, il aimerait bien aller plus loin. Le peuple, ça l’énerve que l’émigré fiscal, il conserve ses avantages. C’est vrai, ça. T’habites Pattaya, tu payes plus d’impôts, mais quand t’es malade, tu reviens te faire soigner à Henri Mondor. Le peuple, il comprend que tu veux pas boucher le trou de la Sécu mais l’agrandir. Ça l’énerve, forcément. Emigré fiscal, ça veut dire que tu prends sans donner.

Faudrait revenir à l’esprit de Coblence. Tu veux pas payer, t’es plus Français. Hé ! ça marche pas. T’es Français pour l’éternité. Ben non. Y’a un statut juridique pour ça. Apatride. Ça veut dire que t’as plus de Patrie, vu que ta Patrie ne veut plus de toi. On a des exemples récents. Franco, il a enlevé la nationalité espagnole aux Républicains espagnols qui avaient quitté l’Espagne. Bon, Franco, c’est peut-être pas un modèle à suivre. Quoique… D’ailleurs les Américains font ça : tu payes pas d’impôts, on t’enlève la nationalité. On les imite sur tant de points qu’on pourrait les imiter sur ça…

Du coup, les émigrés fiscaux se retrouveraient à poil. La plupart profitent des conventions bi-nationales. Les Etats se mettent d’accord. T’es écrivain, tu vis en Irlande, tu payes tes impôts en Irlande où les écrivains ne sont quasiment pas taxés et la France renonce à te taxer. Sauf que si t’es apatride, la convention bi-nationale, elle marche plus. Et donc, la France peut saisir ton imposition à la source. En même temps, tu perds la Sécu et le droit de vote. Pas de raison que tu votes pour choisir un gouvernement à qui tu refuses ton pognon.Il parait que Houellebecque serre les fesses.

Je n’y vois qu’un souci politique. C’est la volonté de lier impôts et droits civiques. Ça s’appelle le mode censitaire. Parce que le corollaire, c’est que si tu payes des impôts en France, t’as les mêmes droits que les Français. La Gauche qui veut donner le droit de vote aux étrangers en situation régulière, elle ne peut qu’être d’accord. Question de logique. Si un mec a le droit de voter parce qu’il paye des impôts, alors celui qui échappe à l’impôt perd aussi son droit de vote. A ce compte, mon copain Roy, Anglais qui paye une taxe foncière et une taxe d’habitation à Paris, il pourrait voter à Paris. C’est pas choquant : c’est Delanoé qui gère le fric de Roy. Ça donne à Roy le droit de décider s’il veut garder Delanoé.

Y’a un truc à creuser. Séparer impôts locaux et impôt sur le revenu par exemple. Scinder le droit de vote : tu peux choisir le maire mais pas le député. Un droit de vote à deux vitesses en fonction de ton implication financière. Il faudra y venir.

Il faudra y venir parce que la mondialisation, ça ne marche que dans un sens. Il y a désormais deux classes sociales. Ceux dont le territoire est le monde et ceux qui sont attachés à la glèbe et n’ont pas la possibilité de choisir. Entre ces deux, le gouffre se creuse. C’est juste une question de territoire, c’est à dire de géographie….

On en reparlera….

vendredi 2 mars 2012

BAYONNE EN FETE

Hé bé ! Plus violent à Bayonne qu’à Florange ! A Bayonne, on n’a pas entendu de « casse-toi pauvre con » ni de « descend si t’es un homme »…

Par contre, on en a entendu, des approximations et des à-peu près.

Contrairement à ce qu’on vous raconte, l’enfermement du candidat-Président n’a pas eu lieu dans le quartier très nationaliste du Petit-Bayonne, mais dans le quartier historique du Grand-Bayonne, autour de la Cathédrale. Rive gauche de la Nive et pas rive droite. Quartier plutôt bourge, commerces de luxe et antiquaires.

Quartier médiéval et donc rues étroites. Difficile de se déplacer. D’autant que les cons qui ont organisé le déplacement avaient choisi le Bar du Palais pour que Nicolas prenne son café. Or, le Bar du Palais, adossé à la Cathédrale est un piège. C’est un petit rade sympa qu’on bloque avec dix personnes. Et y’a pas de sortie de secours. Le Nicolas, on l’a collé dans une souricière. Tu regardes l’itinéraire, c’est à mourir de rire. Il descend de voiture au bord de la Nive. Là, y’a un peu de place, ça va encore. On lui fait monter la rue Poissonnerie, ça devient plus raide. Cette rue, avec dix personnes, tu la bloques. Et quand t’arrives en haut, c’est pire. Un petit crochet à droite et le piège s’est refermé. Les manifestants, ils avaient pas besoin d’être une foule. A cinquante, ils bloquaient le quartier. Une rue comme la rue de Luc, tu la fermes à quatre personnes. Et une fois que c’est fait, si tu veux faire venir les CRS, c’est pas gagné. L’intervention, ce sera pas une intervention d’urgence.

Je ne comprends pas comment le sous-préfet a validé un tel déplacement dans de telles conditions. Dans des rues étroites, avec des maisons hautes (5 à 6 étages) d’où un voisin mal intentionné pouvait envoyer sans peine un projectile sur la tronche du Président le plus impopulaire du siècle. A moins qu’ils aient eu l’idée de faire un martyr.

La manif, on y a surtout vu des membres de Batera. Batera, c’est un regroupement de chefs d’entreprise et d’élus locaux, des mecs bien sous tous rapports, qui demandent la création d’un département basque. Pas l’indépendance, pas l’autonomie, juste une modification administrative qui ne met pas en péril la République. Le plus gonflé, c’est le PS qui se joint à Batera. Le département basque, il a été promis en 1981 par Mitterrand qui s’est empressé d’oublier sa promesse. C’est un lourd contentieux entre les Basques et le PS. Autant dire que Batera et le PS dans la même manif, c’est vraiment un pâté de carpe et de lapin.

Moi, j’étais content, on a parlé de ma ville. Même sur I-Télé, le matin mais sans les commentaires de la jolie Maya Lauqué dont la maman est pourtant adjointe au maire de Bayonne et pilier local de l’UMP. Remarquez, son papa est responsable du tourisme au Pays basque. J’espère que c’est pas lui qui a fait l’itinéraire du chef de sa femme.

Bon, si vous voulez des informations précises, demandez-moi. C’est plus simple.