dimanche 11 novembre 2018

LE ROBIN ET LE RABBIN

Puisqu’on parle de Brésil, parlons de Bernanos. Il a calmé la colère que j’avais contre Cassin. Ici, à Bayonne, tous les six mois, on a droit à un hommage à Cassin, surnommé le Bayonnais universel, alors qu’il est moins connu que son compatriote Didier Deschamps.

Cassin, comme beaucoup de Prix Nobel, est une vieille ordure. Pour comprendre ce quasi-blasphème, il suffit de comparer deux textes : la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 et la Déclaration Universelle qu’il a élaborée en 1948. Cassin réintroduit dans sa déclaration des droits comme le droit à la religion que la Convention avait délicatement évacué. Bernanos a bien regardé la genèse de la Déclaration et il y voit une opposition déterminée entre Rousseauistes, fanatiques de l’Homme et Robespierristes obsédés par la préservation de la puissance de la Nation. Et il est patent que les Robespierristes ont tenu la dragée haute à leurs adversaires, de 1789 à 1948. Il n’est d’article où le mot de Nation n’apparaisse.

Quand Madame Roosevelt, chargée du problème dans le cadre de la préparation de l’ONU, confie le problème à Cassin (et à Stéphane Hessel) elle doit glisser quelques instructions contre lesquelles il ne s’indignera pas (Hessel non plus) car le cassinien résultat est un crachat à la figure des Constituants. Cassin réintroduit l’homme de Rousseau dans la Déclaration qu’il transforme subrepticement en Déclaration des Droits de l’Individu. La Déclaration de 1789 mentionnait inlassablement l’Homme(comme concept, non comme genre) et le Citoyen (membre d’une Nation). La Déclaration de 1948 parle seulement de « personne » et admet que cette personne puisse être victime de la Nation. Ainsi le Citoyen est évacué et le triomphe des Rousseauistes est total.

Au moins dans les mots. Les pays « démocratiques » étaient sur-représentés. Cassin, pour plaire aux communistes, ajoute « collective » à « propriété ». Pour les musulmans et les protestants, il admet les manifestations publiques de la religion. Ce sont les droits de Cassin qui permettent aujourd’hui de considérer que la liberté de parole de l’individu surpasse l’intérêt de la Nation et permettront demain, peut-être, de punir le blasphème, droit imprescriptible de l’Homme.. Sauf aux yeux de Madame Roosevelt

Dans l’enthousiasme provoqué par la création de l’ONU, ce glissement sémantique est passé inaperçu, d ‘autant que l’ONU s’était doté d’instruments de coercition qui manquaient à la SDN. On créait une société d‘Etats que leurs citoyens pouvaient attaquer sur des fondements discutables puisque le postulat était que l’Etat menaçait la personne, ce qui semble paradoxal. Il suffit que la doxa s’empare d’un cas et la condamnation est inévitable.

Prenons un cas précis. Le Pakistan adopte la charia comme base juridique. Rien dans la charte onusienne ne l’interdit. Au contraire. L’ONU va accueillir dans ses rangs, l’Inde, le Pakistan ou Israel, pays qui ne font pas mystère de leurs racines religieuses. Cassin l‘a permis. A parti de là, on peut imaginer que ces Etats vont menacer les personnes qui ne partagent pas l’opinion dominante. Oui, mais dans ce cas, ça ne marche pas. Parce que la doxa internationale n’est pas dans le coup. La doxa internationale, c’est celle des USA. Celle qui admet que c’est pas bien de condamner une chrétienne qui a bu de l’eau musulmane (comme si l’eau pouvait avoir une religion), mais qu’on peut enfermer des citoyens qui ont enfreint un interdit religieux.

Tout ceci est passablement incohérent. 60 ans après son admission,  on reproche au Pakistan une attitude qui était en germe dans la dite admission. Quand un Etat se crée sur des bases religieuses,  il va de soi que ceux qui ne partagent pas cette religion seront des citoyens de seconde zone. Mais les Droits de  l’Homme version Cassin l’admettent. Ainsi l’Etat n’est plus une menace vis à vis de croyants différents dans la mesure où il privilégie les croyants qui soutiennent l’Etat.

Cette éradication des critères religieux est devenue la pierre de touche de l’humanisme. On admet que les Saudiens peuvent fouetter un blogueur opposant, par exemple. « On » ce sont les autres membres de l’ONU qui sont censés partager les mêmes valeurs. En réalité, ce qui compte, c’est la majorité. Le système cassinien permet de condamner en tout état de cause car il est aussi peu fiable qu’une religion.

Le hic, c’est que Cassin n’avait pas prévu que les religions deviendraient prégnantes et que leur hiérarchie changerait, au point que la religion est désormais clivante puisqu’elle est acceptée, admise, valorisée. Curieusement, on parle d’états musulmans, mais jamais d‘états chrétiens.

Bref, Cassin  a foutu le bordel en démontant les « vrais » droits de l’Homme, ceux de la Révolution, pour les remplacer par une soupe de mots où les dieux surnagent avec les croutons. Juriste, Cassin était aussi israélite : le robin a t’il cédé au rabbin ?


On en reparlera

1 commentaire:

  1. :) (<---- Un statut made in pierre-henrien à la lecture de ce billet, ma foi...bien tassé !) (Et au passage, "Le Vieux" : laisse tomber le milieu bien bisounours-ement puant du ciné, fais-en un roman ! Tu auras bien plus de chance de fourguer car tes tripes y seront pleinement palpables... En tout cas, perso, j'ai fait mon choix. George ou Emil sont là pour guider mes pas, moi, j'les em-mer-de ! TOUS. ;)

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