samedi 21 mars 2020

LE SAVOIR

La crise du coronavirus est avant tout une crise épistémologique mais personne ne le dira. Revenons donc sur quelques thèmes de ce blog.

1/ la pensée de Raymond Boudon C’est le mec le plus cité quoique jamais lu. Boudon a inventé le concept d’effet non désiré qu’il a appelé « effet pervers ». Pas un communiquant, pas un sciencepotard, pas  un essecophile qui ne parle d’effet pervers. De préférence sans avoir lu Boudon. C’était au début de sa carrière. Près de la retraite, ayant analysé les systèmes administratifs, il arrive à une conclusion simple : la prise de décision rationnelle n’existe pas car elle est impossible. Personne n’en parle jamais. Jai discuté avec quelques administrateurs ou gestionnaires de haut vol. Ils n’ont jamais lu Boudon. Normal. On te prépare à prendre des décisions, c’est pas pour t’expliquer qu’il est plus simple de jouer aux dés. Forcément : une prise de décision implique de tenir compte de nombreux paramètres ET de leurs interactions. On court toujours le risque d’oublier quelque chose et que cet oubli fasse basculer le château de cartes décisionnel (ou décisif). Un gouvernement doit être certain. Le Président ne peut pas dire qu’il ne sait pas. Mais il peut dire qu’il ne savait pas. Les communiquants soufflent : on ne dit pas « j’étais incapable » mais « je n’étais pas en capacité de… ». Restons softs.

2/ la pensée de Roland Barthes et de quelques linguistes. Il est inutile d’accumuler les chiffres : un signe pertinent suffit. Encore faut il juger de la pertinence. Communication encore. Expliquer la pertinence demande du savoir. Cracher des chiffres ne demande rien que le savoir d’une boutiquière anglaise faisant sa caisse. Pensée Thatcher. Le chiffre est pertinent en soi. Ce qui est faux, bien entendu, la pertinence du chiffre est donnée par le contexte. Quand on le connaît.

3/ toujours avec Barthes : sortir de l’idéologie qui crée le mythe. Le mythe fait croire que ce qui est artificiel est naturel. Mais cela suppose du savoir. Il suffit de savoir communiquer et, si c’est trop compliqué faisons comme à Sciences Po, enlevons ce qui gêne. On parlera de sens de la synthèse. Même, et surtout, si les éléments enlevés sont pertinents.

Ce dont je suis certain, c’est que l’analyse sera faite par les condisciples des analysés et qu’ils n’utiliseront que les instruments qu’ils connaissent. En clair, l’analyse épistémologique ne vaudra pas un clou. Idem pour l’analyse idéologique. Macron a fait au mieux dans le cadre idéologique fixé par Bruxelles. Evidemment. Et personne ne changera le paradigme.

Depuis un demi-siècle, le chiffre signifie la science. On le pulvérise, on le dissémine, on le postillonne pour analyser les faits sociaux. On l’a vécu avec le virus couronné : 14 morts en Picardie, 640 à Wuhan. Parfait. Quel est le sens ? Cherchez pas, y’en a pas.. une minute de micro.

Je pense à Brecht. Galileo Galilei… Il y a du Galilée chez Raoult… « Celui qui ne connaît pas la vérité, celui-là n'est qu'un imbécile. Mais celui qui la connaît et la qualifie de mensonge, celui-là est un criminel ». Ajoutons désormais ceux qui ne connaissent pas la vérité et la qualifient malgré tout de mensonge : les réseaux sociaux, abjecte tribune des ignares. Tiens, une info : Brecht adorait le cigare et son ami Castro le fournissait en cigares cubains. Quel rapport avec le sujet ? Aucun, c’est de la pensée BFM. Ça meuble. Ajoutons qu’un corona, c’est un cigare. Une minute de micro en plus.

Va falloir que je vous apprenne à décrypter. Avant qu’on ne « debriefe » la crise du corona. Crise ? mot-mantra. Krusein, la crise, c’est un mot grec. Médical. Le mot désigne l’acme d’une maladie, le moment où on meurt ou on guérit. En langage media : « Ça passe ou ça casse ». C’est moins joli. Ouais mais moi je suis snob, méprisant, arrogant et je vous emmerde.


On peut être certain que le debriefing confortera l’action et que ce sera encore une occasion manquée….Une de plus

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