dimanche 2 décembre 2018

LA LUTTE DES CLASSES

On l’a déjà dit : depuis 1989, tous les politiques occidentaux ont enlevé de leur boîte à outils, les outils du marxisme. A commencer par la lutte des classes, rejetée (et c’est un comble) par le PCF, par exemple.

Changer les mots ne change pas les choses. Qui ne voit pas que la lutte des classes sous tend la plupart des mouvements sociaux aujourd’hui. Les gilets jaunes, c’est le Tiers Etat qui revient. Appauvri, méprisé, déclassé, en 2018 comme en 1789.

Elevés dans les berceaux cotonneux des formations paisibles, les hommes et femmes politiques n’ont plus conscience de leur action. Ils parlent de « ressenti ». Mais faire basculer la fiscalité d’une classe sur une autre, supprimer l’ISF, gonfler le crédit impôt-recherche et augmenter la CSG, ce n’est pas du ressenti. C’est un message direct à ceux que le Président actuel traite d’illettrés comme son prédécesseur les qualifiait de « sans-dents », un message qui affirme : vous ne comptez pas, en tous cas, vous comptez moins que ceux qui vous dirigent.

L’oligarchie (et tous les députés en font partie) a presque réussi à faire entrer dans la doxa ce mensonge majuscule : les travailleurs n’ont aucune place dans le système de production. En détruisant le code du travail, le Président a envoyé un message fort : les travailleurs ne comptent plus. Dans tous les cas, c’est ainsi qu’il a été compris. C’est la première étape du mépris de classe.

Le reste va de soi et se mêle avec la surconsommation réservée à ceux qui en ont les moyens, les niches fiscales réservées aux chiens de garde du gouvernement, tout un ensemble de règles qui, toutes profitent aux mêmes. Si ce n’est pas une opposition, classe contre classe, qu’est ce ?

Les vieux qui se sont frottés à Marx le savent bien. La clef est dans la redistribution. Quand la plus value se répartit inégalement, les tensions se créent. Les citoyens peuvent tout supporter, sauf l’inégalité. Surtout quand elle est affichée, glorifiée, encensée. Il est caricatural qu’au plein des Gilets Jaunes surgisse l’affaire Ghosn. Les citoyens horrifiés attendent que le gouvernement, actionnaire de référence de Renault depuis la Libération, réagisse, d’autant qu’il y a peu, le Président s’affichait avec Carlos dans une usine du groupe. RIEN. Pas un mot. Il semble normal ou à tout le moins accepté qu’un chef d’entreprise puisse être honteusement sur-rémunéré, fraude le fisc, tape dans la caisse pour ses besoins personnels.

Face à cette situation, le Président se tait, choisissant de facto son camp. Mais le Président ne croit pas à la lutte des classes. Je ne suis pas sûr qu’il sache ce qu’est une classe sociale. Pendant ce temps, le ton des réseaux sociaux change. Je ne peux pas résister à cette citation d’Alain Simon : « Dans la mesure où une classe sociale n'est pas solidaire de l'ensemble des citoyens, qu'elle se goinfre sans retenue, qu'elle vole le fisc honteusement, si elle est prête à s'expatrier plutôt que de supporter sa charge sociale, si elle se sent apatride, nous n'en avons plus besoin.
Un corps mort doit être dégagé du corps social, comme une peau morte... »

On revient à la définition d’Etienne de Silhouette : « Dans un royaume bien conduit, le fort supporte le faible ». C’est pourtant simple, sauf quand le fort ne se sent pas les épaules et préfère voir le faible crever. C’est la définition même de la lutte des classes car le faible a conscience de sa faiblesse mais aussi, très vite, de son nombre. Les tensions sociales débouchent sur les tensions politiques. Les appels à la raison sont inutiles et inefficaces, l’affect prend le pouvoir avec le désir de survie d’un côté et l’immonde cupidité de l’autre.

La lutte des classes n’a qu’un inconvénient. C’est le faible qui gagne, en général. Mais les moyens de gagner sont nombreux et divers.. et la plupart des auteurs ne se sont pas intéressés au résultat, connu d’avance, mais à la manière de l’obtenir, puis de le gérer. Le plus célèbre texte de Lénine est titré : Que faire ?

Il est donc plus simple de ne pas en tenir compte, quitte à  se retrouver devant une situation bloquée où l’oligarchie va chercher à conforter un pouvoir moribond en manipulant un peuple en manque  d’instruments de réflexion. Quand tous croient au pouvoir de la parole pour annuler le réel.

Oubliant que la seule parole est celle qui affirme que le roi est nu.

On en reparlera…



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