mardi 31 juillet 2012

L’EXIGENCE…..

Nous n’avons plus aucune exigence. Le médiocre nous satisfait. Si le médiocre est un peu moins médiocre, ça va bien.

L’avantage des réseaux sociaux, c’est qu’ils sont une magnifique caisse de résonance des stéréotypes et des médiocrités. Tout le monde s’auto-congratule, s’auto-encense, met en avant des vacuités ahurissantes. C’est déjà comme ça dans la vraie vie, mais sur Internet les limites explosent.

Une artiste espagnole crée une sculpture où quelques milliers de livres collés les uns aux autres débordent d’une fenêtre. Commentaires affligés : mais où va le livre ? où va la culture ? Personne ne pose la vraie question : sont-ce des livres ? Dans la plupart des cas, ce sont simplement des produits éditoriaux, des choses qu’on fabrique pour assurer le chiffre d’affaires des éditeurs et des libraires, des trucs qui ne passeront pas l’épreuve du temps qui reste, encore et toujours, la pierre de touche de la culture. Bien sûr, ça ressemble à des livres. Papier, typographie, c’est bien un livre. Ben non. Pour savoir, il suffit de se poser les vraies questions. Est-ce que l’auteur finira dans le Lagarde et Michard ? Si la réponse est non, alors il y a de fortes chances que ce ne soit pas un livre. Le vieux libraire que je suis aime à regarder en arrière. André Soubiran, vous vous souvenez ? Des millions d’exemplaires vendus dans les années 1960. Des histoires de médecins et d’infirmières sans aucun intérêt. Disparu dans le gouffre du temps. Soubiran n’était pas un écrivain, juste un raconteur d’histoires. Son succès ne disait rien, ne prouvait rien. Les livres de Soubiran n’étaient pas des livres mais des produits. A la même époque, Robbe-Grillet écrivait Les Gommes. Qui a passé l’épreuve du temps ? Bien entendu, Robbe-Grillet était plus difficile à lire, plus « prise de tête » comme disent les imbéciles qui n’ont toujours pas compris qu’un livre, c’est précisément fait pour prendre la tête, la remuer, l’agiter et la laisser différente de ce qu’elle était avant la lecture de ce livre. Un livre, c’est fait pour penser. Sinon, c’est simple, c’est pas un livre.

J’ai eu pas mal de voitures dans ma vie. Des merdes. Des voitures médiocres, les voitures du quidam de base. A trente ans, je leur trouvais des qualités. « Elle est bien ta voiture ? ». Oui, bien sûr. Tu crois que j’aurais dépensé tant d’argent pour acheter une mauvaise voiture ? Je suis pas idiot quand même. La vérité, c’est que les vraies voitures, j’ai jamais eu l’argent pour me les offrir. Encore n’est-ce pas seulement une question d’argent. Pour trouver une AC Cobra Shelby, il faut être riche, patient et passionné. Nous conduisons tous, non les voitures que nous avons choisies, mais les voitures que nos moyens nous permettent. Il y a moins de Ferrari que de Porsche dans les parkings, même à Puerto Banus. On fait avec ce qu’on a….

Internet regorge de sites dédiés au vin. Tout le monde nous y propose des « découvertes », des vignerons incroyables, des petits vins à 15 € la bouteille. Tout ceci suscite une superbe littérature où on trouve au vin des arômes de tout, de mûre, de noisette, de vanille…. mais jamais de raisin ! Là encore, je n’ai bu que très peu de grandes bouteilles : un Yquem 47 mais le souvenir en est lointain, un Romanée-Conti, quelques Petrus, un Cheval-Blanc, deux ou trois Haut-Brion, un Maury exceptionnel (75 ans de foudre). Quand tu mets ton nez dans le verre, la différence explose. Mais voilà : rares sont ceux qui ont les moyens de boire du Haut-Brion à tous les repas. Alors, on fait avec des ersatz, on s’accommode, on se débrouille, on cherche le rapport qualité-prix sans admettre que le rapport peut être bon avec une qualité médiocre. Ben oui ! C’est un rapport. Si la qualité est médiocre et le prix médiocre, le rapport peut être bon. Oui, me disent mes copains mais c’est pas tout à fait ça, tu comprends bien ce qu’on veut dire.

Ben non, je comprends pas. Un rapport est un rapport. Si tu violes les mots, tu violes la pensée. Ce que veulent dire mes copains, c’est que tu mets 15€ mais tu en as pour plus que 15€, question plaisir. Ouais. Dans ce cas précis, ton plaisir, il vient pas du vin, il vient du discours que tu tiens autour. T’as vu si je suis bon pour dénicher des vins de qualité ? Et le vigneron il est extra, enraciné dans son terroir, fou de son histoire et de son domaine. Et bla, et bla et bla… Mets ton nez dans un grand Saint-Emilion, tu verras si t’as envie de parler…

Tout ceci me ramène définitivement à Bouvard et Pécuchet. Les deux copistes de Flaubert ne savent rien, rien d’autre que parler. Ils servent de caisse de résonance aux stéréotypes du temps. Et toutes leurs tentatives de savoir échouent piteusement parce que le savoir se défie des stéréotypes. Parce que comprendre, c’est aller au delà du stéréotype, le contourner et le détruire. L’Histoire du Savoir est pleine de ces destructions. Voilà belle lurette qu’on n’explique plus les maladies par la théorie des humeurs.

Penser, c’est se mettre en danger. S’isoler. Se retrouver seul contre tous. Et en plus, ça ne suffit pas. On peut être seul contre tous et avoir tort quand même. Personne n’a envie de courir ce danger.

Alors, on fait semblant. On accepte la doxa. Avec ce paradoxe : on admire ceux qui sont allés contre la doxa et qui ont gagné. Pasteur est un bon exemple. Personne ne se demande : comment aurais-je réagi, moi, bon petit penseur conformiste face à la théorie pastorienne ? Il est vraisemblable que je l’aurais rejetée. Comme j’aurais ri de Van Gogh et comme j’aurais voté pour Pétain.

Dites ça, vous verrez la levée de boucliers. Tu acceptes la doxa de ton temps. Aujourd’hui, c’est de dire que Pasteur avait raison, que Van Gogh est un grand peintre et que Pétain était un traître. Il y a gros à parier que si tu acceptes la doxa de ton temps, tu aurais aussi accepté la doxa d’un autre temps. Ça te défrise ? Alors, essaye de prouver que tu ne suis pas le troupeau.

On en reparlera…

mercredi 25 juillet 2012

LE MODELE ALLEMAND

Je commence à en avoir plein le dos de l’admiration hyperbolique du modèle allemand. Plein de trucs remontent en moi, des discours prononcés il n’y a pas si longtemps et qui décrivaient l’Allemagne (le Grand Reich) comme un modèle de vertu, d’organisation, de discipline. Ein Volk, ein Reich, ein Führer.

Ne faites pas la moue. C’est pareil. Ils sont riches parce qu’ils sont disciplinés, organisés, travailleurs. Pas comme nous, les Latins, branleurs, truqueurs, fainéants et qui veulent jouir par le plaisir. En Prusse, c’est le travail qui fait jouir, il paraît. Et donc, on n’a que ce qu’on mérite. J’admets, les Grecs, ils sont pas vraiment Latins, mais c’est tout comme. Le Latin, il paye pas ses impôts, c’est même à ça qu’on le reconnaît.

Les Boches (faut appeler les choses par leur nom et se souvenir que Bécassine pensait que les Boches habitaient la Bochie, délicieux souvenir du délicieux Pichon), les Boches, ils ont pas le même fonctionnement que nous parce qu’ils n’ont pas les mêmes problèmes que nous.

D’abord, ils n’ont pas d’armée. D’accord, on leur a interdit, mais quand même, le différentiel entre leurs dépenses militaires et les nôtres, c’est grosso modo 20 milliards de dollars par an. Moyennant quoi, on s’est engagés à les défendre. On casque pour les protéger, normal qu’ils casquent pour nous aider. Tiens ! « casquer » va bien sur ce coup militaire.

Ensuite, ils ont la natalité en berne. Grosso modo 14% de moins de 15 ans dans la population alors qu’on flirte avec les 20%. Ça coûte cher les gosses. Faut offrir un suivi médical à la maman, faut des maternités, des écoles, des enseignants, des universités. Forcément, ça fait des sous qu’on dépense et pas eux. Comme en plus, les dépenses sociales, ils sont pas fanatiques vu qu’ils sont un peu luthériens, forcément y’a un gros différentiel. Comme préparation de l’avenir, il y a mieux, je trouve.

Armée, santé, éducation, ça explique le différentiel des dépenses publiques. C’est pas qu’ils gèrent mieux, c’est qu’ils n’ont pas les mêmes choses à gérer. Pas d’écoles, pas de casernes, ça facilite la vie du Ministre chargé de payer.

On a Dany-le-Vert qui vient nous expliquer qu’en plus, ils ont la fibre écologique et pas nous. Tu parles ! Plus de 40% de l’électricité produite par des centrales à charbon, je trouve pas ça très écolo. Dany, il fanfaronne comme quoi, les Boches aiment pas le nucléaire. Et pour cause ! On leur a interdit en 45. J’appelle pas ça un vrai choix de société. Alors, ils émettent des gaz à effet de serre, le double de nous en gros. Je veux bien qu’ils soient écolos, mais les chiffres plaident pas en leur faveur.

Le Boche, c’est pas un bosseur fanatique. Il est comme nous. Va sur les plages landaises en juillet, tu verras. Ou à Ibiza. Les Boches, ils font une fête pas possible, ils picolent comme nous, ils draguent comme nous, ils déconnent comme nous. Et chez eux, c’est pareil. Ils produisent pas plus, ni mieux. C’est juste que leur gouvernement, il ne dépense pas comme le nôtre, il n’a pas les mêmes contraintes, ni les mêmes obligations.

Alors, arrêtons. Arrêtons les comparaisons stupides. Ni eux, ni nous, n’avons le choix. Nous sommes bien obligés de payer pour nos gosses. Pour l’armée, ça se discute mais si, demain, on cassait le budget de la Défense, je suis bien sûr que la Teutonne turriforme viendrait chouiner qu’on met l’Allemagne en danger.

On en reparlera…

mardi 17 juillet 2012

ET LA MORALE ?

On vient d’en parler, on en reparle déjà. C’est que le sujet s’impose. Le sujet, c’est PSA. Il y a une sorte de consensus sur le sujet. PSA s’est planté de stratégie. Pas assez asiatique, trop axé sur le marché national, trop obsédé par le diesel. Les commentateurs commentent, le gouvernement contrôle ce qu’il peut et les salariés balisent.

Faut le dire : les raisons, on s’en fout. Le diesel, le marché national, on s’en fout. Il faut regarder ce qui s’est passé.

Ce qui s’est passé est très simple. Le management s’est planté et les raisons du plantage ne nous regardent pas. Il s’est planté avec l’accord du Conseil d’Administration. Les actionnaires, en tête desquels la famille Peugeot, ont avalisé toutes les bonnes et mauvaises raisons, toutes les bonnes et mauvaises décisions.

Et aujourd’hui que les mauvaises décisions reviennent comme un boomerang, ils trouvent la solution la plus inique, la plus amorale, la plus dégueulasse qui soit : ils en balancent la responsabilité sur leurs salariés. Mais les salariés n’y sont pour rien ! Ils ont fait ce qu’on leur a dit de faire, au moment où on leur a dit de le faire. Pas grave : la direction se plante, le prolétaire paie. Et plutôt deux fois qu’une vu qu’on parle d’une aide de l’Etat.

C’est caricatural. Le discours du Medef, c’est responsabilité d’abord. Surtout quand on gagne des sous. Quand on en perd, la responsabilité se dilue comme le pastis dans l’eau fraiche. Quand je gagne, je suis bon, quand je perds, c’est la faute à pas de chance, au marché mondial et à l’euro qui est jamais comme il devrait être. Et du coup, on va demander à l’Etat de payer les erreurs qu’on a faites. De qui se moque t’on ? Elle est où la morale de cette famille huguenote ? Il est où Weber avec sa morale protestante liée à l’esprit du capitalisme ?

Montebourg va recevoir Varin. Il va lui dire quoi ? C’est pas bien ce que vous faites ? Mais l’autre, il s’en tape de se faire gronder. C’est juste un mauvais moment à passer. Après quoi, il tendra la sébille. Quand on n’a pas de morale, on n’a pas, non plus, de dignité. Certes, ils ont tous deux des communicants grassement payés qui vont nous dorer la pilule.

Rêvons. Rêvons d’un ministre réellement à gauche qui dirait : « Tu fermes pas l’usine. Si t’en veux plus, on la confisque ». Ou bien : « T’as plus les moyens ? Pas grave. Donne nous les clés de la maison. Nous, on a les moyens de réinvestir. On va faire la Régie Nationale des Usines Peugeot. On a déjà fait, on sait faire ». Une vraie morale : t’as perdu, t’es à poil. Comme n’importe quel artisan qui passe au Tribunal de Commerce.

Mééééh ! va bêler Parisot. C’est pas pareil, c’est plus gros. Ben si, c’est pareil au niveau des principes. La taille n’a rien à voir à l’affaire. Je parle simplement de principes, ces principes dont on nous rebat les oreilles. Les coquecigrues qu’on nous fait avaler. Le capitalisme créateur de richesses, par exemple. Certes, quand tout va bien. Sauf que quand tout va bien, n’importe quel système crée de la richesse. Et depuis le temps qu’on le pratique, le capitalisme, on sait comment il fonctionne. Privatisation des profits, mutualisation des pertes. C’est simple et ça marche toujours.

Le plus étonnant, c’est qu’à part l’extrême gauche personne ne le dit. Il y a un consensus mou, politique et social. Une sorte d’égoïsme généralisé : dès lors qu’on me laisse des miettes, le système est bon. Puis vient le moment, où il n’y a plus de miettes. Je crois bien qu’on y est. Voilà trente ans que les managers rognent sur les miettes. Bien entendu, comme c’est des miettes, on ne s’en aperçoit pas.

Comment ça marche les miettes ? Simple. Le manager baisse les coûts. Tu gagnes du pouvoir d’achat. Et donc, la petite augmentation d’impôts pour payer les nouveaux chômeurs, tu l’avales sans soucis. Belle rasade de miettes. Et puis, la concurrence étant ce qu’elle est et la main du marché dans la culotte de ma sœur ce qu’elle doit être, le manager, il doit encore plus baisser les coûts. Ça s’appelle la baisse tendancielle du taux de profit. Du pouvoir d’achat, t’en gagnes de moins en moins. Par contre, du chômeur, t’en payes de plus en plus. T’as plus de miettes. D’autant que le manager, il optimise. Il balance ses bureaux ailleurs, son siège social et les impôts qui vont avec, aussi. Te voilà pris dans une spirale infernale. Mécaniquement, tes impôts augmentent. Le pouvoir d’achat que tu gagnes n’est plus compensé.

Normalement, ça glisse tout seul. Une petite usine ici, un sous-traitant là, rien qui mérite que François Lenglet s’indigne. Vient le moment où ça ne suffit plus. Et vlan ! on ferme Aulnay. Faut voir les explications de Peugeot. C’est le moins pire. Les autos, on va les construire en Slovaquie. Après, on les importera. Pas bon pour la balance commerciale, mais ça, c’est pas le problème de Peugeot, c’est le problème de Montebourg. Pour faire bref, ton problème.

J’ai un souvenir très précis de la campagne pour Maastricht. Le patron de Peugeot, Jacques Calvet à l’époque, proclamait que Maastricht, c’était bon pour la France. C’est ce qui m’a déterminé à voter contre. Je suis pas trop pigeon : si c’est bon pour Peugeot, c’est pas bon pour moi. D’ailleurs, le traité à peine sec, Peugeot s’installait en Slovaquie. La mort d’Aulnay était programmée. La hausse de mes impôts aussi.

Quand on dit qu’il y a une morale sociale, on passe pour un vieux con. Le pire, c’est quand on le dit aux héritiers autoproclamés de Jaurès. Héritiers qui se vautrent dans l’oligarchie et jouissent de parler d’égal à égal avec des dirigeants qu’ils envient. Robespierre, reviens !

On en reparlera…

dimanche 15 juillet 2012

LES SAINTS ET LES ANGES

Horreur ! Corne au cul ! (c’est pas un gros mot, juste une citation d’un grand auteur que j’adore). Voilà t-y pas que les musulmans détruisent les tombeaux de saints musulmans. L’Occident s’effarouche comme une vierge . Ça doit pas être de l’islamiste pur jus, ces gens là.

Ben si justement. Et même plus pur que pur. Dans l’Islam, il n’y a pas de saints. Pas du tout. Y’a même pas d’intercesseur. Dieu (Allah pour les intimes), tu lui causes en direct. Et il te répond de même. Pas de brouillage sur la ligne.

Mais, pas du tout, bêle l’ancien touriste. J’y ai été, moi, en Algérie, et au Maroc, et en Tunisie. Y’en a partout des tombeaux de saints. Non. Y’a des tombeaux de mecs qu’on a choisi pour intercéder. Nous, on appelle ça des saints, vu qu’on a le mot et que le fonctionnement semble le même. Mais c’est pas des saints. Religieusement, c’est que dalle.

L’islam, le judaïsme et le protestantisme partagent ça : personne entre moi et Dieu. Nous, les cathos, on a gardé ce côté un peu primitif. Paysan et méfiant. On contemple Dieu et on se dit qu’il a vachement de boulot. Tous ces mecs qui prient, l’un pour avoir plus de thune, l’autre pour que sa vache vêle bien, celui-ci pour trouver la femme de sa vie ou le coup de sa soirée, comment il fait Dieu pour s’y retrouver ? Il doit se faire aider, c’est pas possible autrement. Et donc, on a inventé le Saint. Le Saint, il est au Paradis, près du pouvoir. Il est Saint, alors Dieu, il doit bien l’écouter un peu plus que les autres. En tous cas, plus que moi, chiure de mouche dans l’océan du Temps. Le Saint, il est spécialisé. Antoine de Padoue, c’est les objets perdus. Vincent de Saragosse, c’est la vigne. Roch, c’est la lèpre et les chiens. Chacun son truc. Et donc, t’augmentes l’efficacité quand tu t’adresses au Saint. Il connaît ton problème et il est près du Grand Dabe. Ça marche mieux, en principe. En plus, au début du christianisme, c’était pratique. Ça permettait de recycler les dieux d’avant. Mars est devenu Martin, patron des soldats. Le païen de base, il gardait ses repères. C’était plus un Dieu, mais tout comme.

Au Maghreb, les musulmans, ils ont été en contact avec le culte des saints. Et, ils se sont dit que c’était pas con. Le mec qui a été un grand religieux, au Paradis, il doit avoir accès plus facilement à Allah. Donc, en s’adressant à lui, j’augmente mes chances de succès. Pas grand chose à perdre. Le phénomène a été étudié magnifiquement par Emile Dermenghem dans un livre qui a cinquante ans et pas une ride.

Seulement, voilà. Pour un musulman pur jus (oui, j’ai envie d’écrire pur porc, mais faut savoir se limiter), c’est insupportable. D’autant qu’ils le sentent bien, les mecs, qu’il y a une grosse influence catholique, là-dessous. Alors, ils purifient. Ils se mettent en phase avec leur doctrine. Pas la peine de hurler, on a fait pareil : suffit de voir les différents mouvements iconoclastes que le christianisme a suscité au fil des siècles. Y compris les parpaillots au temps du bon roi Henri. C’est juste au cas où vous auriez oublié qu’iconoclaste désigne avant tout un mouvement religieux. Les ceusses qui détruisaient les images de Dieu. Encore un truc que les parpaillots partagent avec les musulmans.

J’admets, c’est dur de voir détruits des monuments anciens qui ont, malgré tout, un sens culturel. Mais moi, je me sens pas d’expliquer aux salafistes qu’ils ont pas une bonne vision de la religion. La seule chose qui me vient à l’esprit, c’est de leur dire qu’ils feraient mieux de pas avoir de vision religieuse du tout. Mais je ne pense pas que je serais écouté.

La religion, c’est toujours pareil : tu acceptes le doigt, plaf ! tu te prends le bras, voire plus si affinités. Les religieux, ils ont toujours un présentable. Le Dalaï machin, le père Di Falco, ce bon Malek Chebel. Des religieux que t’as envie de prendre l’apéro avec eux tant ils semblent gentils, ouverts, dialogueurs. Sauf que derrière, y’a les autres, ceux qui tiennent la kalashnikof ou le gourdin. Ceux là, ils rigolent moins. Les gentils te disent qu’il faut pas en tenir compte, que c’est des épiphénomènes. Des épiphénomènes majoritaires, c’est pas trop la définition de l’épiphénomène. Mais où va t’on si on respecte le dictionnaire ? On peut plus parler. Si. Et on dira moins de conneries.

Et donc les salafistes, ils détruisent un bout du patrimoine de l’Humanité. Comme leurs copains qui ont brûlé la bibliothèque d’Alexandrie. Mais aussi comme ceux, chez nous, qui ont brisé les sculptures romanes ou bûché les signes religieux en bas-relief dans les églises. C’est une constante chez le croyant, il détruit. Si tu veux pas qu’il détruise, commence par détruire sa croyance.

Si on accepte la religion, juste un peu, c’est ça qu’on obtient. Pas la peine de dire que c’est juste des mecs qui interprètent mal, des voyous ou je ne sais quoi. Pas la peine de minimiser, d’ergoter, d’argutier. La religion, c’est un mouvement de masse, ça fonctionne comme un mouvement de masse. Lourdes, c’est Nuremberg. Des milliers de gens qui croient pareil, qui raisonnent pareil, qui ressentent pareil et qui se rassemblent pour se rassurer. Il suffit qu’il y en ait un avec une allumette et flambe le bûcher. Ou un burin, c’est pareil.

On en reparlera….

mercredi 4 juillet 2012

LA BAGNOLE COUTE CHER

Bon, le marché automobile s’effondre en France. Ben oui. Quand l’économie est en berne et que t’as trois millions de chômeurs, que se loger coûte un bras, tu changes pas ta caisse. Tu feras bien une année de plus avec la vieille. Je parle des gens normaux, des gens à Logan et Clio. Pas de ceux qui changent leur Ferrari tous les ans.

La baisse du marché automobile reflète la paupérisation du pays. Faut pas avoir fait l’ENA pour s’en rendre compte.

Et donc, en toute bonne logique capitaliste, les constructeurs réclament l’aide de l’Etat. Ils chient pas la honte, comme on dit chez moi. Ces mecs, Renault et PSA réunis, ils sont à la base de notre déclin économique. Renault, il ouvre une usine à Tanger, histoire de finir d’achever les sites historiques français. Peugeot, il veut fermer Aulnay-sous-bois. Dans tous les cas, chômeurs supplémentaires assurés. L’Etat va payer les indemnités. C’est pas une aide, ça ? Pas à leurs yeux. Ils créent des pauvres et, en plus, ils veulent que l’Etat les aide à vendre des autos aux nouveaux pauvres. Nouveaux pauvres à qui Pôle Emploi donnera un peu d’argent pour qu’ils achètent des bagnoles bradées avec l’aide de l’Etat.

La logique, elle est où ? D’autant que l’actualité est bonne fille qui nous indique, la même semaine, que Toyota va augmenter les capacités de production de son usine française pour exporter des autos aux USA.

Toyota est installé en France. Peugeot aussi. Ils ont les mêmes salaires, les mêmes conventions collectives, ils payent l’électricité au même prix. Le Nippon se félicite de la productivité de l’ouvrier tricolore, le Français chouine que plus rien n’est possible. Y’en a un qui s’appuie sur la France pour conquérir des marchés, l’autre qui fait la manche.

Moi, je vois qu’une explication. Quand, à conditions égales, l’un gagne et l’autre perd, c’est qu’il y a un mauvais et un bon. C’est con pour les ouvriers d’Aulnay-sous-Bois, ils sont dirigés par le mauvais. Vous pouvez tourner le problème dans tous les sens, c’est pas possible autrement. Toyota, c’est le premier constructeur automobile du monde. Quand les mecs de Toyota causent de productivité, ils savent de quoi ils parlent. Ils font pas du lobbying comme Madame Parisot qui veut nous faire croire que 20 € de plus par mois sur une fiche de paye, ça met l’économie en péril. L’augmentation du SMIC, elle va impacter Toyota comme Renault. Toyota hausse les épaules et développe son outil de production. Peugeot pleure, Renault se lamente.

Nos constructeurs automobiles sont pathétiques. Ils ne savent que communiquer, et mal en plus. Mais la réalité des marchés est autre. Quand Peugeot vend 3,5 millions de véhicules dans le monde entier, Toyota en vend 1,5 millions sur le seul marché américain. Et pas du bas de gamme qui excite tellement Ghosn. Non. De l’hybride, de la voiture chère. Nos constructeurs ont tout faux. Mauvais modèles, mauvaise image, mauvaises ventes. Ils ont loupé le tournant de l’hybride, ils se battent sur le premier segment du marché, celui qui ne rapporte rien. Leurs autos ne font plus rêver. Ghosn, il te dira que Nissan vend bien aux USA. Exact. Des autos fabriquées en Grande-Bretagne. Génial : Nissan, filiale de Renault, fabrique ses autos en Angleterre quand Toyota fabrique en France. Mais Ghosn, il s’en fout, il a pas vraiment la fibre nationale. Pour les Nissan, c’est Cameron et son tapis rouge, pour les Renault, il tend la sebille à Hollande. Faudrait voir à calculer les parts respectives de Nissan et Renault sur sa fiche de paye.

J’attends avec impatience les journalistes qui vont poser la question à Ghosn et Varin. Pourquoi vous avez une productivité calamiteuse quand Toyota a une productivité exceptionnelle ? Ce serait-y pas que vous êtes pas très bons ? J’attends leurs explications, ça va être un bel exercice de langue de bois. Parce que faut pas croire qu’ils vont se couvrir la tête de cendres. Ils vont te parler marché mondial, marché national, stratégie à long terme. En attendant, ils reculent gentiment, même sur leur marché national. Pas en nombre de véhicules. En chiffre d’affaires. Bon je dis ça, mais pas un journaliste ne posera la question : le marché publicitaire est trop gros pour se fâcher avec les constructeurs français.

Et puis Ghosn, il a toujours l’auréole de sauveur de Nissan. On ne peut pas le nier. Certes, il a sauvé Nissan en licenciant comme un malade, mais il l’a sauvé. Ce qui a conduit à une confusion épistémologique. Personne ne veut dire que Ghosn est un gestionnaire, pas un créateur. Filez lui une entreprise malade, il vous sortira le diagnostic et le traitement. Mais après ? Après, il faut créer, inventer, imaginer. Il faut un peu de folie. Imaginer un marché qui n’existe pas encore comme l’a fait BMW avec la Mini. Ou le créer de toutes pièces comme Smart. Les mecs comme Ghosn, il faut leur filer des entreprises à sauver, pas à conduire. Parce qu’il applique les mêmes règles à l’entreprise assainie que celles qu’il a appliquées à l’entreprise malade.

Tiens, prends la Formule 1. Renault a disparu du paysage. C’est pas vrai, dira Ghosn, nos moteurs dominent les circuits. Exact. Voilà trente ans que Renault est le meilleur motoriste du monde. Et voilà trente ans que tout le monde est persuadé que les moteurs allemands sont meilleurs. Y’a comme qui dirait un déficit d’image. Sauf que c’est plus rentable de faire de bons moteurs et de les vendre à Red Bull et Lotus que de développer des Renault F1. Faut dire que ça servirait à rien d’avoir des F1 au top pour vendre des Dacia au prolétaire russe.

Tout ceci conduit à une gestion étroite et à des résultats étroits. Avec au bout du bout, une érosion sans cesse accentuée. Car tout le monde peut appliquer des recettes mais rares sont ceux qui les inventent. Comme beaucoup de dirigeants, Ghosn est un prolongateur de courbes. C’est comme ça qu’il prévoit l’avenir. Moyennant quoi, il sera le dernier constructeur à s’implanter en Chine. C’est pas vrai, dit Ghosn, Nissan y est déjà. Je sais pas comment il a décidé ça, mais implanter la marque japonaise et pas la française dans un pays qui a un lourd contentieux historique avec le Japon et qui adore la France, ça montre les limites de la réflexion. Sauf que ce genre de savoir n’apparaît pas dans les courbes statistiques.

En attendant, Nissan, Renault et PSA rament derrière Toyota. Toyota qui va nous améliorer la balance commerciale que Renault dégrade depuis vingt ans.

Merci Toyota. Arigato degozaimasu….

On en reparlera…