vendredi 19 avril 2013

SE LOGER A PARIS

C’est con, j’ai oublié son nom. Pas son prénom : Daniel. Le mec, il bossait à la Banque des Pays-Bas, avant la fusion avec la BNP. Polytechnicien, montagnard, brillant et rigolo.

Il avait en charge le patrimoine immobilier de la banque, il gérait quelques milliers d’appartements et de bureaux dans Paris. Dans son job, y’avait un secteur sensible : les appartements réservés.

Explication : la banque gardait quelques dizaines d’appartements, dans les beaux quartiers, soumis à la loi de 48. Genre 200 m2 dans le 7ème avec un loyer de 1000 euro par mois. Vachement pas loi de 48, en parfait état, bien entretenus, mais bon, les loyers, ils étaient loi de 48. L’affaire du siècle.

Son boulot, c’était d’identifier et de sélectionner les gens qui cherchaient un logement et qui pouvaient aider la banque. Le profil type, c’était le jeune député, fraichement élu, avec les dents qui rayent le parquet et dont on pouvait imaginer qu’il allait faire une belle carrière. Celui-là, il l’approchait et il lui proposait un logement. Tu résistes, toi, à une proposition comme ça ?

Après, c’était facile. Quand le jeune loup était installé, on lui faisait savoir que telle proposition de loi pouvait être amendée. Finement. Sans scandale. Un bel amendement bien technique que le député risque rien mais que la banque y trouve son intérêt. Ça pouvait aussi marcher pour les bureaux, lors d’une campagne électorale, par exemple, ou pour les permanences, un parlementaire, ça a des besoins immobiliers. Eventuellement, un studio pour les études du petit. Ces choses-là, les petits services entre gens de bonne compagnie…

Y’avait aussi quelques artistes. Après quand t’as besoin d’un chanteur pour l’arbre de Noël du personnel ou d’un acteur pour une pub, ça aide.

Daniel, il m’avait raconté ça un jour, chez Claude, rue de Provence, devant un petit Saint-Pourçain. Pour moi. Lui, il buvait du Perrier. Ça t’éclaire l’oligarchie, ce genre de trucs.

J’aimerai qu’on en parle dans la transparence : qui loge qui ? Parce que si t’es député et que ton bailleur c’est Axa, t’as pas la même vision de l’assurance-vie. Forcément.

D’autant que le choix n’est pas politique : je veux dire qu’il y a autant de parlementaires de gauche que de parlementaires de droite dans la panier des banquiers. Sont pas cons, les banquiers, ils savent bien qu’un futur ministre reste un futur ministre quelle que soit la couleur du gouvernement.

Bon, alors, on la fait cette liste ?



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