mardi 21 mai 2013

CANET LONI


Alors, lui, il mérite la Palme d’Or du Poncif. Un frère flic, un frère voleur, celui-là, de poncif, il a au moins deux siècles. Y’a même des variantes. Chez Guy des Cars, par exemple : l’Impure. Une sœur au couvent, l’autre au tapin.

Guillaume Canet, le Guy des Cars du cinéma actuel. C’est pas neuf : avec Jappeloup, il nous avait quasiment refait Mon amie Flicka. C’est dans les vieux thèmes qu’on fait les meilleures recettes. Et homme-cheval, ça marche à tous les coups au moins depuis Alexandre Le Grand. Bon, moi je préfère quand le cheval se casse une patte et qu’il faut l’abattre et que le héros pleure sur de languides violons : une belle histoire doit mal se terminer. Il s’appelait Stewball…

Jappeloup, c’est sorti en pleine crise des lasagnes de cheval. Le télescopage aurait plu à Reiser, je pense. De là à surnommer le prince du stéréotype Canet-Loni, y’avait qu’un pas. Oserais-je le franchir ?

On vit sous la férule des bâtards improbables de Roland Barthes et Guy Debord. La société du spectacle embourbée dans le stéréotype. C’est sympa le stéréotype, ça marche vu que ça fait des siècles que ça marche. La seule question qui vaille : le stéréotype est-il création ? Parce qu’entre nous soit dit, refaire ce qui a déjà été fait, c’est pas superbement créatif.

Surtout que ça s’amenuise, ça s’anorexique, ça se dilapide, ça se merdifie. Tiens, prends un vrai thème bien stéréotypé : la bande de copains. Tu pars de Duvivier avec La Belle Equipe, tu descends quelques marches pour aller chez Sautet et tu finis avec Les Petits Mouchoirs. Remarque, t’es pas arrivé en bas. Y’en aura bien un pour faire pire. Duvivier, il avait magnifié un thème en lui donnant une profondeur sociale, Canet, il fait comme Truffaut , il choisit la profondeur de son nombril. Grâce à Closer, la profondeur du nombril de Canet est un sujet qui passionne les foules.

Je me souviens. La Nouvelle Vague et son souffle de liberté. Tu parles ! C’étaient juste des films qui parlaient de jeunes, alors les jeunes aimaient. Forcément. Enfin, ils aimaient ce qu’ils pouvaient comprendre : les aventures médiocres du médiocre Doinel. Godard, c’était moins évident. Et je te parle même pas de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet. Je me souviens d’une projection d’Othon où on était pas dix…. Enfin, Straub et Huillet, c’était pas vraiment la Nouvelle Vague, il me semble, malgré ce qu’en dit Wikipédia.Et puis, ça avait un petit côté intello raide qui frisait le masochisme.

Bon enfin tout ça pour dire qu’on baigne dans le cliché le plus convenu, filmé de la manière la plus convenue, avec les dialogues les plus convenus. Bref, qu’on se fait chier au cinéma. Parce que quand t’as décidé de t’intéresser aux sentiments des hommes, le catalogue est étroit : je t’aime, je t’aime pas, tu m’aimes, tu m’aimes pas. Corneille et Racine ont quasiment tout traité. Pour faire moderne, tu pimentes en remplaçant le couple par deux hommes (ou deux femmes), mais ça reste pareil. Tiens 20 ans, c’est jamais que Le Diable au Corps, avec la dimension patriotique en moins. Une vieille qui baise un jeune. C’était déjà chez Stendhal…OK, Madame de Rénal, elle baise pas vraiment, mais c’est l’esprit.

Le talent, c’est de découvrir des nouveaux sujets. Ou de nouvelles formes pour des thèmes anciens. Tu vois le premier film de Spielberg, Duel, tu comprends à qui t’as à faire. A cette aune, dans la filmographie de Spielberg, y’a pas trop de déchets. Mon préféré, c’est 1941 : OK, ce fut un échec, je suis pas trop bon juge.

Ceci dit, quand je parle de société du spectacle, c’est vachement gentil pour tous ces films, vu qu’on n’y trouve aucun spectacle. Sauf quelques courses poursuites en bagnole, des braquages, des mecs qui flinguent, des trucs hollywoodiens qu’on trouve sur toutes les Nintendos du monde et qui n’ont rien à voir avec le spectacle. Je regrette le Jauréguiberry dans les bancs de Terre Neuve et Dufilho qui philosophe. Mais Dufilho n’est pas sur Nintendo. Le public va voir ce qu’il a déjà vu, c’est plus rassurant. Quand tu cherches pas la surprise, tu trouves jamais le talent.

Et puis, en période de crise, les bons sentiments ça rassure. Fait-on de l’art avec de bons sentiments ? et Jappeloup, est-ce de l’art ?… Poser la question, n’est-ce pas y répondre ?

On en reparlera….

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