jeudi 29 novembre 2018

DIESEL ET FRET

Il y a des nouvelles qui font rire…jaune, surtout lorsqu’elles viennent de Chine dont les medias occidentaux s’accordent à dire que c’est le plus gros pays pollueur du monde. Imaginons que si le pigiste de TF1 le sait, les autorités chinoises le savent aussi. On en a déjà parlé. Et donc le Quotidien du Peuple en parle aussi.

Figurez vous qu’en Chine, les camions diesel représentent 7,8% des véhicules en service et 57,3% des émissions d’oxydes d’azote ainsi que 77,8% des particules présentes dans l’air. A priori, il y a peu de chances que les pourcentages soient différents chez nous. C’est pas nouveau et, depuis cinq ans, les Chinois ont retiré  la circulation une bonne vingtaine de millions de « véhicules diesel désuets » ce qui reste insuffisant.

La consommation de charbon est en baisse : moins de 10% dans le bilan énergétique de Pékin. Mais pour éviter la double peine, on a interdit que les camions diesel transportent le charbon : pas utiliser un transport polluant pour charrier un polluant. Ceci n’empêche pas que les chercheurs sont au boulot, par exemple en travaillant sur des nanoparticules susceptibles de diviser par deux la pollution du diesel. Les Chinois ne sont pas idiots et savent que diesel zéro sera impossible. Ils cherchent donc des équilibres.

Mais, bien entendu, les nouveaux équilibres supposent la disparition des anciens et la mort des situations de rente. Voilà bien longtemps que nous savons que le transport routier est un danger écologique. Et qu’il importe de le remplacer, autant que faire se peut par le fret ferroviaire, comme les Suisses qui ne sont pas de sanglants révolutionnaires. Mais toucher au transport routier revient à heurter le « lobby des transports » lequel implique également les pétroliers, les sociétés d‘autoroutes et les constructeurs de poids lourds.

L’ai je vu changer ce monde des transports routiers dans lequel je suis né quand Carrefour n’existait pas et que Vincent Auriol occupait le poste d’Emmanuel Macron. Monde que la SNCF a investi, avec la SERNAM d’abord, puis Géodis. Personne n’a voulu voir la destruction d’un monde où l’essentiel était le service public et le maillage des territoires. En s’emparant du transport routier, la SNCF a pu détruire conjointement le fer et la route. Il suffisait de mettre au premier plan la rentabilité. Quel que soit le moyen choisi, le colis que m’envoyait ma marraine n’était pas rentable.. Alors, on supprime d‘abord le plus coûteux, puis le moins coûteux.

Mais on ne peut accuser la SNCF d’avoir tué le transport routier !! Si. Et d’abord en aidant à la mort de dizaine de petites entreprises, ceux qu’on appelait les « commissionnaires » devenus les « logisticiens du dernier kilomètre ». Vous n’avez pas connu ? Quand un train arrivait dans une grosse gare, il y avait des dizaines de petites voitures qui s’emparaient des colis destinés aux villages les plus proches pour les livrer.. Ces colis se trouvaient dans tous les trains car même les trains de voyageurs avaient un wagon « fret ». Avec l’arrivée de la Sernam, ces centaines d’entreprises sont mortes car la distinction fer/route a été abolie.

Encore une étude à faire pour détruire des idées reçues. Dernier détail : les voitures des commissionnaires ne roulaient pas au diesel. C’étaient des 2CV, des 4L des Juva4. Et parfois elles prenaient un voyageur sur le siège passager. C’était vraiment le bordel !


On en reparlera….

dimanche 25 novembre 2018

ESPELETTE ET GILETS JAUNES

Ho ! Les gilets jaunes ! sortez du symbole ! N’allez plus à Paris ! Ça vous coûte de l’argent. Pour quoi ? Pour aller sur le terrain de l’ennemi, pour vous affaiblir.

Castaner a donné les chiffres : 33 escadrons de policiers à Paris, 29 sur l’ensemble du territoire. Inutile de faire des comptes d’apothicaire : vous avez moins de risques à manifester chez vous, chez vous où vous connaissez mieux le terrain, les bretelles et les rocades, chez vous que l’Etat laisse en jachère pour vous appauvrir. L’avenir de votre mouvement est chez vous.

Les objectifs sont nombreux. Chez vous, il y a 100 préfectures, plus de 200 sous-préfectures, quelques centaines d’hôtel des impôts. Aucun de ces objectifs n’est fondamental, mais leur nombre en font un avantage stratégique. Cent hôtels des impôts qui brûlent et Bercy est désorganisé. 500 péages bloqués et la grande distribution est à genoux tandis que Vinci pleure. Pensez aussi aux Chambres de Commerce, aux Chambres d ‘Agriculture où plastronnent ceux qui détruisent l’environnement et se gavent sur votre pouvoir d’achat. Avec ce qui reste de policiers en région, tous ces objectifs peuvent être atteints sans risques pour vous.

Ne vous focalisez pas sur les régions. C’est dans les capitales régionales que l’ennemi a regroupé ses troupes. Pensez à Espelette. Voici vingt ans, les habitants d’Espelette, exaspérés par la détention de leur curé, ont bloqué la gendarmerie. Un millier d’habitants, vingt gendarmes, ce n’était pas l’affrontement du siècle mais l’Etat a cédé. Dans vos villages, vous êtes plus nombreux que les gendarmes, vous pouvez les enfermer, les rendre inutilisables. Vous les connaissez, vous faites du sport avec eux, vous êtes au conseil des parents d’élèves avec eux, vos femmes font leurs courses ensemble. Vous croyez qu’ils vont vous tirer dessus ? Dans de nombreux cas, ils vous seront reconnaissants de pouvoir sortir d’un affrontement qu’ils ne souhaitent pas. Et vous, vous remettez de l’humain dans le conflit.

Vous imaginez ? BFM annonçant que 2000 ou 3000 gendarmes sont prisonniers des gilets jaunes. Castaner aurait l‘air d‘un vrai con. Il dirait quoi ? Que l’Etat reste ferme ? Vu l’état des troupes, il lui sera impossible d’envoyer des renforts car il ne dégarnira pas Paris. Et s’il veut le faire, vous tiendrez les autoroutes. Si vous voulez du symbole, prenez les véhicules de gendarmerie et conduisez les devant la sous-préfecture la plus proche. Ça fera de belles images avec les gyrophares allumés.

Chers gilets jaunes, vous avez en mains l’arme absolue, celle qui ridiculise. « Qu’ils viennent me chercher » disait le président sûr de sa force. Enlevez la force, il ne restera rien. Rien que des mots dont vous ne serez pas dupes.

En plus, vous n’êtes pas obligés d’attendre samedi. Il doit bien y avoir 4 ou 5000 gendarmeries susceptibles d’être bloquées. Vous pouvez mettre le pouvoir à poil, jour après jour.


Bon, moi ce que j’en dis…..

vendredi 23 novembre 2018

FAISONS TABLE RASE

Demain, ça pète. De manière nouvelle parce que le cadre est nouveau. Le gouvernement est tétanisé. Il est incapable de gérer la situation.

Ça ne va pas péter comme en 89 ou 48. La capitale ne concentrera rien. Un paquet de manifestants, certes, mais bien loin des centaines de milliers que l’on sait gérer. Bien entendu, vu la concentration de caméras et la haute qualité intellectuelle des analystes et observateurs, l’information parisienne monopolisera l’attention pour arriver à la conclusion que ce n’est pas un vrai succès, pas comme le temps où Krasucki attirait un demi million de mecs entre Bastille et République. Mais, la proximité de lieux de pouvoir installera plus de policiers au bord de la Seine que sur les rives de l’Adour. Le stock de défenseurs de l’ordre (établi) n’étant pas extensible, le gouvernement pulvérisera le disponible dans les plus grandes villes. Logique. Hagetmau et Oloron-Ste-Marie ayant été oubliés de l’aménagement seront également oubliés de la répression. Tel est le logiciel de nos administrateurs.

Dans la mesure où les gilets jaunes n’ont pas même les moyens de se déplacer dans la capitale, ils seront nombreux, au total, à ne pas être nombreux sur les milliers de lieux où ils seront pourtant. Chez eux. Comme des poissons dans l’eau. Les analystes ont d’ailleurs ressorti le vieux mot de « jacquerie » que je n’avais pas entendu depuis quelques séminaires au CERM voici quarante ans. Jean Chesneaux apprécierait.

Les gilets jaunes sont d’ailleurs confiants. Ils se savent capables de bloquer le pays car ils savent qu’une artère minuscule peut provoquer un AVC. Un centre commercial ici, une gendarmerie là, peuvent avoir un effet dévastateur par leur nombre. Si un village de 1000 habitants encercle les 20 gendarmes de la caserne locale, les pandores ne leur tireront pas dessus mais ne seront pas disponibles, non plus, pour protéger la sous-préfecture voisine. Etre abandonnés n’a pas que des inconvénients.

Il va de soi qu’aucune de ces manifestations dispersées n’aura les honneurs des chaînes de télé, leur nombre même les desservira médiatiquement. Le vrai danger est là : qu’une image fausse ne vienne dévaloriser la réalité de l’action, faisant passer la société du spectacle au premier rang des instruments d‘analyse.

Le vrai espoir est l’universalité du mouvement. Demain peut nous prouver que des milliers d’hommes se croyant isolés prendront conscience de leur force, ramenant Marx au premier rang des penseurs politiques. Marx et Mao. Le mouvement est rural nous affirme t’on. Serait ce la seconde mort de Li Lisan ?

Le passé a condamné les gilets jaunes. Il est temps de faire de ce passé table rase, de réinstaller une planification, de redonner au politique le pouvoir sur l’économique.

Et de mettre sur pied une véritable force de communication. Etre isolé n’est rien. Se croire isolé peut être mortifère. Et si Facebook était un outil de la Révolution ?


On en reparlera…

mercredi 21 novembre 2018

LA FAILLITE DE L'ENA

C’est une grande nouveauté. La géographie revient en force dans les commentaires sur les gilets jaunes. Rendons hommage à Christophe Guilluy dont la France périphérique a fait école. Ce que les lecteurs de ce blog peuvent lire depuis des mois et des années reprend du service. Il y a un pays de la ruralité et il est majoritaire, même dans les villes. Seisme à l’ENA.

L’ENA, l’école de nos gestionnaires dont on dit en ce moment qu’elle est en cessation de paiement, ce qui plaide pour les capacités de gestionnaires de ceux qui forment les gestionnaires de demain.

Si l’on observe bien le fonctionnement de notre administration depuis la création de l’ENA en 1945, on s’aperçoit que tout a été fait pour simplifier les processus, au nom d’une meilleure gestion. Les énarques ont tout regroupé au nom des économies d’échelle et autres billevesées. Par exemple, les bureaux de poste ou les écoles. Il est vrai qu’il est plus simple de gérer un bureau de poste de chef lieu de canton que la douzaine d’officines qui en dépendait.

Remarquons d’abord que la simplification cache la vraie question. La baisse de trafic d’un bureau de poste ou la baisse d’élèves dans une école est un symptôme qui signale une activité déficiente ou un problème démographique. Soigner le symptôme n’a jamais guéri la maladie. D‘un administrateur, on attend un diagnostic puis un remède. Fermer la poste ou l’école ne corrige rien. Au contraire, le remède aggrave le mal. Le mal est pourtant connu : un excellent géographe l’a décrit dès la fin de la guerre dans son livre Paris et le désert français. Mais Jean-François Gravier souffrait de sa réputation : royaliste, conseiller du Maréchal Pétain, on en a dit pis que pendre. A croire que d’aucuns préfèrent mourir qu’être soignés par un médecin dont ils ne partagent pas les idées politiques.

Une autre remarque doit être faite : le nombre d‘instituteurs est à peu près stable, aux alentours de 300 000. Les administrateurs des années 30 avec leurs plumes sergent-major, leurs encriers violets et leurs fiches quadrillées ne les géraient pas plus mal que les énarques connectés d‘aujourd’hui. S’il y a problème de gestion, il réside donc dans la qualité des cerveaux des gestionnaires, et non dans les outils.

Nous voici confrontés à l’aporie initiale de l’ENA qui produit des administrateurs soucieux de modifier l’objet de leur pratique plutôt que de s’y confronter. Ceci conduit inéluctablement aux regroupements et aux externalisations : quand l’Etat ferme les écoles, le problème des transports scolaires devient inéluctable et s’invite à la table des conseils départementaux ou régionaux. L’administrateur fermeur de classes a réussi son coup : il s’est facilité le travail, a allégé le poids budgétaire qui lui incombe et a refilé le bébé à une autre structure. Le tout en alignant des chiffres qui ne tiennent aucun compte de la santé d’enfants obligés de remplacer dix minutes de marche par une heure de bus, ni de l’accidentalité inévitable. Un gosse blessé ou tué par un bus scolaire, c’est un autre dossier, une autre statistique.

Administrateurs osée par certaines statistiques qui modifient la répartition territoriale des établissements de santé sans tenir compte de l’existence de patients, sauf pour les compter. Administrateurs qui n’ont pas compris que, dans le service public, le seul taux de satisfaction possible est 100% et qu’en obligeant les parturientes à faire 100 km pour accoucher, ce taux ne sera pas atteint.

Mais voilà, administrer un territoire, c’est le connaître, intimement, ce qui suppose des heures de terrain et des semaines de lectures. Ce qui suppose aussi un doute hyperbolique et une inquiétude sans failles. Chercher l’entourloupe, à qui profite la bretelle de la rocade par exemple.

Et croyez moi, on n’y est pas. Pour faire leurs rapports, les sous-prefets ne vont plus aux champs.

On en reparlera.



jeudi 15 novembre 2018

LA TVE......UNE VRAIE TAXE

Je comprends pas. Je rumine une idée simple et je ne comprends pas pourquoi personne n’y a jamais pensé.

On devrait créer une TVE, une Taxe sur la Valeur Ecologique. Mécanisme simple que j’imagine avec les limites administratives actuelles vu qu’il faut pas se compliquer la vie. On ferait payer en fonction de la distance. Au départ le produit hors taxes. Puis :

1/ acheté dans le département de production : pas de taxe.

2/ acheté dans la région de production : taxe + 5%

3/ acheté dans le pays de production : taxe + 10%

4/ acheté  en Europe : taxe + 15%

5/acheté ailleurs : taxe + 20%

Pas se compliquer la vie et pas discuter. T’es maraîcher dans le sud des Landes, tu vends au Pays basque, tu payes. Même si faire venir des fraises de Capbreton, c’est moins loin que de Pau. Dans l’ensemble, ça se régulera. Y’aura des gagnants et des perdants. C’est vrai que certains départements seront pénalisés. Les Landes où il y a plus de producteurs que de consommateurs sont un bon exemple. Pour faire plaisir aux énarques, on peut imaginer un ratio producteurs/habitants qui s’appliquera. Ça sera convenable pour nos administrateurs parce qu’indémerdable. Tout ceci suppose qu’on travaille sur la nourriture, mais on s’en fout : on mange deux fois par jour et on n’achète jamais de chars de combat. Dispenser les chars de combat de TVE n’affectera pas mon budget. Le tien, je sais pas, mais j’imagine.

J’ai pensé à ça en regardant manœuvrer le gros camion qui, toutes les semaines, vient approvisionner le Biocoop à côté de chez moi. Les volutes de fumée endiésélée qui embaumaient l’espace m’ont paru incompatibles avec le préfixe Bio de l’enseigne, va savoir pourquoi.

C’est une idée acceptable parce qu’elle n’emmerde personne à part les acheteurs de la grande distribution qui vont devoir apprendre la géographie. On peut moduler si l’Europe renâcle et considérer que le Bade-Wurtemberg c’est comme l’Alsace ou le Gipuzkoa comme l’Aquitaine. Ça ne changera rien sauf aux marges.

En revanche, l’idée doit bouleverser la géographie des transports. Au lieu d‘acheter des tomates à Almeria et  de les faire transiter par Rungis pour livraison à Bordeaux, on s’approvisionnera directement à Marmande. C’est con ! On n’y avait pas pensé avant !! Les producteurs d‘outre-mer ne seront pas vraiment impactés. Plutôt moins que leur concurrents exotiques, en tous cas.

Les vrais punis seront les habitants des métropoles, ces lieux où on consomme plus qu’on ne produit, mais comme, en général leurs revenus sont supérieurs, ce sera un simple rééquilibrage qui incitera peut être les citadins à préférer le fromage de brebis d’Auvergne à l’héllénique feta.


On en reparlera….

dimanche 11 novembre 2018

LE ROBIN ET LE RABBIN

Puisqu’on parle de Brésil, parlons de Bernanos. Il a calmé la colère que j’avais contre Cassin. Ici, à Bayonne, tous les six mois, on a droit à un hommage à Cassin, surnommé le Bayonnais universel, alors qu’il est moins connu que son compatriote Didier Deschamps.

Cassin, comme beaucoup de Prix Nobel, est une vieille ordure. Pour comprendre ce quasi-blasphème, il suffit de comparer deux textes : la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 et la Déclaration Universelle qu’il a élaborée en 1948. Cassin réintroduit dans sa déclaration des droits comme le droit à la religion que la Convention avait délicatement évacué. Bernanos a bien regardé la genèse de la Déclaration et il y voit une opposition déterminée entre Rousseauistes, fanatiques de l’Homme et Robespierristes obsédés par la préservation de la puissance de la Nation. Et il est patent que les Robespierristes ont tenu la dragée haute à leurs adversaires, de 1789 à 1948. Il n’est d’article où le mot de Nation n’apparaisse.

Quand Madame Roosevelt, chargée du problème dans le cadre de la préparation de l’ONU, confie le problème à Cassin (et à Stéphane Hessel) elle doit glisser quelques instructions contre lesquelles il ne s’indignera pas (Hessel non plus) car le cassinien résultat est un crachat à la figure des Constituants. Cassin réintroduit l’homme de Rousseau dans la Déclaration qu’il transforme subrepticement en Déclaration des Droits de l’Individu. La Déclaration de 1789 mentionnait inlassablement l’Homme(comme concept, non comme genre) et le Citoyen (membre d’une Nation). La Déclaration de 1948 parle seulement de « personne » et admet que cette personne puisse être victime de la Nation. Ainsi le Citoyen est évacué et le triomphe des Rousseauistes est total.

Au moins dans les mots. Les pays « démocratiques » étaient sur-représentés. Cassin, pour plaire aux communistes, ajoute « collective » à « propriété ». Pour les musulmans et les protestants, il admet les manifestations publiques de la religion. Ce sont les droits de Cassin qui permettent aujourd’hui de considérer que la liberté de parole de l’individu surpasse l’intérêt de la Nation et permettront demain, peut-être, de punir le blasphème, droit imprescriptible de l’Homme.. Sauf aux yeux de Madame Roosevelt

Dans l’enthousiasme provoqué par la création de l’ONU, ce glissement sémantique est passé inaperçu, d ‘autant que l’ONU s’était doté d’instruments de coercition qui manquaient à la SDN. On créait une société d‘Etats que leurs citoyens pouvaient attaquer sur des fondements discutables puisque le postulat était que l’Etat menaçait la personne, ce qui semble paradoxal. Il suffit que la doxa s’empare d’un cas et la condamnation est inévitable.

Prenons un cas précis. Le Pakistan adopte la charia comme base juridique. Rien dans la charte onusienne ne l’interdit. Au contraire. L’ONU va accueillir dans ses rangs, l’Inde, le Pakistan ou Israel, pays qui ne font pas mystère de leurs racines religieuses. Cassin l‘a permis. A parti de là, on peut imaginer que ces Etats vont menacer les personnes qui ne partagent pas l’opinion dominante. Oui, mais dans ce cas, ça ne marche pas. Parce que la doxa internationale n’est pas dans le coup. La doxa internationale, c’est celle des USA. Celle qui admet que c’est pas bien de condamner une chrétienne qui a bu de l’eau musulmane (comme si l’eau pouvait avoir une religion), mais qu’on peut enfermer des citoyens qui ont enfreint un interdit religieux.

Tout ceci est passablement incohérent. 60 ans après son admission,  on reproche au Pakistan une attitude qui était en germe dans la dite admission. Quand un Etat se crée sur des bases religieuses,  il va de soi que ceux qui ne partagent pas cette religion seront des citoyens de seconde zone. Mais les Droits de  l’Homme version Cassin l’admettent. Ainsi l’Etat n’est plus une menace vis à vis de croyants différents dans la mesure où il privilégie les croyants qui soutiennent l’Etat.

Cette éradication des critères religieux est devenue la pierre de touche de l’humanisme. On admet que les Saudiens peuvent fouetter un blogueur opposant, par exemple. « On » ce sont les autres membres de l’ONU qui sont censés partager les mêmes valeurs. En réalité, ce qui compte, c’est la majorité. Le système cassinien permet de condamner en tout état de cause car il est aussi peu fiable qu’une religion.

Le hic, c’est que Cassin n’avait pas prévu que les religions deviendraient prégnantes et que leur hiérarchie changerait, au point que la religion est désormais clivante puisqu’elle est acceptée, admise, valorisée. Curieusement, on parle d’états musulmans, mais jamais d‘états chrétiens.

Bref, Cassin  a foutu le bordel en démontant les « vrais » droits de l’Homme, ceux de la Révolution, pour les remplacer par une soupe de mots où les dieux surnagent avec les croutons. Juriste, Cassin était aussi israélite : le robin a t’il cédé au rabbin ?


On en reparlera

mercredi 7 novembre 2018

PRIVÉ-PUBLIC (SUITE)

Bon, la vérité se fait jour. Même dans Sud Ouest. J’y apprends ce jour que 25% des cliniques privées du pays sont au bord du dépôt de bilan. Hé bé !!!

1/ les mecs, ils sont sur un secteur protégé. Leurs clients discutent pas les prix vu que c’est la Sécu qui paie. Bon, ils ont pas les meilleurs praticiens qui sont en CHU mais ça allège leur masse salariale.

2/ ils n’ont aucune obligation. Pas d‘enseignement, pas de recherche, pas de contraintes administratives. Pas d‘intervention complexe non plus. Le privé réalise seulement 4% des transplantations du pays. Les actes de radiologie interventionnelle, délicats et bons pour la Sécu, sont exclusivement du domaine du public.

Ceci pour dire que tous ceux qui vont bêlant que le privé gère mieux que le public devraient fermer leur clapet.

En l’espèce, le privé s’est emparé d‘un service citoyen (la santé) pour y puiser de la rentabilité. Ce n’est pas nouveau. Dès le 19ème siècle, il existait des cliniques privées qui concurrençaient l’hôpital public avec un succès certain. Les temps changent et changent les outils.

La création des CHU en 1958 va bouleverser la donne. L’Etat admet que les divers visages de la médecine doivent cohabiter : les CHU intègrent les activités de soins, d’enseignement et de recherche. Ils attireront mécaniquement les meilleurs praticiens, les meilleurs enseignants et les meilleurs chercheurs, en s’appuyant sur le système sélectif des concours d‘internat.

Dès lors, la concurrence privé-public est morte. Le privé est incapable d‘intégrer à son modèle les activités de recherche et n’a pas les compétences pour l’enseignement. Les subsides de l’Etat lui échappent.  Le système a un effet pervers : la médecine se coagule dans les métropoles régionales qui accueillent majoritairement les CHU. La désertification des provinces en est renforcée. Dans les ville moyennes ou sub-moyennes, les cliniques privées seront assez vite à vendre et commencera la valse des fusions sous l’égide de groupes spécialisés (Capio, Clinifutur, Elsan, etc…).

Il faut bien constater que la santé n’est pas une marchandise. Si c’était le cas, nos valeureux gestionnaires issus des meilleures écoles, afficheraient des résultats flamboyants. En réalité, ils se préparent à faire appel à l’Etat lequel serait stupide de mettre de l’argent dans le secteur privé quand le secteur public a également du mal à assumer en plus ses missions d’enseignement et de recherche.

Dès qu’on sort du strict intérêt du citoyen (santé, éducation, énergie, transports), le libéralisme montre ses insuffisances et ses lacunes.
 Beaucoup (dont moi) pensaient au moins que le privé faisait du fric. Même pas vrai.

Encore un truc à ridiculise le Medef.

On en reparlera…