mercredi 25 septembre 2013

ALLONS ENFANTS DE LA BOUTEILLE…

Je fais (enfin) un peu de rangement. Et je tombe sur un manuscrit, bien oublié, jamais retourné, au titre évocateur : Alcool et Révolution française.

L’auteur est un type sérieux. Michel Craplet, l’un des grands spécialistes français en alcoologie. Non, c’est pas la science de l’alcool, c’est la science des alcooliques. C'est pas pareil.

Le bon docteur Craplet avait préparé ce travail pour le bicentenaire de la Révolution, voilà 20 ans. Et que nous dit-il : toutes les grandes journées révolutionnaires sont des journées d’été où les mecs sont torchés majuscule. Le 14 juillet : assemblée de poivrots dans les bistros du Palais-Royal. Surexcitation maxi style t’es pas cap. Les bouteilles succèdent aux chopines et la bande d’alcoolos a l’idée de prendre la Bastille. Ce qu’ils font avec les suites que l’on connaît.

C’est vachement documenté. Les révolutionnaires pillent les caves (bien fournies les caves des aristos) et se les enquillent pour pas laisser baisser la pression. Tous les grands révolutionnaires (sauf Robespierre, faut être juste) ont en permanence les amygdales qui baignent. Le soir, ils font la fête, ils prennent même des bains de champagne avec les quilles trouvées dans les caves à particule. Plus ils sont bourrés, plus ils dézinguent de l’aristo. Et c’est pareil en province.

Pourquoi je l’ai pas édité ? Parce que le bon docteur Craplet, il a l’air de pas apprécier.Il voit dans la Révolution la main sournoise du Diable.

Moi pas. Je me dis que si le pinard a permis la Prise de la Bastille, alors le pinard doit être exonéré de toutes taxes au nom de la reconnaissance nationale. Que s’il faut être bourré pour balancer un gouvernement injuste, voire félon, picolons mes frères. In vino, justitia…

C’est vrai que quand t’es bourré, tu perds le sens des réalités. Mais faut bien ça pour attaquer les Tuileries gardées par un régiment complet de mercenaires suisses. Si t’es à jeun, t’y vas pas. Si t’es à jeun, t’as la trouille. Tu hésites avant d’abolir les privilèges ou de voter la mort du Roi. Peut-être même que tu le fais pas.

Du coup, je me suis dit que les vignerons du Midi, ils avaient du faire un sort à leur invendable production avant de se taper les gendarmes mobiles ou que les marins du Potemkine, ils avaient du un poil forcer sur la vodka. Je me suis souvenu qu’on filait de la gnole aux poilus de Verdun, toutes ces choses…. Si le gros qui tâche a permis la prise de la Bastille et la victoire de Verdun, alors il faut le magnifier, lui élever des statues, le recommander et oublier la modération. Y’en avait de la modération aux Eparges ?

D’accord, au jour d’aujourd’hui on picole plus pour prendre la Bastille mais pour prendre la route. D’où ma conclusion, la bagnole est incompatible avec la Révolution.

Pas le rouge. Ni le Rouge.

On en reparlera…..

PS : ce texte n'est pas une apologie de l'alcoolisme. C'est un simple remerciement à tous les vignerons, cabaretiers, fraudeurs de l'octroi et autres francs buveurs qui nous ont permis d'avoir la Déclaration des Droits de l'Homme,la République et la laïcité. Entre autres.

vendredi 13 septembre 2013

LA LEGINE

Je suis sûr que vous ne connaissez pas. Et pourtant, ça vaut le coup. C’est un poisson des mers antarctiques (un genre Dissostichus, deux espèces). Très vilain, très carnassier, longtemps célèbre dans les milieux scientifiques parce qu’il produit une protéine antigel et que son cœur bat très lentement. Bon, tout ça, c’est sur Wikipedia. Ce qu'il y a pas sur Wikipedia, c'est l'étymologie. Ça doit être un patois réunionnais ou du breton adapté...Légine... Ça fait penser à des pantalons anglais.

Poisson des mers froides, très froides, poisson à la chair ferme, poisson carnassier, une sorte de brochet de la mer. Les Japonais qui sont mauvais en production d’électricité nucléaire mais très forts en gastronomie marine, l’ont découvert dans les années 90. Découvert et apprécié. Ils l’appellent ookuchi et considèrent que c’est le top du top pour les sushi. Mieux que le thon, c’est dire. Au point que le cours de la légine se porte bien, ça vaut deux à trois fois le prix du saumon. A ce prix, les arnaques ne devraient pas trop tarder. D’autant plus que les USA s’y sont mis : eux, ils la mangent en carpaccio, avec juste un filet de citron. Tout ça pour vous expliquer que la légine a gagné dans les milieux halieutiques, le surnom d’ « or blanc ». Pour les pêcheurs, c’est une bonne nouvelle.

Enfin, pas pour tous les pêcheurs. Ceux qui en profitent, c’est les Réunionnais vu que l’essentiel des populations de légines sont françaises. Elles vivent autour des Kerguelen et de Crozet dans les zones de pêche exclusives françaises. Ceci pour tous les couillons qui se demandent pourquoi on s’emmerde à garder ces cailloux paumés qu’on peut même pas y envoyer des touristes. Et donc, sur les 18 000 tonnes de quotas annuels autorisés, la France a droit au tiers. Calcul facile : 6000 tonnes pour un poisson qui vaut aux alentours de 150 000 € la tonne, ça fait un marché de 150 millions d’euro. Regarde une carte : les Réunionnais, ils sont à côté, quasiment, ils en profitent. Vu le prix, faut surveiller, les pirates abondent.

Les Réunionnais, ils sont aussi plus près du Japon que de la mère-patrie. Ça tombe bien, c’est les Japonais qui raquent. Je trouve ça un poil injuste : c’est chez nous qu’y a un poisson délicieux et il file à Tôkyô et pas à Rungis. J’en ai jamais mangé mais celui qui m’a mis au parfum, il m’a raconté. Paraît que le turbot et la lotte, à côté, c’est rien que du bas de gamme. J’en salive. La chair très ferme, facile à découper, les filets que tu lèves sans même t’en apercevoir, un goût très net de sel marin. Merde ! une merveille comme ça pour des Ricains qui vont le bouffer en buvant du mauvais chardonnay de Sonoma, c’est margaritas ante porcos…..

Un peu de protectionnisme m’irait bien. Parce que le protectionnisme en général, on pense que c’est réglementer les achats. Mais ça pourrait être tout aussi bien freiner les ventes. Pas filer aux autres ce qui nous fait la vie belle au motif qu’ils ont du blé. Les Nippons, ils m’ont déjà fait le coup avec la pibale. La délicieuse pibale de ma jeunesse, j’ai quasiment plus les moyens de me la payer. Les Japonais en raffolent, tout file vers Fukushima à des prix caviardesques. Et voilà qu’ils recommencent avec la légine. Tout en pourrissant le marché du thon. Et en remplaçant dans nos restos, la lamproie à la bordelaise par le sushi industriel. C’est des coups à te faire monter la colère, je trouve. A justifier Hiroshima... Ho ! les fils d'Amaterasu, vous z'êtes pas les seuls à aimer le poisson ! Calmez vous. Moi aussi, faut que je me calme...

Bon, le premier qui trouve de la légine sur une carte me fait signe.

On en reparlera….

mercredi 11 septembre 2013

ANTONIO BADAN, MON AMI

Quand il venait à Paris, une fois l'an, il poussait la porte de mon bureau avec ce sourire timide et ironique qui le caractérisait. On filait tout de suite dans une brasserie. Il en avait besoin.

Si vous cherchez Antonio sur Google, vous risquez de lire un gros paquet de sottises. Antoine (car je l’appelais Antoine) était né à Mexico d’un père suisse et agent de voyages et d’une mère adorée, née dans le quartier Mouffetard. Il avait les trois nationalités et ça le faisait marrer. A sa retraite, son père avait décidé d’acheter un ranch pour y produire des caroubes destinées à Nestlé (la fibre suisse, bien entendu). Au cas où vous ne le sauriez pas, la caroube broyée entre largement dans la composition des boissons chocolatées. Ça coûte dix fois moins cher que le cacao, visez le bénéfice.

La famille s’est donc installée dans la vallée de Guadalupe, près d’Ensenada, en Basse Californie aride. Madame Badan s’est empressée de créer une Alliance française et d’enseigner la langue de Molière à toute la riche bourgeoisie d’Ensenada. Je garde le souvenir d’un dîner avec ses élèves au restaurant El Rey Sol (existe t-il encore ?), devant un Plan de Paris à vol d’oiseau où tout le monde s’échinait à parler le mieux possible avec les « Français de France ».

Puis s’effondra le cours de la caroube. Puis mourut Monsieur Badan et Antoine se retrouva avec sa mère et sa sœur Nathalie à la tête d’un domaine ingérable et déliquescent. Il s’en fichait un peu. Océanographe de haut niveau, le Docteur Antonio Badan gérait toute la recherche mexicaine, notamment sur le Golfe Caraïbe et le Gulf Stream qui était sa spécialité. Sur ce courant, il était intarissable. Il me conta un jour comment ils avaient perdu le Gulf Stream à la suite d’une période cyclonique. Plus d’un mois sans Gulf Stream. « Mais tu as trouvé la raison, Antoine ? »… « Non, j’ai trouvé une explication, ça suffisait ».

Lors d’une de ses visites, Antoine me raconta son projet. Créer à El Mogor, le meilleur vignoble mexicain. Ça l’obsédait. « J’ai pratiquement les mêmes sols que dans les Graves ». Car Antonio était avant tout un scientifique. L’idée lui était venu car, à quelques encablures, Domecq possédait les Bodegas Santo Tomas, premier producteur de vin mexicain. Domecq avait créé le vignoble dans les années 1920 avec de la main d’œuvre géorgienne et ukrainienne ayant fui la Révolution russe. Voir une église orthodoxe dans le désert mexicain, c’était assez sympa.

Toutefois, avant de se lancer, Antoine avait étudié le domaine sous toutes ses coutures. Il en avait surtout réalisé une magnifique couverture pédologique pour délimiter ses parcelles. Il disposait en outre d’un atout majeur. Son père avait créé une irrigation au goutte à goutte pour ses caroubiers. L’eau était disponible et gérable au millimètre cube. Antoine était un écologiste fanatique, comme la plupart des scientifiques de son envergure. Il n’avait négligé aucun paramètre, de la pédologie à la vinification. Il prévoyait aussi de créer des chambres d’hôtes, avec une piscine. A filtration biologique, ça va de soi.

Bordeaux était sa référence. Il avait multiplié les voyages, les études, mobilisé ses collègues et, enfin, il se lança. « Tu comprends, je suis Français. Je veux faire un vin français, un vin d’assemblage, un vin qui soit comme moi. Tu comprends ? » Tu parles si je comprenais….

Les études ne suffisent pas. Il y eut quelques tâtonnements, quelques erreurs, des problèmes de vinification mais en quelques années, Antonio réussit. Je le revois encore avec en mains une bouteille de Mogor-Badan de l’an passé. « Laisse le vieillir un peu, qu’il développe ses arômes ». Antoine ! Me connais tu si mal ? On l’a bue sur le champ, en la commentant. Effectivement, elle aurait été mieux avec quelques années. Mais voilà… Je l’ai bue avec toi. Toi qui as eu la mauvaise idée de mourir. Si je l’avais laissée vieillir, je l’aurais bu seul. Sans toi. J’ai bien fait. Les vins de garde, ça permet pas de garder les copains, alors, à quoi ça sert ?

Aujourd’hui, le Mogor-Badan est l’un des plus grands vins mexicains. Avec des cépages bordelais essentiellement, plus une touche de chasselas suisse pour les blancs. On ne se refait pas. Nathalie a repris le domaine sur des bases solides. Ses vins ressemblent à son frère. Etudiés, analysés, raisonnables mais également rieurs. Des vins pour le plaisir. Cette espèce d’équilibre inné qu’avait Antoine, raisonnable comme un Suisse, délirant comme un Français, fou comme un Mexicain. Ne laissant rien au hasard mais capable d’emprunter les chemins où personne ne se risquait. Ancré dans la terre mais rêveur comme le marin qu’il était aussi. Les vignerons marins, c’est rare, admettez…

Voilà quatre ans qu’il est mort et j’avais envie d’en parler.

Mais on n’en reparlera pas….

mardi 10 septembre 2013

LA SOUTANE ET LA BURQA

Nous aurons mis une bonne cinquantaine d’années à débarrasser nos rues des soutanes et cornettes. Encore n’y eut-il rien à faire puisque c’est le Vatican qui s’est chargé de l’essentiel en imposant de nouveaux costumes à ses serviteurs. L’époque où les vieux laïquards ricanaient en croassant au passage d’un curé enjuponné est bien terminée.

Si les vieux laïquards faisaient ça, c’est parce que ça les dérangeait de voir des signes ostensibles de religion dans l’espace public. Dans les églises ou les couvents, ils toléraient vu qu’ils n’y allaient jamais. Mais quand ils prenaient leur absinthe sur la terrasse du Bar du Commerce, ça les dérangeait. Vraiment.

On s’est débarrassé des soutanes et cornettes et voilà qu’arrive la burqa. On n’en finira donc jamais ! Il faudra donc toujours qu’un individu, mâle ou femelle, vienne nous jeter à la figure qu’il est différent de nous parce qu’il croit en Dieu. Que ce soit le même Dieu ou pas ne change rien à l’affaire.

Je pensais à ça sur la plage de La Ciotat où, pour la première fois, je voyais des dames se plonger dans l’eau enveloppées d’une ample robe noire et voilées de surcroît. Mieux encore, l’une des susdites était accompagnée d’une gamine d’une quinzaine d’années, habillée de même quoique non voilée.

Ma réflexion était pourtant incomplète car il y a entre soutane et burqa, une différence essentielle. La soutane ou la cornette sont portées par des professionnels de la chose divine, curés et bonnes soeurs, dont c’était quasiment l’uniforme ou le vêtement de travail. Quelque chose comme le tablier du boucher.

Pas la burqa. Elle est portée par des laïques, des non-clercs. La soutane marquait le clergé, pas la burqa. Raison pour laquelle elle est encore plus insupportable. Elle étale le triomphe de la religion dans le champ du personnel, de l’intime. Comme certaines breloques religieuses, même si elles sont plus discrètes (croix pour les unes, colombes du Saint-Esprit pour les autres). Comme la kippa ou les anglaises des loubavichs.

Tous ces signes sont là pour me dire que la personne que je croise n’est pas comme moi. Ou moi pas comme elle. Alors que je ne lui demande rien. Que je ne veux rien savoir d’une chose qui m’est totalement étrangère et qu’ils appellent la Foi. Entre eux et moi, tous ces gens creusent un fossé.

Et après, ils s’étonneront si j’ai des réactions excessives. Ou pas de réaction. Ce brave Dalil Boubakeur, à propos de la Charte de la Laïcité, s’offusque : « On voit bien que c’est dirigé contre nous ». Ben oui. Parce que c’est vous qui ramenez la religion sur la place publique. Les autres, ils s’efforcent de faire profil bas, plus ou moins ou plus ou moins bien. Pas vous. Vous, vous m’imposez vos voiles et vos barbes.

Mon premier voyage au Maghreb, j’avais pas vingt ans. On y allait en deuch’ ou en 4L vu que l’avion, c’était denrée de luxe. Au fil des années, j’ai vu l’emprise se renforcer, les interdits augmenter. L’Algérie des années 70, c’était assez cool. On faisait que traverser pour aller plus au Sud, mais ce qu’on voyait était plaisant. A part l’armée et la gendarmerie, mais bon, ça c’est partout. Tu voyais pratiquement que des filles habillées normalement, ni burqa, ni minijupe. La burqa, ça voulait dire que c’était une vieille. Tu pouvais commander une bière sans te faire engueuler et les mecs te laissaient pas tomber pour aller à la mosquée. Idem au Maroc, avec le kif en plus.

Ce sentiment de liberté, on le retrouve plus. Enfin, moi, je le retrouve plus. La religion est le matériau de la plupart des conversations politiques ; loin de régresser les signes religieux sont de plus en plus visibles. Tant pis. Le monde est vaste, j’irais ailleurs.

Remarque, je dis le monde est vaste, c’est juste une manière d’enfiler les clichés. Déjà que les bonzes me gavent, que les prédicateurs américains m’ont fait fuir et que les vaches ne sont sacrées que dans mon assiette, le monde, il a plutôt tendance à rétrécir, en fait.

Y’a que le village de mon enfance qui a progressé. Quand j’étais môme, y’avait un curé et un groupe de bonnes sœurs qui vivotaient en fabriquant des hosties. Tous morts et pas remplacés. Reste l’église, sympa mais qui appelle pas à la crise mystique avec ses statues de Jeanne d’Arc et du curé d’Ars (je compte pas Bernadette Soubirous, c’est une voisine). Il serait content l’oncle Adrien, lui qui rêvait de voir son village sans la Calotte. C’est fait, Tonton !!!! C’est pas beau le Progrès ?

On en reparlera…

lundi 9 septembre 2013

ALLAH ET ALAOUITES (2)

Il faut donc revenir à la Syrie, ancien protectorat français, ne l’oublions pas, puisqu’aussi bien, il semble acquis qu’on va s’en mêler. Profitons-en pour lire cette superbe lettre d’un ambassadeur retraité à François Hollande (http://tunisitri.wordpress.com/2013/09/07/syrie-la-lettre-dun-ancien-ambassadeur-de-france-a-francois-hollande.html) au détour de laquelle on pêche l’information cachée que l’Arabie Saoudite aurait fourni des armes chimiques à la coalition anti-Bashar. Vrai ou faux ? Je suppose que l’ambassadeur, professionnel de la chose, a vérifié.

Je doute hyperbolique, façon Descartes. Le consensus est trop large. Quand tout le monde désigne un coupable, je doute, surtout quand les preuves fournies sont minces et, peut-être, forgées. Voilà deux ans que les médias désignent Bashar, comme ils désignaient Saddam et Mouammar. Ou le shah d’Iran. A coup d’images essentiellement, d’images d’enfants gazés ou de blessés bien saignants. En nous prenant aux tripes. C’est ça qui me fait douter, qu’on essaye de me prendre aux tripes. Qu’on refuse de m’expliquer, qu’on m’assène une coalition sans m’expliquer soigneusement qui en fait partie et qu’on me donne comme seule motivation le bonheur du peuple syrien. J’écoute le discours et j’ai le sentiment qu’on me berlure. Jamais, on ne me présente de partisans de Bashar. Jamais. Or, il en a. Pourquoi ne jamais leur donner la parole ? Juste que je me fasse une idée plus précise. Bon, j’ai quelques copains, syriens et partisans de Bashar, ça m’aide.

Il y a deux ans, j’écrivais ça : http://rchabaud.blogspot.fr/2011/11/allah-et-alaouites.html. Fondamentalement, j’ai pas changé. Faut dire que mes copains syriens, ils sont majoritairement chrétiens, alors ils balisent sec. Et donc, je suis un peu partisan aussi. C’est rigolo, un laïc comme moi en train de défendre une religion. Ouais, mais en face, c’est une autre religion. Et vachement plus prosélyte. A tout prendre, je préfère ceux qui essayent pas de me convertir. Et avec qui je peux partager un Saint-Emilion. J’aime pas les abstinents. On commence par s’abstenir de vin, on finit par s’abstenir de vivre.

Je doute. Le Qatar et l’Arabie saoudite, gros clients bien gras, bien riches, soutiennent la coalition. Et si les principes humanistes cachaient une grosse envie de business ?

Je doute. Israël a peur d’un axe chiite qui va de l’Iran au Hamas. Israël doit penser que les sunnites sont plus fréquentables. Attends un peu, Israël, et tu verras. Et si les principes humanistes cachaient un jeu diplomatique avec des intérêts cachés ?

Je doute. Poutine et Xi Jiping font profil bas. Poutine, un peu moins. Quand la Chine se tait, je doute. Qu’est ce qu’ils nous préparent ? Et si la Syrie venait remplacer la Corée dans le jeu stratégique (http://rchabaud.blogspot.fr/2013/04/la-coree-et-la-crucifixion.html) ?

La cerise sur le gâteau, c’est quand je vois arriver Kouchner sur les plateaux. Kouchner, le gros menteur qui affirme qu’il est quasi l’inventeur du devoir d’ingérence alors que le premier à l’avoir théorisé, c’est Léon Blum, dans A l’échelle humaine (Gallimard). Mais Léon Blum passe plus à la télé, alors…

Et puis j’aime pas le mot de Hollande : punir. Mais pour qui il se prend ? Punir. Il est l’instit’ du monde ? Qui lui a donné le droit de « punir » ? Il y a des états-maîtres et des états-élèves ? Depuis quand ? Il met Bashar au piquet ? Pourquoi pas Merkel ?

Rien que ce mot prouve que l’argumentation est faible, médiocre, anorexique. (Trois adjectifs, Proust serait content). Où est l’intérêt de la France dans une « punition » ? Il oublie que c’est pour ça qu’on l’a élu, pour préserver nos intérêts, pas pour se construire une image de chevalier blanc à l’usage des médias. Finalement, je regrette.

Et puis cette idée de mener une guerre « propre » avec des « frappes chirurgicales ». Tu crois que Bashar, il a pas des missiles capables de nous flinguer quelques pilotes ?

On n’a pas fini d’en reparler…