mardi 29 juillet 2014

LA CORRUPTION

C’est une gangrène. En nos temps d’argent-roi, elle est partout. Parfois, je me souviens de ce vieux dirigeant d’une importante société parisienne avec qui je parlais de revenus et je m’étonnais de la modicité de son salaire. Il m’avait dit : « J’ai plus de soixante-dix ans, mais je ne fais toujours que deux repas par jour. Et tout ce que je peux accumuler ne rentrera pas dans mon cercueil ». Il avait casé ses enfants, plutôt bien, il avait donc assuré leur avenir.. Tranquille et modeste.

Et donc, depuis son accession au pouvoir, le Président Xi Jinping a lancé une campagne anti-corruption. C’est que le corruption est une plaie historique en Chine, depuis des siècles. On en a déjà parlé ici.

Durant le dernier trimestre 2013, il a collé en prison près de 40 000 fonctionnaires. Pas des très gros. Des fonctionnaires locaux, le plus souvent. Ceci dit, les fonctionnaires locaux, c’est eux qui emmerdent le plus le peuple parce que c’est à eux que le peuple à affaire, c’est à eux qu’il faut glisser l’enveloppe. Moi, ça me plaisait bien. Un certain sens de la morale, un côté Robespierre. C’est ça qu’on demande d’abord à des dirigeants : l’honnêteté.

A priori, il vient de passer la vitesse supérieure . Là, c’est Zhou Yongkang qui vient de tomber. Membre du comité permanent du Bureau politique (ils sont 7, pas un de plus) et chef des services de la sécurité intérieure. Pour faire bref, le patron de toute la police chinoise. On est pas dans le fonctionnaire de village, tu peux me croire.

Moi, brave plouc, j’attendais que la presse salue le nettoyage. T’as qu’à croire. La presse française, elle supporte pas la Chine. On en a déjà parlé ici.

Et donc, ce n’est plus Xi Jinping s’attaquant à la corruption, ça devient Xi Jinping s’attaquant à ses ennemis politiques. C’est vrai ça : le lecteur pourrait penser que le Président chinois a un sens moral. Détrompons-le.

Soyons clairs. A ce niveau, tous ces mecs se côtoient depuis des années. Forcément des clans se sont formés, chacun a ses copains, ceux qu’il aime bien, et ses adversaires, ceux qu’il aime moins. Les différences ne sont pas politiques. Tous ces bonshommes travaillent ensemble, dans le même sens. S’il y a des différences, elles sont tout, sauf politiques. Elles sont humaines. Zhou, il était copain avec Bo Xilai, un autre corrompu, en prison depuis quelques mois. Pour faire simple, ils en croquaient ensemble. Et donc, Xi Jinping en tire les conséquences.

L’attitude de la presse française est immonde. Reporters Sans Frontières (oui, la secte de Robert Hénard, le mec qui fricote avec le FN en donnant des leçons de morale) diffuse une photo du Président chinois faisant un bras d’honneur. Ils sont gonflés les mecs ! En 2008, ils soutenaient les Tibétains qui selon eux, étaient un peu brimés. Par qui ? Par Zhou. Normalement, ça devrait leur faire plaisir que Zhou file en prison. Ben non. Ils le défendent ! Tu peux imaginer ?

Les psys appellent ça la « double contrainte ». Quoi que tu fasses tu fais mal. C’est incohérent, mais c’est comme ça.

Mes copains, ils m’engueulent. Ils me reprochent de toujours prendre le parti des Chinois. Du moins, je ne suis pas incohérent. Et puis, j’ai des arguments.
Des arguments simples, à mon niveau.

J’ai un copain chauffeur de bus. Il me montre une photo qui me sidère : il est en train de rigoler avec Peng Liyuan. Y’a de quoi s’étonner, non ? Peng Liyuan, c’est une chanteuse chinoise, plutôt populaire. C’est aussi la femme de Xi Jinping. Mon copain chauffeur de bus, il rigole avec la Première Dame de Chine. Et donc j’interroge. Et donc, il raconte.

L’an passé, Peng Liyuan a donné une série de concerts en Europe. Pour ce faire, elle a fait comme tous les chanteurs, elle a collé ses musiciens et ses techniciens dans un bus pour aller de ville en ville. Et elle est restée avec eux, dans le bus, à discuter, à déconner. C’est comme ça qu’elle est devenue copine avec le chauffeur de bus.

Mon copain, il se marre. Son bus était suivi en permanence par les gros bras des Services secrets. Quand il arrivait à destination, les gardes du corps envahissaient le véhicule. Ils pétaient de trouille. Pas Peng Liyuan. Elle avait juste envie d’être une artiste ordinaire dans une tournée ordinaire. On est loin de Carla.

Alors, je vais te dire. On est ce qu’on épouse. Ça fait près de trente ans que Xi Jinping vit avec une nana qui est copine d’un chauffeur de bus. Et, par voie de conséquence, je l’imagine comme elle. Des gens qui savent ce qu’ils doivent aux citoyens, leur succès, leur carrière, et qui ont envie de renvoyer l’ascenseur. D’améliorer la vie du peuple comme le peuple a amélioré leur vie

Peut être que je suis un gros naïf. Pas plus naïf en tous cas que ceux qui ont suivi Reporters Sans Frontières. Pas plus naïf que ceux qui lisent aujourd’hui dans Le Monde pis que prendre d’Alain Minc que Le Monde encensait quand il en était le patron.

Peut être que je suis un gros naïf. Et peut être que Xi Jinping est aussi un gros naïf, un mec qui voudrait que le pouvoir qu’il a conquis l’aide à construire un monde dont il rêvait à 18 ans.

Jusqu’à ce que les faits me prouvent le contraire, je le créditerai de ça.

En tous cas, je suis sûr d’une chose : Cahuzac est libre. Comparons ce qui est comparable avant de donner des leçons de morale.

On en reparlera…

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